[ Cliquez sur l'image pour l'agrandir ]
|
CAMILA VALLEJO (GAUCHE) ET KAROL CARIOLA (DROITE)
PENDANT UNE MANIFESTATION À VALPARAISO LE 8 MAI 2014.
PHOTO/REUTERS/ELISEO FERNANDEZ |
Un projet de loi visant à réduire le temps de travail hebdomadaire de 45 à 40 heures est actuellement en débat dans le pays. Le gouvernement est opposé à ce projet présenté par l’opposition.
Travailler moins pour gagner autant. Voilà le cœur du projet de loi porté par Karol Cariola et Camila Vallejo, deux députées communistes chiliennes qui s’étaient déjà faites connaître lors des manifestations étudiantes de 2011.
Déposé en 2017, le projet de loi propose une réduction du temps de travail qui – selon ses initiateurs – “entraînera une augmentation évidente de la qualité de vie des travailleurs chiliens”.
Le 3 septembre 2019, la commission affectée à la question du travail de la chambre des députés s’est saisie de deux des trois articles du projet, et a “approuvé par sept voix contre six les deux premiers articles sur les trois prévus dans le projet”, relate El Desconcierto.
La procédure va désormais suivre son cours vers la chambre des députés. Si ce projet de loi était approuvé par les députés, “cela modifierait l’article 22 du Code du travail qui prévoit actuellement une semaine de travail de 45 heures”, la réduisant à quarante heures “sans porter préjudice au salaire des travailleurs”, explique Teletrece, une chaîne de télévision chilienne.
Un pays qui travaille (beaucoup)
Selon l’Organisation de coopération et de développement économique (OCDE), le Chili est l’un des pays où le salaire perçu est le plus faible au regard du temps de travail.
Dans ce contexte, les pays de l’OCDE affichant une forte productivité et des horaires de travail réduits – tels que la Hollande, le Danemark, l’Allemagne, la Suisse et la Suède avec respectivement 29, 33, 35, 35 et 36 heures – sont pris en exemple par les porteurs de ce projet.
En 2016, le nombre moyen d’heures effectué par les salariés chiliens était de 1988, ce qui équivaut à 249 jours par an sur le lieu de travail, “soit 28 jours de plus que la moyenne des pays étudiés par l’organisation”, rappelle le quotidien en ligne El Mostrador.
De surcroît, “la moitié des travailleurs perçoivent un salaire inférieur ou égal à 400 000 pesos par mois (508 euros)”, selon une enquête sur le revenu publiée par l’Instituto Nacional de Estadísticas (INE).
Réforme anticonstitutionnelle ?
Le président chilien Sebastián Piñera est quant à lui fermement opposé à la mesure. Il a réaffirmé que “son gouvernement va combattre le projet de loi qui réduit le temps de travail hebdomadaire à 40 heures”, rapporte Cooperativa, une radio chilienne.
Le président, ainsi que le ministre du Travail Nicolás Monckeberg, cités par El Mostrador, dénoncent “l’inconstitutionnalité” de la loi, et entendent saisir le Conseil constitutionnel, arguant que :
« Ce projet n’est pas constitutionnel. Tout ce qui a trait à la dépense publique est une prérogative du président, les parlementaires ne peuvent pas créer de dépenses publiques, imaginez s’ils pouvaient le faire, quel serait le désordre fiscal que nous aurions au Chili. »
Contre-proposition
Alors que l’opinion publique se déclare à 70 % favorable à la réduction du temps de travail, le gouvernement a de son côté lancé une contre-proposition consistant à fixer la barre à 41 heures hebdomadaires, “mais progressivement, d’ici 2027 et avec plus de flexibilité”.
Selon les observateurs, compte-tenu de la fragmentation du Parlement, où le gouvernement ne dispose pas de la majorité, l’opposition chilienne, largement favorable à l’idée d’une réduction du temps de travail à 40 heures, pourrait bien valider cette réforme. Il ne resterait alors à Sebastián Piñera qu’à engager un recours devant le tribunal constitutionnel.
Nathan HALLEGOT