27 juillet, 2023

ASSASSINAT DU COMMANDANT ARTURO ARAYA PEETERS

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ARTURO ARAYA
 PEETERS
1973 - 27 JUILLET- 2023
CINQUANTIÈME ANNIVERSAIRE DE L'ASSASSINAT
 DU COMMANDANT ARTURO ARAYA PEETERS 
LE PRÉSIDENT SALVADOR ALLENDE ET 
SON AIDE DE CAMP DE LA MARINE  LE  
COMMANDANT ARTURO ARAYA PEETERS
Le Capitaine de vaisseau Arturo Araya Peeters, fut un marin chilien, aide de camp de la marine du président Salvador Allende. Assassiné chez lui de plusieurs coups de feu, le 27 juillet 1973, par des membres du groupe d'extrême droite «  Patria y Libertad » (Patrie et de Liberté).

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 COMMANDANT ARTURO ARAYA PEETERS, 
AIDE DE CAMP DU PRÉSIDENT ALLENDE 



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26 juillet, 2023

UNE MULTINATIONALE CONTRE SALVADOR ALLENDE

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 « BOYS » (GARÇONS), 2022 © CARLOS AMPUERO

Il y a presque cinquante ans, le 11 septembre 1973, un coup d’État militaire appuyé par les États-Unis mettait fin à l’expérience socialiste au Chili — et à la vie du président Salvador Allende. Au cours de cette période, un géant américain des télécommunications, ITT, a joué un rôle trouble dans la déstabilisation du gouvernement. Et pavé la voie aux mastodontes actuels de la Silicon Valley… [ I.T.T. : AU-DESSUS DES LOIS ET DES ÉTATS ]
« UNE MULTINATIONALE CONTRE SALVADOR ALLENDE »  
COUPURE DE PRESSE DU «  LE MONDE DIPLOMATIQUE  » AOÛT  2023.

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LE MONDE DIPLOMATIQUE - AUDIO 
par Evgeny Morozov • Lu par Thibaud Delavigne 
« UNE MULTINATIONALE CONTRE SALVADOR ALLENDE »

par Evgeny Morozov

EVGUENI MOROZOV 
PHOTO THE SYLLABUS


Deux semaines après l’élimination de Salvador Allende et de la démocratie chilienne par le coup d’État sanglant d’Augusto Pinochet, le New York Times reçut tard dans la nuit un appel anonyme. « Notez, recommanda la voix au téléphone, car je ne répéterai pas. » En cette fin septembre 1973, quelque chose d’inouï était sur le point de survenir. « Dans quinze minutes, une bombe explosera dans l’immeuble d’International Telephone & Telegraph. » La cible, connue sous son sigle ITT, n’était pas choisie au hasard : « C’est en représailles des crimes commis par ITT contre le Chili (1).  »

ILLUSTRATION  'THE SANTIAGO BOYS'

► À lire aussi  :   'THE SANTIAGO BOYS' : HISTOIRE DE L'UTOPIE TECHNOLOGIQUE D'ALLENDE

À l’époque, ce géant de la technologie devenu un conglomérat tentaculaire compte au nombre des plus grandes multinationales de la planète. À son illustre conseil d’administration siègent un ancien directeur de l’Agence centrale de renseignement américaine (CIA) et un ex-président de la Banque mondiale — un casting idéal pour propulser l’un des plus gros contractants de l’armée américaine parmi les principaux profiteurs de la guerre du Vietnam. La compagnie affiche fièrement sa position au sein du complexe militaro-industriel. « Pour voir dans l’obscurité, voyez ITT. La nuit a cessé d’appartenir à la guérilla », proclame une publicité pour ses appareils de vision nocturne diffusée en 1967, l’année même où Ernesto « Che » Guevara est assassiné en Bolivie. La compagnie fait l’objet d’appels au boycott, comme celui dirigé contre le pain industriel produit par une filiale du groupe. « Achetez du pain, achetez des bombes : ITT au Vietnam », titre alors un journal de gauche. La redéfinition du sigle en Imperialism, Treason and Terror (« impérialisme, trahison, terreur ») se répand dans les milieux militants. Mais de là à déposer une bombe en plein Manhattan…

PHOTO WALLY GOBETZ CHEZ FLICKR

► À lire aussi  :    LES DIRIGEANTS DE L'I.T.T. AVAIENT PRÉPARÉ EN 1970 UN PLAN D'INTERVENTION CONTRE M. ALLENDE EN ACCORD AVEC LA CIA / ARCHIVES

DESSIN DE JOSÉ PALOMO DIT
ZARATUSTRA
DANS PUNTO FINAL

L’engin explose finalement à 5 heures 40 du matin au 437 de l’avenue Madison, siège de la branche latino-américaine d’ITT. C’est la troisième attaque perpétrée contre la multinationale en moins de deux semaines, après Rome et Zurich. Et la série ne fait que commencer…

À la différence du techlash actuel — terme à la mode pour décrire l’hostilité que provoque la Silicon Valley —, les actions menées contre ITT en 1973 occasionnent plus de dégâts que des tweets indignés. Pour ses détracteurs, le groupe incarne non seulement le capitalisme multinational mais également une puissance autonome, dotée de sa propre politique étrangère, de son propre service d’espionnage et même de son propre personnel politique, un attelage d’anciens militaires, de barbouzes, de diplomates et de journalistes lauréats du prix Pulitzer reconvertis en chargés de relations publiques. ITT semble détenir toutes les prérogatives d’une puissance étatique. D’où le titre du livre paru à son sujet en 1973 : L’État souverain (2).

