30 novembre, 2021

CHILI / « LE RETOUR À L'ORDRE »

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La droite a réussi à installer dans l'opinion publique chilienne l'idée que les problèmes d'ordre et de sécurité sont de la responsabilité de l'opposition, escamotant la  responsabilité du gouvernement de Sebastián Piñera, en particulier de son ministre de l'Intérieur.
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L'extrême droite est perçue comme la possibilité d’un « retour à l'ordre ». D'où, en partie, l'adhésion à José Kast, qui se présente comme « le candidat de l'ordre », de personnes qui craignent pour leur sécurité.

Il ne fait aucun doute que les manifestations de la Plaza Italia et la répression violente des policiers y ont contribué, ainsi que les conflits dans  l’Araucanie aujourd'hui dans un « état d'exception constitutionnel », conflits qui ont été manipulés par les entreprises forestières et les forces d'ordre. Les médias et les faiseurs d'opinion ont un rôle important dans cette sensation d’insécurité, en particulier les « unes » des journaux et les émissions de « télé-poubelle » par le traitement accordé aux faits de violence.

Bien que l'opposition ait condamné les violences et les provocations, son message est inaudible.

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Les gestes du candidat Boric pour faire preuve d'empathie envers les personnes touchées, reçoivent les critiques de ceux qui « ne votent pas, mais s'organisent », des acrates créoles, sans oublier les « libertaires de gauche et de droite ».

Une partie minoritaire de l'électorat communiste n'a pas voté pour Boric pour montrer son mécontentement. Mais surtout les abstentionnistes en tout genre, ceux qui « s’en foutent royalement » (margination et/ou automargination) et font preuve d’un individualisme exacerbé, hérité de la dictature et du néolibéralisme hégémonique, les anti-politiques  qui nous rappellent les « seigneurs politiques » dont parlait Pinochet, lequel a tenté « de faire du Chili un pays de propriétaires et non de prolétaires ».

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Il existe une réserve importante de votes anti-Kast chez les jeunes qui ont boudé les urnes, dans la diversité sexuelle, dans les mouvements féministes et écologistes, chez les animalistes et chez les défenseurs de l'environnement. Les rares et limitées avancées « sociétales » sont menacées par l’arrivée de l'extrême droite. Le projet d'une nouvelle constitution, élaborée par la Convention constitutionnelle, l’organe détenteur du pouvoir constituant de la République du Chili, chargé de rédiger une nouvelle Constitution, est également menacé. MC.

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  DESSIN ENEKO

29 novembre, 2021

AU HONDURAS, LA CANDIDATE DE GAUCHE XIOMARA CASTRO EST EN TÊTE DE L’ÉLECTION PRÉSIDENTIELLE

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PHOTO AFP

Avec 53 % des voix, elle compte une confortable avance sur son adversaire de droite, Nasry Asfura, à 34 %. Mais le dépouillement est loin d’être fini et la menace de fraudes et de troubles plane.

Le Monde avec l'AFP

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La candidate de gauche Xiomara Castro (Parti liberté et refondation, Libre, gauche) prend l’avantage pour la présidence du Honduras face au dauphin du président de droite sortant, dans un pays en proie à la violence des trafiquants de drogue, qui ont étendu leur corruption jusqu’au plus haut niveau de l’État.

La participation des électeurs s’est établie au niveau «historique » de 62 %, a annoncé, dimanche 28 novembre soir, le Conseil national électoral (CNE), donnant les premiers résultats partiels.

Avec les votes de 16 % des bureaux de vote dépouillés, Xiomara Castro, épouse de l’ancien président Manuel Zelaya, renversé en 2009 par un coup d’État, obtient plus de 53 % des suffrages, tandis que son adversaire de droite, Nasry Asfura, n’obtient que 34 %. Le CNE a cependant insisté sur le caractère provisoire de ces résultats et a exhorté les candidats et les électeurs à attendre les résultats définitifs. La menace de fraudes et de troubles plane sur le scrutin et son dépouillement.

