18 décembre, 2006

« UN CRACHAT DE MÉPRIS »


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DES CADETS PORTENT LE CERCUEIL D'AUGUSTO PINOCHET 
LORS DES FUNÉRAILLES DE L'EX-DICTATEUR À L'ACADÉMIE 
MILITAIRE DE SANTIAGO, LE 12 DÉCEMBRE 2006. 
PHOTO MARTIN BERNETTI

Un petit-fils de Pinochet exclu de l'armée pour avoir défendu son grand-père.

« UN CRACHAT DE MÉPRIS »
PHOTO CLAUDIO POZO
La controverse sur Augusto Pinochet a conduit l'armée chilienne, mercredi, à exclure de ses rangs le petit-fils de l'ex-dictateur chilien, le capitaine Augusto Pinochet Molina, qui avait défendu publiquement le bilan de son grand-père.

Lors des obsèques du général défunt, mardi à Santiago, le capitaine Augusto Pinochet Molina avait justifié le coup d'Etat militaire dirigé il y a 33 ans par son grand-père.

"On lui a communiqué la gravité de sa faute et on l'a informé qu'il allait être congédié", a déclaré le commandant de l'armée, le général Oscar Izurieta, faisant référence au capitaine Molina Pinochet.


La présidente socialiste chilienne Michelle Bachelet avait demandé des sanctions de l'armée à l'égard du capitaine Augusto Pinochet Molina, 33 ans, qui avait rendu hommage à son grand-père, dans une intervention non autorisée, pendant les obsèques mardi.


Il avait qualifié ce dernier d'homme ayant "renversé un régime marxiste en pleine guerre froide".


Le petit-fils du général Pinochet, qui avait défendu le bilan de son grand-père, s'était violemment opposé celui d'un ex-chef de l'armée, assassiné par le régime, et qui était lui venu cracher sur le cercueil du dictateur.

Cette confrontation qui a fait les gros titres des journaux n'a pas paru perturber Michelle Bachelet, elle-même victime de la dictature et qui a affirmé que la page de l'ère Pinochet était déjà tournée depuis longtemps au Chili.

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« UN CRACHAT DE MÉPRIS »

La presse a révélé mercredi que l'individu qui avait été évacué par la police lundi pour avoir craché sur le cercueil de Pinochet était Francisco Cuadrado Prats, 39 ans, petit-fils de l'ancien chef de l'armée, le général Carlos Prats, un fidèle d'Allende, assassiné en 1974 à Buenos Aires avec son épouse par la police de la dictature.


Celui-ci, un artiste peintre, a confié au journal El Mercurio qu'il avait voulu venger ses grands-parents et que c'était "un crachat de mépris".


C'est le général Prats, loyal au président socialiste Salvador Allende, qui avait conseillé au chef de l'Etat de nommer Pinochet à la tête de l'armée.


Trois semaines plus tard, Pinochet s'emparait du pouvoir par les armes et un an après il faisait assassiner Prats et son épouse, Sofia Cuthbert, en pleine rue d'un quartier chic de Buenos Aires.


A propos du discours imprévu du petit-fils de Pinochet, la présidente Bachelet avait parlé de "faute gravissime" et s'était dite certaine que "l'armée saurait agir comme il se doit". Elle a notamment dénoncé le fait que le capitaine ait exprimé une opinion politique alors que la législation chilienne impose un devoir de réserve et de neutralité aux militaires.


Le capitaine Pinochet Molina a aussi critiqué les juges enquêtant sur Pinochet et les crimes de la dictature, estimant qu'ils étaient "plus en quête de renommée que de justice".


L'officier ingénieur en informatique a admis qu'il envisageait déjà depuis plusieurs mois de quitter l'armée.


Des avocats défenseurs des droits de lhomme ont déjà porté plainte contre lui pour "sédition" et "non respect des devoirs militaires".


Quelque 3.000 opposants furent tués ou disparurent sous le régime de Pinochet (1973-1990) tandis que près de 30.000 furent torturés, dont la présidente socialiste Bachelet et sa mère Angela. Son père Alberto Bachelet, un général d'aviation proche d'Allende, est également mort des suites de tortures.
Les restes de l'ancien homme fort du Chili reposeront dans la propriété familiale de Los Boldos à 110 km au sud-ouest de la capitale.


La famille a décidé d'incinérer sa dépouille pour éviter, selon les médias, une éventuelle vengeance et profanation de sa tombe.


SANTIAGO (AFP)© 2006 AFP