Un jeune avocat nommé Fidel Castro

Les accusations de techno-féodalisme qui pleuvent aujourd’hui sur les géants de la Silicon Valley (3) — dépeints comme des seigneurs médiévaux qui décident du sort de leurs usagers — réactualisent en réalité des griefs vieux d’un demi-siècle : même un ouvrage à la gloire d’ITT, paru au début des années 1980 (4), convoquait l’imagerie seigneuriale en invitant ses lecteurs — dès la première page ! — à remonter jusqu’à « l’Europe médiévale des années 1200 » pour inscrire les opérations de la multinationale dans un « contexte féodal ». La comparaison n’est certes pas infondée. Mais elle souffre d’une erreur d’analyse majeure : tous les États ne se ressemblent pas. Et tous n’entretiennent pas les mêmes relations avec les géants de la technologie. Or il suffit d’examiner l’histoire d’ITT pour comprendre que la métamorphose d’un humble opérateur de lignes téléphoniques en mastodonte planétaire fut la conséquence directe de la domination militaire, financière et technologique exercée par un seul et même pays : jamais ITT — ni la Silicon Valley — n’aurait bénéficié d’une croissance aussi phénoménale sans le soutien inconditionnel des États-Unis.

Les frères Hernán et Sosthenes Behn fondent ITT en 1920 à New York. À l’origine, l’entreprise leur sert de devanture pour gérer les installations téléphoniques qu’ils détiennent à Porto Rico et à Cuba. Nés à Saint-Thomas, dans les actuelles îles Vierges britanniques, les deux frères connaissent bien les Caraïbes et s’emploient à y attirer les capitaux américains. Les Behn possèdent une petite fortune familiale mais surtout une ambition dévorante. Avant de s’installer à Porto Rico, Sosthenes a travaillé quelques années à Wall Street, où il a noué avec JP Morgan et ce qui deviendrait plus tard la Citibank des liens qui s’avèrent fructueux.

Au cours des années 1920, ITT se propage au Mexique, en Uruguay, au Brésil, au Chili, en Argentine et en Espagne. En 1929, elle contrôle les deux tiers des téléphones et la moitié des câbles en Amérique latine (5). Cette extension fulgurante repose sur l’endettement obtenu grâce aux connexions des Behn avec Wall Street. Elle coïncide avec l’effort des États-Unis, alors en pleine ascension comme puissance planétaire, pour évincer les intérêts britanniques d’Amérique latine. Comme le reconnaît l’ancien ministre de la guerre Elihu Root devant un comité du Congrès en 1921 : « Il y a une lutte à mort pour le contrôle des communications sud-américaines. » Sans surprise, les États-Unis la remportent, avec l’aide d’ITT. Selon un compte rendu fascinant publié en 1930, la compagnie des frères Behn « a fait davantage en neuf ans pour briser le monopole britannique sur les communications mondiales que tous les autres groupes et gouvernements réunis durant un demi-siècle (6)  ». Ceux qui, plus tard, interpréteront le « i » d’ITT comme l’initiale d’« impérialisme » n’auront pas totalement tort.

Dans l’ensemble, la guerre de conquête se déroula sans accroc. Pour s’attirer les faveurs de Washington, de nombreux pays sud-américains déroulèrent le tapis rouge à ITT, l’exemptant même des engagements coûteux généralement demandés aux opérateurs étrangers : investir dans les infrastructures ou éviter toute hausse unilatérale des tarifs. C’est seulement durant la seconde guerre mondiale que les liens entre ITT et Washington commencent à inquiéter certains gouvernements.

Le premier souci concerne la sécurité des communications. L’autre tient à la montée du nationalisme économique. Ses représentants les plus fervents, comme Juan Perón en Argentine ou Francisco Franco en Espagne, congédient ITT, non sans lui verser un dédommagement confortable.

Devenue entre-temps un fournisseur important de la défense américaine, la multinationale sait que ses jours comme opérateur de lignes téléphoniques sont comptés. Mais elle entend bien céder ses actifs au meilleur prix. En attendant une offre intéressante, ITT presse la poule aux œufs d’or, fait grimper ses tarifs et bloque les investissements. De sorte que le service devient à la fois plus médiocre et plus coûteux. Les populations locales enragent, mais ITT paraît intouchable. Qui oserait nationaliser une entreprise américaine aussi puissante ?

Un homme a cette audace. Au début des années 1950, un jeune avocat cubain traîne le groupe devant un tribunal, l’accusant d’avoir trahi ses engagements. Son cabinet gagne le procès, mais le dictateur qui tient alors les rênes de Cuba, Fulgencio Batista, ignore le jugement du tribunal. Le jeune avocat s’appelle Fidel Castro. Il n’oubliera jamais cette humiliation : la filiale cubaine d’ITT sera l’une des premières sociétés étrangères nationalisées au lendemain de la révolution castriste de 1959. Le geste sonnera comme une gifle pour ITT — et comme un présage.

Lorsqu’en 1962 le gouverneur d’un État brésilien prend le contrôle d’une de ses filiales locales, la compagnie mobilise ses liens avec Washington contre ce qu’elle présente comme un épisode de la guerre froide — un thème qui refera surface deux ans plus tard à la faveur du coup d’État militaire. Sa campagne de lobbying se révèle fructueuse, puisque le Brésil souffre l’humiliation de devoir payer une compensation exorbitante pour la filiale nationalisée.