42 000 militaires et policiers mobilisés

« Ils vont tenter de provoquer le peuple. Nous savons qu’il y a du désespoir, particulièrement chez ceux qui gouvernent depuis douze ans », a mis en garde Mme Castro après avoir voté, alors qu’au moins 31 personnes ont été tuées durant la campagne. Le candidat du parti au pouvoir s’est quant à lui engagé à respecter le résultat du vote et a demandé que ne coule « pas une goutte de sang ». Les autorités ont mobilisé 42 000 militaires et policiers pour surveiller les 5 755 bureaux de vote dans le pays et parer à des troubles éventuels.

Outre leur président, les électeurs devaient élire députés et maires. Le Honduras est dirigé depuis plus de dix ans par le Parti national (PN), sous la férule de Juan Orlando Hernandez, soupçonné par les États-Unis d’être impliqué dans le trafic de drogue.

Sentant le vent tourner, le PN avait durci le ton de sa campagne, traitant la leader de Libre de « communiste» et vilipendant ses propositions de légalisation de l’avortement et du mariage homosexuel.

En 2013, M. Hernandez avait battu d’une courte tête Mme Castro et était ensuite passé outre la Constitution pour se présenter pour un second mandat, en 2017. Sa douteuse réélection sur le fil face à la star de la télévision Salvador Nasralla avait déchaîné de violentes manifestations.

De nouvelles émeutes ne feraient pas l’affaire de Washington, qui « veut éviter une répétition de [l’élection] de 2017 et une augmentation de la pression migratoire », estime Michael Shifter, président du think tank Dialogue interaméricain.

Violence et misère

Des dizaines de milliers de Honduriens tentent de rejoindre chaque année le million de leurs compatriotes ayant fui la violence et la misère, dans leur écrasante majorité aux États-Unis. Plus de la moitié des dix millions d’habitants vit sous le seuil de pauvreté, que la pandémie due au coronavirus n’a fait qu’accentuer. Le chômage a presque doublé en un an, passant de 5,7 % en 2019 à 10,9 % en 2020.

Avec un taux d’homicides de 37,6 pour 100 000 habitants en 2020, le Honduras est en outre un des pays les plus dangereux au monde, hors zones de conflit.

Ces deux dernières années, le Parlement a dissous une commission anticorruption et adopté un nouveau code pénal prévoyant de plus faibles peines pour les faits de corruption ou de trafic de drogue. Beaucoup de parlementaires étaient visés par les enquêtes de cette commission.

Des trafiquants de drogue détenus aux États-Unis ont mis en cause le président Hernandez, dont le frère, Tony, a été condamné par un tribunal fédéral américain à la prison à vie pour son implication dans le trafic de 185 tonnes de cocaïne.   

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26 novembre, 2021

PRÉSIDENTIELLE AU CHILI : SÉISME POLITIQUE

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Dix années ont passé depuis que le Chili a connu de fortes mobilisations étudiantes contre le premier gouvernement de Sebastian Piñera afin d’exiger une éducation gratuite et de qualité. Ce mouvement a construit de nouvelles aspirations et avec elles de nouveaux leaders politiques. Une décennie plus tard, une des figures de ce mouvement étudiant arrive deuxième lors du scrutin de ce premier tour de l’élection présidentielle avec 25 % des suffrages, il s’agit de Gabriel Boric, 35 ans et originaire de la région de Magallanes, la Patagonie chilienne. Face à lui, encore improbable il y a peu, le candidat d’extrême droite José Antonio Kast se classifie en tête du second tour avec 28 % des voix.

par Pierre Lebret, Christophe Bieber, Florian Lafarge

 PHOTO MARTIN BERNETTI

Dans un pays où le peuple a voté très largement en faveur de la création d’une Assemblée constituante en 2020 afin d’effacer l’héritage institutionnel de Pinochet, la qualification au second tour de José Antonio Kast est un véritable grain de sable dans la machine transformatrice du pays. La surprise est de taille, comment un pays a-t-il pu voter si massivement en faveur d’un changement profond de ses institutions et donner autant d’importance à un candidat qui rejette l’Assemblée qui formule ces évolutions ? Le résultat élevé de l’extrême droite s’explique d’abord et surtout par l’érosion au fil des semaines de la candidature de Sebastian Sichel. Ce dernier, soutenu par les partis du gouvernement actuel, s’est effondré dans les sondages ces dernières semaines. Les électeurs de droite voient dans le candidat Kast une valeur sûre pour défendre leurs intérêts économiques et leur vision conservatrice de la société.

Ces résultats électoraux montrent avant tout un rejet des forces politiques traditionnelles qui ont gouverné ces 35 dernières années. Les deux candidats qualifiés au second tour incarnent deux visions opposées du Chili. L’un est issu des mouvements sociaux avec un programme ancré à gauche, l’autre est un fervent défenseur de la dictature Pinochet qui construit son discours sur le retour de l’ordre et le rejet de l’immigration.

L’échiquier politique se retrouve plus polarisé que jamais. La gauche a retrouvé une flamme dans la rue au détriment des sociaux-démocrates et revendique des changements politiques, sociaux et économiques plus radicaux. La droite conservatrice, nostalgique du pinochétisme, trouve dans José Antonio Kast l’opportunité d’une revanche contre la constituante et une alternative contre une droite qui a concédé ce péché originel. Inspiré par une victoire à la Bolsonaro, envers et contre tous, l’héritier autoproclamé de Pinochet se veut le sauveur et le restaurateur d’un système autoritaire.

Pourtant la crise sanitaire ne fait qu’accentuer le malaise social qui a poussé la population dans les rues et qui parvint à obtenir cette lourde concession de la droite : une nouvelle constitution en 2022. Depuis, la pauvreté et les inégalités n’ont cessé d’augmenter partout dans le pays. Seul un déblocage politique et institutionnel pourra résolument transformer la société chilienne. De ces bouleversements politiques émergeront des réformes économiques ambitieuses à même de répondre aux revendications de 2019.

C’est pourquoi le candidat de gauche apparaît comme étant celui le mieux à même de créer les conditions nécessaires d’un processus de changement dans le pays andin. Le prochain président devra faire face à de nombreux défis et notamment reconstruire la confiance brisée pendant 4 ans de gouvernement du milliardaire Piñera, où les droits humains ont été terriblement bafoués. Pour y parvenir, Gabriel Boric va devoir élargir et négocier des accords d’appareil avec les autres forces de gauche. Mais il devra aussi et surtout aller capter les voix du candidat surprise Franco Parisi, sans décevoir son propre électorat. Parisi catalogué de centriste et libéral est arrivé en troisième place de ce premier tour avec près de 13 %. Tout doit être fait pour freiner l’extrême droite et donner une stabilité politique au pays.

Cette fois-ci, il ne s’agit pas seulement de changer de président, il s’agit d’un tournant historique, il s’agit d’embrasser un autre destin, il s’agit d’éviter l’innommable.

Pierre Lebret, politologue, expert du Chili et de l’Amérique latine

Christophe Bieber, historien, expert de l’Amérique latine

Florian Lafarge, ancien conseiller du porte-parole du gouvernement français (2012-2017)


25 novembre, 2021

CHILI : LA RÉACTION BOURGEOISE RELÈVE LA TÊTE

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PHOTO AFP

À la suite du mouvement social massif de 2019, le Chili a élu une Assemblée constituante chargée de mettre fin à la loi fondamentale imposée par Pinochet, écrite sous la dictée des « Chicago Boys », ces économistes ultralibéraux qui ont alors gravé dans le marbre le dogme interdisant toute politique sociale de l’État. 
- Ñ - ELECTION PRÉSIDENTIELLE AU CHILI 
PROPAGANDE ÉLECTORALE
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mais le premier tour de l’élection présidentielle du 21 novembre a vu arriver en tête José Antonio Kast (28 %), nostalgique de la dictature militaire et multimillionnaire, frère d’un ministre de Pinochet et fils d’un officier de la Wehrmacht arrivé au Chili après 1945. Il affrontera au second tour, le 19 décembre, Gabriel Boric (25 %), candidat d’une large coalition de gauche, ancien leader du mouvement étudiant de 2011 et défenseur de la Constituante, pour l’institution de vrais services sociaux d’État. -Espérons que le Chili n’élise pas le « Bolsonaro de Santiago »…
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24 novembre, 2021