À la fin des années 1960, l’empire ITT réinvestit les énormes profits tirés de la revente de ses biens en Amérique latine dans des acquisitions de toutes sortes — compagnies d’assurances, hôtels, et même une société de location de voitures. La plupart sont domiciliées sur place et ne courent aucun risque de nationalisation. Au tournant de 1970, les seuls réseaux téléphoniques encore aux mains d’ITT se situent à Porto Rico, base arrière historique de la compagnie, ainsi qu’au Chili, où elle s’était installée en 1927.

Les engagements d’ITT auprès de l’État chilien brillent par leur imprécision, en vertu d’un contrat exceptionnellement avantageux pour la compagnie (7). Dans les années 1960, le gouvernement d’Eduardo Frei, un chrétien-démocrate élu en 1964, tente de régler le problème sans faire de vagues, grâce à un plan prévoyant de racheter petit à petit les parts de la filiale locale d’ITT. Mais, pour les opposants de Frei, c’est à la fois trop peu et trop. Le socialiste Allende remporte l’élection présidentielle de 1970 en promettant de nationaliser ITT, d’y remplacer les managers par des ingénieurs et d’étendre le réseau téléphonique dans les zones les plus pauvres du pays.

ITT craignait une présidence Allende bien avant 1970. Six ans plus tôt, déjà, l’un des membres de son conseil d’administration, l’ex-directeur de la CIA John McCone, avait pesé de tout son poids pour empêcher l’élection du socialiste chilien. Quelques mois avant le scrutin de 1970, ITT se met en relation avec la CIA et lui propose de l’argent pour faire obstacle à une possible victoire de la gauche. La CIA refuse, n’étant jamais à court de liquidités, ce qui ne décourage pas la compagnie d’arroser copieusement les opposants d’Allende.

Après la victoire-surprise de ce dernier, c’est la CIA qui prend langue avec ITT. La compagnie ne pourrait-elle pas mettre l’État chilien sous pression, en refusant par exemple de fournir des pièces détachées ou du personnel de maintenance ? L’objectif de l’Agence consistait, selon les mots de Richard Nixon, à « faire crier l’économie chilienne » pour inciter les militaires à sortir de leurs casernes avant même qu’Allende ait le temps d’inaugurer son mandat.

Entre espionnage et finance

Cette stratégie tourne court. Une fois au pouvoir, Allende préfère négocier avec la compagnie plutôt que de la nationaliser sur-le-champ, alors que sa base — dont les syndicats de travailleurs d’ITT — réclame des mesures plus radicales. Comble de l’ingénuité, il demande même à l’entreprise de détecter d’éventuels micros au palais présidentiel… En septembre 1971, Allende se ravise et prend le contrôle de la filiale chilienne d’ITT, dont les dirigeants sont arrêtés pour avoir siphonné des profits indus via des sociétés fictives. En retour, la multinationale lance une virulente campagne à Washington. Ayant ses entrées chez le secrétaire d’État Henry Kissinger, elle lui suggère dix-huit mesures à prendre pour déstabiliser le président chilien dans un délai de six mois. Et continue par ailleurs d’encourager la CIA à financer El Mercurio, le principal journal de l’opposition.

Au sein même de la compagnie, certains commencent à s’interroger. La presse publie des communications entre sa direction et des membres de l’administration Nixon, poussant le Sénat à mener des auditions pour clarifier l’influence d’ITT sur la politique étrangère américaine (8). Mais l’enquête ne parvient pas à mettre en cause les responsables et nul n’est condamné. Trois mois après, Allende perd la vie dans le coup d’État de Pinochet.

Pour ITT, la nationalisation ne fut pas un choc trop rude : peu de temps après le coup d’État, la compagnie reçut 125 millions de dollars de Pinochet en guise d’indemnités, ainsi que 30 millions de la part de l’administration Nixon. En dépit — ou, peut-être, en raison — du rapport non concluant du Sénat américain, les soupçons au sujet du rôle d’ITT au Chili ne cessèrent de croître. Il n’était donc pas illogique que la multinationale représentât une cible toute trouvée pour de nombreux militants. L’inconnu qui avertit le New York Times de la présence d’une bombe au siège d’ITT se revendiquait du Weather Underground, une organisation clandestine d’extrême gauche. Au bout du compte, cette publicité négative indisposa même Porto Rico, foyer historique de la compagnie : en 1974, le territoire décida de racheter la filiale. La compensation massive qui lui fut accordée ne calma pas les esprits : son siège sauta quelques mois après la transaction.

Au cours de la majeure partie de son existence, ITT fut le laboratoire d’un modèle d’expansion appelé à faire école, fondé sur les liens avec Wall Street et le Pentagone. Elle fut également pionnière de la mondialisation avec sa vision d’emblée globale et sa maîtrise du conglomérat — même si les synergies entre les filiales les plus hétéroclites relevaient surtout d’astuces comptables. De plus en plus obsédés par les profits à court terme et le cours des actions, ses dirigeants négligèrent les investissements à long terme dans ses services-clés. Là encore, elle fut en avance sur son temps : la plupart des autres compagnies américaines ne succomberaient à pareille tentation qu’à partir des années 1980. ITT, elle, embrassa la financiarisation dès le milieu des années 1960. À l’époque, il pouvait paraître étonnant qu’un manutentionnaire du téléphone travaillant pour la défense préférât racheter des compagnies d’assurances plutôt que d’investir dans la recherche et le développement. Encouragés par leurs amis de la banque Lazard, ses dirigeants réussirent à convaincre Wall Street que leur gloutonnerie s’inscrivait dans une ingénieuse stratégie de diversification.

Mais son désir de croissance exponentielle marqua également le début de la fin : elle ne vit pas l’intérêt des recherches longues et coûteuses qui commençaient à fleurir dans la Silicon Valley. Le coup d’État au Chili abîma son image de manière irréversible pour les décennies à venir. Paradoxalement, la proximité d’ITT avec l’État américain et Wall Street — à laquelle elle dut sa prodigieuse croissance initiale — causa son déclin. De cette erreur, les actuels géants de la Silicon Valley, pareillement pris en étau entre espionnage et finance, ne paraissent pas avoir tiré toutes les leçons.

Evgeny Morozov


Auteur de The Santiago Boys, une série de podcasts en neuf épisodes basée sur plus de deux cents entretiens, produite par Chora Media et Post-Utopia, et dont s’inspire cet article.

(Traduit de l’anglais par Olivier Cyran.)

Notes  :

(1) Paul L. Montgomery, « ITT office here damaged by bomb », The New York Times, 29 septembre 1973.

(2) Anthony Sampson, The Sovereign State. The Secret History of ITT, Hodder and Stoughton, Londres, 1973.

(3) Cf. « Critique of techno-feudal reason », New Left Review, n° 133-134, Londres, janvier-avril 2022.

(4) Robert Sobel, ITT : The Management of Opportunity, Times Books, New York, 1982.

(5) Daniel R. Headrick, The Invisible Weapon. Telecommunications and International Politics. 1851-1945, Oxford University Press, 1991.

(6) Ludwell Denny, America Conquers Britain : A Record of Economic War, Alfred A. Knopf, New York, 1930.

(7) Cf. le chapitre consacré au Chili dans Eli M. Noam (sous la dir. de), Telecommunications in Latin America, Oxford University Press, 1998.

(8) Cf. les deux volumes du rapport sur les auditions conduites par le Sénat américain : « Multinational corporations and United States foreign policy », Government Printing Office, Washington, DC, 1974.

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par Evgeny Morozov • Lu par Thibaud Delavigne 
« UNE MULTINATIONALE CONTRE SALVADOR ALLENDE »


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LES DIRIGEANTS DE L'I.T.T. AVAIENT PRÉPARÉ EN 1970 UN PLAN D'INTERVENTION CONTRE M. ALLENDE EN ACCORD AVEC LA CIA

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PHOTO WALLY GOBETZ CHEZ FLICKR

ARCHIVES / Les dirigeants de l'I.T.T. avaient préparé en 1970 un plan d'intervention contre M. Allende en accord avec la CIA / Publié le 23 mars 1973  / Washington. - La société I.T.T. (International Telephone and Telegraph) a offert en 1970 la somme de 1 million de dollars aux services secrets américains (Central Intelligence Agency, C.I.A.) pour financer un plan destiné à empêcher M. Salvador Allende de devenir président de la République du Chili. Telle est la plus importante révélation - mais elle est de taille - qui ait été faite depuis le début de l'enquête publique menée depuis mardi par une sous-commission des affaires étrangères du Sénat. Présidée par le sénateur libéral Frank Church (démocrate, Idaho), cette sous - commission est notamment chargée d'étudier l'impact que peuvent avoir les sociétés multinationales sur la vie politique et économique des pays dans lesquels elles ont des intérêts.

 Par JACQUES AMALRIC.

Temps de Lecture 4 min. 

Dés la création de la sous-commission, il fut évident que les agissements de l'I.T.T. au Chili allaient particulièrement retenir l'attention du sénateur Church et de ses collègues. Les révélations du journaliste Jack Anderson, il y a un an, sur les manœuvres de l'I.T.T. au Chili jouèrent un rôle important dans la décision du Sénat d'analyser de plus prés le poids des sociétés multinationales.

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L'offre de 1 million de dollars à la C.I.A. a été révélée par M. John McCone, un expert, si l'on peut dire. M. McCone, qui est actuellement membre du conseil d'administration de l'I.T.T., est, en effet, un ancien directeur de la C.I.A. C'est John Kennedy qui l'avait nommé à ce poste en 1961, au lendemain du fiasco de la baie des Cochons. Il y resta jusqu'en 1965, date à laquelle Johnson le remplaça par M. Richard Helms, qui vient lui-même d'être remercié par M. Nixon.

Pour élire M. Frei

Selon M. McCone, c'est lui-même qui transmit la proposition de l'I.T.T. au gouvernement américain. M. McCone, qui travaillait déjà en 1970 pour l'I.T.T., affirme avoir agi sur ordre de M. Harold Geneen, le président du groupe. La proposition fut présentée d'abord à M. Henry Kissinger, puis à M. Richard Helms lui-même, un " très proche ami personnel ", a précisé M. McCone. Toujours selon l'ancien directeur de la C.I.A., M. Kissinger n'aurait manifesté aucun enthousiasme pour la proposition de l'I.T.T., et M. Helms aurait fini par lui faire savoir que le gouvernement américain " avait pris la décision de ne rien faire " pour empêcher l'arrivée de M. Allende au pouvoir.