ÉLECTIONS CHILIENNES : LE PEUPLE A-T-IL VRAIMENT GAGNÉ ?

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TABLEAU DES RÉSULTATS DE
L'ÉLECTION PRÉSIDENTIELLE

Ceux qui sont allés voter dimanche l'ont fait avec la conviction qu'il leur faudrait retourner aux urnes pour départager les deux candidats ayant obtenu le plus grand nombre de voix. Les sondages, et non les manifestations populaires, avaient décidé des noms susceptibles d'aller au prochain scrutin et la presse et l'opinion publique se sont contentées de ces prédictions qui, on le sait, ne sont pas très exactes au Chili. Pratiquement dès le début de cette courte compétition, certains candidats ont été tenus pour acquis et ceux qui étaient considérés comme ayant très peu de chance ont été relégués au second plan.

par Juan Pablo Cárdenas 

JUAN PABLO CÁRDENAS 

Les citoyens ont appris presque à la dernière minute que les candidats avaient des programmes gouvernementaux et ce ne sont certainement pas ces propositions qui ont motivé les électeurs. C'était une campagne centrée sur les noms plutôt que sur les partis ou les idéologies. Les candidats n'ont pas non plus suscité la ferveur populaire d'autres concours dans le passé, à tel point que beaucoup ont dit qu'ils devraient voter pour celui qui avait l'air le moins mauvais. Ceci s'explique pleinement par l'énorme discrédit de la politique et le manque de crédibilité de ses partis et caudillos.

PHOTO CRISTOBAL OLIVARES

Ainsi, les taux d'abstention (52 %) sont encore une fois élevés pour un pays qui se targue de la démocratie et du grand civisme de sa population, ce qui laisse penser, dans tous les cas, que le prochain président n'obtiendra pas le soutien effectif de plus de 25 ou 30 pour cent des Chiliens ayant le droit de vote. Nous aurons un gouvernement minoritaire, avec un parlement qui ne lui sera pas très docile, et avec une énorme quantité d'attentes sociales qui raviveront très probablement la contestation sociale. Avec le facteur aggravant que la pandémie n'est pas du tout sous contrôle, que les caisses fiscales ne suffisent tout simplement pas à résoudre toutes les demandes encore en suspens, et avec un pouvoir législatif qui aura du mal à accepter tout ce que propose l'exécutif.

- Ñ - ELECTION PRÉSIDENTIELLE AU CHILI 
PROPAGANDE ÉLECTORALE 
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Tous les candidats ont été prévenus que s'ils gagnaient, ils auraient du mal à gouverner. De même qu'il leur serait trop difficile de gérer les conflits dans diverses parties du pays, notamment en Araucanie. Que le phénomène de violence et de délinquance qui sévit réellement dans le pays pourrait difficilement être atténué sans la possibilité de faire des progrès effectifs en matière de justice sociale et d'équité, notions qui de bouche à bouche se positionnent dans tous les discours de l'extrême droite à l'extrême gauche. Sans résolution, dans l'urgence, d'améliorer drastiquement les revenus des travailleurs et des familles. Sans que les nouvelles autorités se résolvent à mettre fin aux AFP abusives, d'élever drastiquement le plancher des retraites et d'arrêter la santé d'être l'affaire lucrative des isapres afin de garantir les soins médicaux et hospitaliers pour toute la nation. Autrement dit, ce qui a été promis partout depuis trois décennies, sans aucun progrès et avec la circonstance aggravante que, pour atténuer la crise, il faudrait puiser dans les maigres fonds des futurs retraités, rendant leurs attentes de une retraite digne encore plus incertaine.