Le plan de l'I.T.T. consistait, selon les documents étudiés par la sous-commission d'enquête, à favoriser par fous les moyens une coalition du parti national et du parti démocrate-chrétien, afin d'obtenir une nouvelle élection présidentielle, qui se serait jouée entre M. Allende et le leader démocrate-chrétien, M. Eduardo Frei. Mais ce plan échoua lorsque M. Alessandri décida de se retirer de la compétition.

Était-ce bien un plan purement I.T.T. ? On peut sérieusement en douter. Selon le témoignage d'un autre dirigeant de la société, il semble, en effet, que celle-ci et certains éléments de la C.I.A. aient travaillé au Chili, la main dans la main, dès le début de l'été 1970, c'est-à-dire avant l'élection présidentielle chilienne. C'est ainsi que M. William Merriam, vice-président de l'I.T.T. et son ancien chef du bureau de Washington, a reconnu avoir été en contact quasi permanent dès juillet 1970 avec un haut fonctionnaire de la C.I.A., M. William Broe, comme par hasard responsable à cette époque des activités clandestines de la C.I.A. en Amérique latine. Toujours selon le témoignage de M. Merriam, M. Broe aurait tenté à plusieurs reprises, après l'élection de M. Allende, de monter une campagne de pressions économiques contre le Chili, en battant le rappel des firmes américaines ayant des intérêts dans ce pays. Cette campagne, déclara M. Merriam, ne réussit pas, à la suite du manque d'enthousiasme d'entreprises comme General Motors, Ford et de plusieurs banques de Californie et de New-York. Toujours selon M. Merriam, M. Broe aurait beaucoup insisté pour que les dirigeants mènent également une campagne de pression à la Maison Blanche, ce qui se serait traduit par plusieurs rencontres entre M. Merriam et des hommes comme M. John Mitchell, alors secrétaire à la justice, et M. John Erlichmann, conseiller de M. Nixon pour les affaires intérieures.

L'enquête ne fait que commencer et elle apportera sans doute d'autres informations. Dès à présent, en tout cas, les choses se présentent mal pour l'I.T.T. comme pour la C.I.A. La note risque d'être particulièrement lourde pour la société multinationale : s'il est établi qu'elle s'est immiscée indûment dans les affaires intérieures chiliennes, elle pourrait se voir refuser par l'agence gouvernementale américaine garantissant les investissements à l'étranger la somme de 92,2 millions de dollars qu'elle réclame en compensation de la nationalisation de ses installations chiliennes : si, au contraire, l'I.T.T. réussit à prouver qu'elle a travaillé contre l'arrivée de M. Allende au pouvoir en accord avec une agence gouvernementale américaine (la C.I.A. en l'occurrence), elle peut espérer au contraire rentrer dans ses frais. Voilà pourquoi, sans doute, M. McCone a présenté l'offre de 1 million de dollars faite par l'I.T.T. comme s'inscrivant dans le droit fil de l'aide américaine accordée à la Grèce en 1947, du plan Marshall et du pont aérien de Berlin. " Le communisme international a affirmé à maintes reprises que son objectif était de détruire le monde libre, économiquement, militairement et politiquement. Voilà à quoi nous pensions. " Peut-être. Cela, en tout cas, n'explique pas pourquoi I.T.T. est en ce moment en pourparlers avec Moscou pour la construction d'une chaîne d'hôtels, de centraux téléphoniques et même pour l'ouverture de bureaux de location de voitures dans plusieurs villes soviétiques par la compagnie AVIS, qui est une de ses filiales.

 JACQUES AMALRIC

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INTERNATIONAL TELEPHONE AND TELEGRAPH CORPORATION - ITT -
CERTIFICAT D'ACTIONS

« État souverain   »  

ARCHIVES / L'I.T.T., " État souverain " / Publié le 13 septembre 1973 Alors que l'armée prenait le pouvoir à Santiago, les représentants de cinq compagnies multinationales témoignaient à New-York devant une commission d'enquête des Nations unies réunie à la demande de M. Wald-heim. L'enquête avait été décidée à la suite d'une plainte déposée par le Chili concernant les activités dans ce pays de l'International Telegraph and Telephone, la gigantesque I.T.T.

Le Monde

Temps de Lecture 3 min. 

Il paraît en effet difficile de séparer l'histoire contemporaine du Chili de celle de cette société, et même celle des Etats-Unis. C'est en septembre 1971 qu'a éclaté l'affaire. " Pour des raisons de sécurité nationale ", le président Allende annonce alors qu'il projette de nationaliser les intérêts locaux de l'I.T.T., évalués à 153 millions de dollars (les plus grands investissements américains au Chili après les investissements dans le cuivre). Peu de temps après, on apprend que l'I.T.T. aurait versé quelque 400 000 dol-lanrs pour financer la campagne de M. Nixon ; en contrepartie, le ministère de la justice appliquerait de façon fort flexible la législation anti-trust, sous le coup de laquelle pourrait tomber le géant.

En mars 1972, le journaliste Jack Anderson révèle que l'I.T.T. a projeté, avec l'aide de la C.I.A., de tout mettre en œuvre en 1970 pour empêcher l'arrivée au pouvoir de M. Allende. Il faudrait, dit un document secret, " plonger le Chili dans un véritable chaos économique " afin d'inciter des militaires amis à faire un putsch. M. John McCone, ancien directeur de la C.I.A. entré au service du trust, confirmera ensuite qu'il avait envisagé un tel plan avec de hauts responsables américains.

Le Sénat américain s'émeut : les documents publiés tant aux États-Unis qu'au Chili sont en effet accablants. Une commission d'enquête sénatoriale commence ses travaux en mars dernier. On apprend alors de la bouche de M. McCone que l'I.T.T. a offert en 1970 la somme de 1 milliard de dollars à divers services secrets américains pour financer le plan destiné à barrer la route à M. Allende ; des rencontres auraient eu lieu entre des représentants de la firme et de hautes personnalités américaines (on cite MM. Kissinger, Helms, Mit-chell, Erlichmann).

C'est un peu plus tard que l'I.T.T. fit intervenir - une autre enquête l'a révélé - plusieurs responsables afin d'éviter les rigueurs de la législation antitrust, et on cite les noms de MM. Agnew, Stans, Connally, etc. En avril, alors que M. Allende dénonce pour la première fois en public " la complicité des autorités américaines " dans les agissements de l'I.T.T., l'organisme para-gouvernemental américain Overseas Private Invest-ment Corporation rejette la demande de paiement d'assurance formulée par la compagnie à la suite de l'expropriation de sa filiale chilienne.

Les événements intervenus mardi au Chili constituent une victoire pour " l'I.T.T., Etat souverain ", pour reprendre la formule d'Anthony Sampson, auteur d'un ouvrage sur le trust (à paraître prochainement en France aux éditions Alain Moreau). Avec un chiffre d'affaires de 8,5 milliards de dollars, l'I.T.T. emploie quelque 428 000 personnes (dont environ 25 000 en France, dans vingt-cinq filiales), réparties dans mille sociétés œuvrant dans soixante-dix pays. Ce monstre, a révélé A. Sampson, a l'art de s'allier avec les dirigeants politiques étrangers, ceux du moins qui se montrent accommodants (elle avait conclu des accords avec le IIIème Reich).

Les liens tissés par l'I.T.T. avec les milieux politiques, militaires et financiers, sont innombrables (" le Monde " du 5 septembre) : Et voici que l'immense empire commence à déborder sur l'U.R.S.S., pourtant amie de M. Allende : il négocie la construction d'une chaîne d'hôtels, de centraux téléphoniques, d'une station de réception de signaux de satellites, et de bureaux de location de voitures.

On comprend, dans ces conditions, que l'ONU ait commencé à s'intéresser de près aux agissements de l'I.T.T., comme à ceux d'autres firmes telles que Du Pont et I.B.M. Les géants de l'économie capitaliste contemporaine tendent à déborder les États, à les investir, ou, comme ce fut le cas au Chili, à tenter de se débarrasser des dirigeants qui refusent de se soumettre à leurs oukases.

Le Monde

Le Monde




25 juillet, 2023

« LE CHILI PEUT PRODUIRE L'HYDROGÈNE VERT LE MOINS CHER DU MONDE » (NICOLÁS GRAU, MINISTRE CHILIEN DE L'ECONOMIE)

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 INFOGRAPHIE RODRIGO ANGUIANO
Premier producteur mondial de cuivre, le Chili possède également plus du tiers des réserves mondiales de lithium, suscitant un vif intérêt de la part de la France et de l'Union européenne. Un accord sur les métaux stratégiques a été signé entre le Chili et l'UE à Bruxelles la semaine dernière, à l'occasion de la visite du président Gabriel Boric. Le pays sud-américain ambitionne également de devenir un acteur majeur dans la production d'hydrogène vert comme l'explique pour la Tribune Nicolás Grau, ministre chilien de l'Economie, qui détaille la stratégie du gouvernement pour faire du Chili, déjà très avancé dans sa transition, un leader des industries vertes.

par Paul Marion 

LA TRIBUNE - En avril, le président Gabriel Boric a annoncé la création d'une compagnie nationale du lithium. Pourquoi ce projet de nationalisation ?

Nicolás Grau - 

NICOLÁS GRAU, MINISTRE
CHILIEN DE L'ECONOMIE

D'abord, le Chili ne nationalise pas son lithium. C'est une distinction vraiment importante. Légalement, le lithium est déjà nationalisé depuis la dictature des années 1970-1980. Notre stratégie ne se concentre donc pas sur le statut légal du lithium mais sur la manière d'organiser son exploitation. Ce modèle d'exploitation va changer en donnant de l'importance à une entreprise publique. Le lithium va être exploité par des entreprises privées, mais sous certaines conditions fixées par des contrats avec l'État chilien. Je le répète; cela n'a rien d'une nationalisation.

► À lire aussi  :    GABRIEL BORIC, PRÉSIDENT DU CHILI : « LA CHINE OFFRE DES OPPORTUNITÉS À PARTIR DU MOMENT OÙ NOUS N’EN DEVENONS PAS DÉPENDANTS »

Le projet d'une compagnie nationale du lithium n'a pas été accueilli très favorablement par les grandes entreprises au Chili, et même certains industriels à l'étranger. Ne craignez-vous pas de faire fuir les capitaux privés au moment où l'industrie minière en a le plus besoin pour augmenter sa production de lithium?

J'ai une perception très différente. La réaction du secteur privé à notre stratégie du lithium a été très bonne. Dans tous nos échanges, je n'ai eu aucun retour négatif, y compris quand je rentre dans le détail de notre stratégie. Les entreprises voient beaucoup d'opportunités économiques dans cette stratégie, qui passe par un partenariat avec le secteur public. C'est quelque chose de très commun dans l'industrie minière à travers le monde.