À une exception près, aucun candidat n'a promis de revoir sérieusement les dépenses de défense, ce qui donne lieu à des inégalités flagrantes entre le personnel en uniforme et le personnel civil. Il n'était même pas question de réduire les achats d'armes, tout comme les innombrables cas de corruption parmi les officiers et la police étaient peu évoqués. Il n'y avait pas non plus de promesse cette fois d'abolir la TVA sur les livres, une exigence de longue date qui a été bafouée par tous les gouvernements. Ainsi, le débat sur le destin du pays semblait parfois se limiter à la possibilité d'adopter une nouvelle loi sur l'avortement plus permissive, à donner plus de reconnaissance juridique aux relations homosexuelles et à d'autres questions qui, bien qu'importantes,

On disait que le pays était très polarisé, qu'on risquait de choisir entre un national-socialiste et un marxiste-léniniste, dans la mesure où les candidats centristes n'avaient pas beaucoup réussi à se montrer modérés et à convaincre les Chiliens encore choqués par la dictature de Pinochet et par ce qu'on leur a dit des horreurs au Venezuela, au Nicaragua et à Cuba. Pour qui la presse, accro au système, ment et exagère à travers ses analystes ignorants et mal informés, ainsi que les présentateurs de télévision eux-mêmes.

Ce qui est sûr, c'est qu'au-delà de leurs « banalités » et de leurs propositions précises et démagogiques, tous les candidats, à une exception connue près, ont rendu des visites ad limina aux grands hommes d'affaires et, au-delà des caméras, ont même eu avec eux des entretiens bilatéraux suspects qui n'étaient pas remarqué par la presse. Certains sont allés s'agenouiller devant les hommes d'affaires et d'autres dans l'espoir de les sensibiliser aux urgences sociales du pays, surtout pour obtenir des ressources pour financer leurs campagnes. On ne parlait pas d'expropriation ni de les taxer avec les justes impôts qui deviennent maintenant impératifs. Et on ne leur a reproché que du bout des lèvres leurs nouveaux actes de collusion et d'évasion ou d'évasion fiscale. Ils sont encore moins appelés à renforcer le syndicalisme.

Il y a même eu des candidats qui jadis se sont prononcés contre la règle du marché qui cette fois sont restés dans un silence sacro-saint et, dans les heures qui ont précédé les élections, le gouvernement a décidé d'annuler un appel d'offres remporté par un groupe chinois et allemand pour faire notre cartes d'identité et passeports. Rien de plus que de faire plaisir aux États-Unis, une puissance qui s'est certainement énervée et dont on redoutait des représailles face à un acte souverain chilien. Tout cela malgré le fait que la nation asiatique est notre principal partenaire commercial.

À ce qui précède, ajoutons que même l'expression « néolibéralisme » a disparu des discours et des débats présidentiels, à l'exception d'un candidat qui a osé tout dire, sachant qu'il n'avait aucune chance d'atteindre La Moneda.

Il y aura désormais un second tour au cours duquel les craintes seront exacerbées, les disqualifications augmenteront et les candidats -Kast et Boric- mettront tout en œuvre pour gagner le soutien des perdants, qui réunis ont obtenu plus de voix que chacun de leurs adversaires au second tour. tour. On nous parlera du danger que représente la victoire de l'adversaire et on nous ramènera à l'époque de Pinochet et de la guerre froide, lorsque la grande majorité des électeurs n'a pas vécu cette époque et n'a dans certains cas que des connaissances par ouï-dire de ce qui s'est passé il y a tant de décennies.

Cependant, il est hautement improbable que le nouveau président puisse vraiment inaugurer une « nouvelle ère » comme promis et, à l'exception des fluctuations habituelles des cours boursiers et du dollar, tout indique que le pays continuera d'être gouverné par la classe politique, avec le marché sacro-saint restant notre souverain. Avec le soutien des souverains et de la caste militaire ou de la garde prétorienne. Mais désormais, un processus de négociations va être imposé par l'élite, qui pourrait anéantir du coude une partie des bonnes intentions.

Ce qui se passera dans la Convention constitutive est une autre affaire, si l'on veut avoir la certitude qu'elle pourra continuer à exercer librement face à un gouvernement et un parlement nouveaux et habilités, malgré sa représentativité limitée. Après une élection qui, comme d'habitude, a été très déterminée par la propagande électorale, le parti pris des médias puissants et, il faut le dire, un pays très peu motivé par une démocratie qui ne résout pas ses problèmes. Plus inégalitaire, certes, d'un gouvernement à l'autre. De plus en plus convaincus chaque jour que c'est la rue et non le vote qui peut ouvrir ses larges avenues.

C'est pourquoi l'énorme majorité obtenue par la candidate indépendante Fabiola Campillay, l'une des plus sévères victimes de la répression de Piñera, est si encourageante.

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PRÉSIDENTIELLE AU CHILI : JOSÉ ANTONIO KAST, OU LA RÉSISTIBLE ASCENSION D'UN NOSTALGIQUE DE PINOCHET

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L'HUMANITÉ

Au terme d’une campagne propre à exciter toutes les peurs, le candidat d’extrême droite est arrivé, dimanche, en tête du premier tour de l’élection présidentielle, devant le candidat de gauche Gabriel Boric.

Santiago du Chili, envoyée spéciale.

par Rosa Moussaoui

PHOTO REVUE BALLAST

Il a surgi de l’ombre voilà tout juste un mois, attirant à lui tous les micros, hantant tous les écrans, caracolant d’un coup d’un seul en tête de tous les sondages. Au terme d’une campagne rythmée par les provocations et les mensonges, axée sur l’ordre et la sécurité, propre à exciter toutes les peurs, un nostalgique de la dictature d’Augusto Pinochet est arrivé, dimanche, en tête du premier tour de l’élection présidentielle au Chili. José Antonio Kast, 55 ans, obtient 27,91 % des voix, devant le candidat de gauche Gabriel Boric (25,83 %), un ancien leader étudiant qui portait les couleurs de la coalition Apruebo Dignidad réunissant, entre autres, le Frente Amplio et le Parti communiste chilien. Fait surprenant, la troisième place revient, avec 12,80 % des suffrages, à Franco Parisi, un ultralibéral au discours antipolitique, prompt à vitupérer les élites, qui a mené campagne sur les réseaux sociaux depuis les États-Unis, sans mettre un pied au Chili en raison de ses démêlés judiciaires pour non-versement de pensions alimentaires. Celui-ci pourrait offrir à Kast, au second tour, une réserve de voix inespérée.

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Suivent au coude-à-coude la candidate de la Démocratie chrétienne soutenue par le Parti socialiste, Yasna Provoste (11,61 %) et, à droite, Sebastian Sichel (12,79 %), qui a traîné comme un boulet l’impopularité du président sortant, Sebastian Piñera, empêtré dans des scandales de corruption et d’évasion fiscale, et dont l’effondrement a contribué de façon décisive à l’ascension du candidat d’extrême droite. À rebours d’une campagne lisse et polie, pour laquelle il a joué la carte de la modération, ce dernier, dimanche soir, s’est immédiatement dit « prêt à discuter » avec Kast, en dépit de ses « différences ». « José Antonio Kast représente un esprit totalitaire et fasciste. Nous ne pouvons pas tolérer le fascisme », a au contraire mis en garde Provoste.

« Copie conforme de Bolsonaro »

LES INNOMMABLES 

À gauche, le progressiste Marco Enriquez-Ominami et le candidat d’extrême gauche Eduardo Artés totalisent 9 %. Sur le papier, les additions donnent la victoire au deuxième tour, le 19 décembre, à l’option néofasciste… « Kast est une copie conforme de Bolsonaro, un ami personnel qui partage son admiration pour Pinochet et son legs néolibéral. »

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