La création de la compagnie nationale du lithium nécessite encore l'approbation du Congrès chilien, où votre gouvernement n'a pas de majorité. Etes-vous confiant ?

Le projet de loi n'a pas encore été présenté, et devrait l'être avant la fin de l'année. Le lancement de la compagnie nationale du lithium prendra du temps. Nous espérons que ce sera chose faite pendant notre mandat qui s'achèvera en 2026. J'aimerais ajouter une précision : le Chili dispose déjà de deux entreprises d'État qui peuvent gérer les contrats sur le lithium : Codelco et Enami. Notre gouvernement veut maintenant une nouvelle compagnie totalement dédiée au lithium, mais l'État est déjà capable d'intervenir dans l'exploitation via ces deux entreprises.

L'extraction de lithium, très consommatrice d'eau, a un lourd impact écologique. L'augmentation des cadences de production de lithium est-elle compatible avec les engagements écologiques de votre gouvernement ?

C'est une question importante. Dans notre stratégie, les préoccupations environnementales sont centrales. Notre idée est de combiner deux objectifs : augmenter la production et protéger davantage l'environnement. Nous comptons protéger au moins 30% de la surface des déserts de sel (ndlr, le lithium est extrait à la surface des déserts de sel du nord du Chili). Ce plan de conservation est inscrit dans notre stratégie. Quant à la partie des déserts qu'on va exploiter, nous voulons basculer de la technique d'évaporation actuellement utilisée à celle de l'extraction directe, en phase de test. Cette technologie permettra de produire plus de lithium avec un impact écologique plus faible.

Quel bilan faites-vous de votre visite en France ?

Je suis satisfait de cette visite. J'ai présenté notre stratégie nationale du lithium et notre agenda vert au Medef et à Bpifrance pour leur donner des perspectives larges sur notre politique. En complément, j'ai échangé avec des entreprises sur des projets précis d'investissements. La réception a été très bonne. Il est clair que, connaissant notre stratégie, des entreprises françaises comptent vraiment investir dans le lithium au Chili. L'inverse est vrai. Nous voulons que des entreprises françaises participent à l'économie chilienne. Ce n'est pas qu'une stratégie économique mais aussi géopolitique. Nous pensons qu'il est pertinent de diversifier nos partenaires. La France a beaucoup à offrir dans ce contexte, avec des technologies intéressantes comme les batteries solides de Blue Solutions, une filiale du groupe Bolloré.

Vous parlez de diversification. Cherchez-vous à réduire la dépendance du Chili à la Chine, qui achète 70% de votre lithium à l'export ?

La diversification signifie qu'on ne veut dépendre de personne en particulier. Notre approche des investissements reste neutre. Tant qu'ils s'alignent avec notre stratégie, nous recevons avec joie tous les investissements.

À Bruxelles, le Chili vient de signer un accord de coopération avec l'Union européenne sur le lithium et les métaux stratégiques. Qu'en attendez-vous ?

Quand le président de la Commission européenne Ursula von der Leyen est venue au Chili en juin, elle a souligné que l'un des atouts de l'Europe comme investisseur est de créer plus de valeur au Chili, en plus de l'accès aux minerais stratégiques. Le MOU (ndlr, « memorandum of understanding », accord de coopération signé le 18 juillet entre le président chilien Gabriel Boric et Ursula von der Leyen) envoie un signal dans cette direction.

De son côté, l'Union européenne se préoccupe d'avoir accès aux métaux critiques. De notre côté, nous cherchons à voir un processus de création de valeur, d'industrialisation en plus de l'augmentation de la production de lithium. L'Union européenne et le Chili saisissent leur intérêt mutuel. C'est clairement une situation gagnant-gagnant.

Avec la transition écologie et industrie verte, vous voyez l'image du Chili changer ?

Depuis dix ans, les préoccupations autour de l'environnement, climat et biodiversité en tête, bouleversent les économies de nombreux pays. Le Chili a l'opportunité de devenir un acteur majeur de la transition verte en tant que producteur de cuivre, de lithium et potentiellement de l'hydrogène vert le moins cher du monde. La lutte contre le réchauffement climatique va être le principal moteur de notre croissance. Les pays, surtout européens, s'en rendent compte. Ils voient le Chili comme un partenaire stratégique de la transition verte. L'urgence de la transition écologique donne au Chili un avantage économique significatif.

De notre point de vue, il est important d'enclencher une dynamique d'industrialisation au Chili pour faire monter en compétences notre économie et ainsi être capable de créer des liens entre des grands investisseurs mondiaux et nos entreprises, petites et grandes, d'avoir plus de transferts technologiques, et d'augmenter les salaires.

Quelles industries comptez-vous précisément développer ?

Dans le cas du lithium, nous avons l'opportunité de produire au Chili entre l'étape d'extraction du lithium et la fabrication des batteries. Les contrats signés avec les groupes miniers exploitant le lithium d'Atacama imposent que 25% de leur production serve ensuite à fabriquer quelque chose au Chili, avant éventuellement d'être réexportée. Voilà pourquoi nous voulons une compagnie nationale du lithium : pour développer ce genre de mécanisme de contreparties.

Des progrès ont été accomplis mais on peut encore continuer de remonter la chaîne de valeur. Nous maîtrisons déjà des procédés industriels sophistiqués. Porsche a inauguré une usine de carburants synthétiques au sud du Chili, alimentée en électricité éolienne pour produire de l'hydrogène vert, à partir duquel sera fabriqué le carburant.

Pour ce qui est de l'hydrogène vert, le Chili dispose de deux grands avantages. D'abord, le coût des énergies renouvelables est très bas parce que l'énergie solaire au Nord et l'énergie éolienne au Sud sont incroyablement fiables. Nous avons aussi accès à l'eau, à des ports, à des infrastructures.

Dans le même temps, notre transition vers les énergies renouvelables a été une vraie réussite sur les dix dernières années. Nous avons maintenant de l'expérience, du savoir-faire. Ce n'est pas juste du potentiel. Nous mettons déjà à profit ces avantages, ce qui explique l'expansion de notre production d'énergie renouvelable (ndlr, le pays vise 70% de consommation d'énergies renouvelables en 2030).

Comment allez-vous allez financer ces investissements colossaux?

D'abord et principalement par des fonds privés. Mais l'investissement privé n'arrivera pas tout seul. Pour accélérer les immenses investissements requis dans l'industrie verte, nous avons créé un fonds de garantie, financé par des institutions internationales comme la Banque mondiale. Il est déjà doté d'un milliard de dollars pour fournir des garanties financières, capable d'attirer et de couvrir 12 milliards d'euros d'investissement au Chili. Cela va être une source de financement.

Notre stratégie est tellement ambitieuse que l'investissement public total pourrait être le double de ces 12 milliards de dollars. Le financement se fera par une combinaison de plusieurs instruments, entre autres ce que proposeront les entreprises privées, l'État chilien et la communauté internationale.

L'Amérique latine possède plus de la moitié des ressources connues de lithium. Vous partagez le plus grand gisement au monde avec la Bolivie et l'Argentine. Envisagez-vous un jour de créer un cartel du lithium pour en contrôler le prix, sur le modèle de l'OPEC avec le pétrole ?

Nous avons beaucoup à faire ensemble en Amérique Latine. Néanmoins, nous sommes tous à des stades différents de nos productions. Le Chili est actuellement deuxième producteur mondial de lithium. La création d'un cartel n'est pas à l'ordre du jour.

Propos recueillis par Paul Marion


 

MARCHE À LA MÉMOIRE DES 119 PERSONNES ASSASSINÉES PAR LA DICTATURE LORS DE L'« OPÉRATION COLOMBO »

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SILHOUETTES DES 119 PERSONNES ASSASSINÉES PAR LA DICTATURE

 1975 - 24 JUILLET- 2023

COMMÉMORATION DU QUARANTE-HUITIÈME ANNIVERSAIRE 
DE L'« OPÉRATION COLOMBO »
Des centaines de personnes se sont rassemblées ce samedi matin pluvieux sur l'esplanade du Musée de la Mémoire et des Droits de l'Homme pour défiler en hommage aux 119 victimes de l'«Opération Colombo» en 1975. 

[ -Ñ- Cliquez sur la flèche pour visionner la vidéo ]

« OPÉRATION
COLOMBO »

LLa marche s'est dirigée_ vers Alameda l'avenue principale de Santiago du Chili avec la participation de diverses organisations de défense des droits de l'homme. Les participants ont pu voir les 119 silhouettes peintes en 2005 par l'artiste José Rodríguez.

De plus, un groupe a a dansé la Cueca Sola, une danse qui a été créée par l'Association des familles des détenus disparus (AFDD), dans laquelle une personne danse sans partenaire accompagnée d'une photo de la victime qui est commémorée.

À la fin de la marche, les silhouettes commémorant les 119 victimes ont été déposées à l'intérieur du Musée National des Beaux-Arts.

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MARCHE À LA MÉMOIRE DES 119 PERSONNES
ASSASSINÉES PAR LA DICTATURE LORS
DE L'« OPÉRATION COLOMBO »
FOTO ANRED


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24 juillet, 2023

CUBA FÊTE L'ANNIVERSAIRE DE L'ATTAQUE DE LA MONCADA EN 1953


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 « 26 JUILLET » 
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PRENSA LATINA
70ème anniversaire de l'attaque par les rebelles, des casernes Moncada et Carlos Manuel de Cespedes, une action qui a donné le coup d'envoi des luttes révolutionnaires contre la dictature de Fulgencio Batista.
 1953 - 26 JUILLET - 2023
SOIXANTE-DIXIÈME ANNIVERSAIRE DE L'ATTAQUE DES CASERNES MONCADA ET CARLOS MANUEL DE CESPEDES   
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«PARA NOSOTROS SIEMPRE ES 26» , DU CUBAIN CARLOS PUEBLA, 
PARU DANS L'ALBUM «CUBA SI, YANQUIS NO», ÉDITE PAR LA MAISON 
DE DISQUES MOVIEPLAY-SERIE GONG SOUS LICENSE EGREM 
EN 1977 PAR LA BANDE CARLOS PUEBLA Y SUS TRADICIONALES
FIDEL CASTRO 
[PHOTOGRAPHIES ANTHROPOMÉTRIQUES]
Le 26 juillet 1953, les forces rebelles avaient attaqué la caserne de la Moncada à Santiago, dans le sud-est de l'île, à 800 km de La Havane. Ce fut l'acte fondateur de la révolution cubaine et cette date devint le nom de son mouvement révolutionnaire (Movimiento 26 Julio ou M 26-7) qui conquit finalement le pouvoir en 1959.