28 février, 2024

NATURE. UNE ÎLE CHILIENNE EST À VENDRE 35 MILLIONS DE DOLLARS MAIS SES HABITANTS RÉSISTENT

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ÉCONOMIE CHILI SCIENCES ET ENVIRONNEMENT / Nature. Une île chilienne est à vendre 35 millions de dollars mais ses habitants résistent / Traiguen, une île paradisiaque, mais privée, de la Patagonie chilienne a été mise en vente aux États-Unis par son propriétaire. Ses habitants, membres d’une communauté de culture mapuche, comptent bien s’y opposer par tous les moyens.

Courrier international

INFOGRAPHIE
 COURRIER INTERNATIONAL

Une vaste île sauvage à la nature intacte est en vente à l’autre bout du monde pour 35 millions de dollars”, titrait récemment le quotidien The New York Post. L’île de Traiguen, en Patagonie, dans l’archipel des Chonos, est à vendre depuis le début du mois, mais la polémique a grandi ces derniers jours au Chili. Selon le journal, elle ferait sept fois la taille de Manhattan et serait “vierge” et “inexploitée”.

► À lire aussi :       AU CHILI, DES ÎLES À VENDRE MALGRÉ LES PROTESTATIONS DES PEUPLES AUTOCHTONES

L’un des associés de l’agence d’immobilier de luxe qui l’a mise en vente, explique au quotidien : “Tout le monde n’est pas fait pour vivre sur une île mais il est vraiment rare de trouver une île de cette taille, avec un littoral aussi étendu [163 kilomètres], des eaux transparentes et une nature sublime dans un cadre aussi préservé et isolé. […] C’est une excellente opportunité pour les promoteurs.”

Mais la presse chilienne ne semble pas d’accord, notamment parce que Traiguen n’est ni vierge ni inexploitée. Une communauté amérindienne du peuple huilliche, de culture mapuche, s’y est installée il y a quatre-vingts ans et y vit essentiellement de la pêche artisanale.

Qui plus est, écrit le site The Clinic, “c’est un véritable poumon vert pour la planète, […] avec ses forêts de robles, de hêtres australs et de hêtres blancs” typiques de la Patagonie, et elle est très riche en eau douce.

Un accord pour cent ans

L’histoire de la propriété de Traiguen remonte à loin. Elle appartenait au fisc chilien jusqu’en 1989, quand le dictateur Augusto Pinochet en a fait don à l’armée. Laquelle ne l’a guère utilisée et l’a vendue en 2008 à un homme d’affaires chilien écologiste, Eduardo Ergas, pour la somme de 2,3 millions de dollars de l’époque.

Les Huilliche s’étaient alors rebellés contre cette vente, menaçant de poursuivre en justice l’homme d’affaires. Les deux parties avaient fini par trouver un accord. “Eduardo Ergas a cédé près de 500 hectares [sur 44 000] pour que la communauté puisse continuer à se développer, c’était un accord pour une durée de cent ans”, explique au quotidien régional d’Aysén El Divisadero Marcia Nahuelquin, qui a présidé la communauté jusqu’en 2020.

La nouvelle mise en vente remet tout en cause. El Divisadero commente :

“La communauté, qui a toujours lutté contre l’oubli et le mépris, prévoit un scénario douloureux comme par le passé.”

“Nous resterons sur l’île, personne ne va nous obliger à nous en aller, explique Marcia Nahuelquin. Comme l’a dit un jour ma mère, nous ne partirons d’ici que les pieds devant.”

À Santiago, poursuit The Clinic, le ministère du Patrimoine dit “être en train d’étudier s’il y a des précédents” à ce genre de vente, tout en étant pessimiste : “L’île est privée, c’est une transaction entre personne privées.” 

Courrier international

 

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27 février, 2024

DÉCOUVERTE D'UNE CENTAINE DE POTENTIELLES NOUVELLES ESPÈCES SOUS-MARINES AU LARGE DU CHILI

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UNE LANGOUSTE VIVANT DANS LE CORAIL D'UN NOUVEL
 HABITAT MONTAGNEUX SOUS-MARIN PARTICULIÈREMENT
 RICHE, À 669 MÈTRES DE PROFONDEUR.
[SCHMIDT OCEAN INSTITUTE - ROV SUBASTIAN]
Sciences-Tech. / Découverte d'une centaine de potentielles nouvelles espèces sous-marines au large du Chili / Des images exceptionnelles prises au cœur de l'océan, au large du Chili, ont permis aux scientifiques de mettre au jour par hasard une centaine de potentielles nouvelles espèces sous-marines. Il s'agit de poissons, de crustacés mais aussi de coraux.

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 Monts sous-marins du Pacifique Sud-Est | Points forts du ROV  

Dans le Pacifique Sud-Est, au large des côtes du Chili, les montagnes sous-marines créent un paysage d'eaux profondes à couper le souffle où prospèrent des coraux d'eau froide, des éponges de verre complexes, des anémones et une multitude de créatures qui captivent l'imagination. Près de la moitié des animaux vivant ici n’existent nulle part ailleurs sur Terre. Les monts sous-marins sont des oasis de biodiversité ; le mois dernier, une équipe internationale de scientifiques a exploré cette région peu étudiée de notre océan mondial. Les données et les images collectées lors de l’expédition #SEPacificSeamounts contribueront à faire progresser les efforts du Chili visant à établir une zone marine protégée en haute mer le long des crêtes de Nazca et Salas y Gómez.

Radio Télévision Suisse - rts.ch

Des scientifiques étaient partis cartographier les fonds marins au large du Chili. Mais l'expédition de l'institut Schmidt Ocean pourrait bien avoir découvert des dizaines de nouvelles espèces sous-marines.

Nous avons vu notamment une forêt de coraux bambous qui avaient probablement des milliers d'années. Erin Easton, professeure associée à l'Université de Texas Rio Grande Valley

Poissons rouges tout droit sortis d'un dessin animé, coraux en spirale, éponges ou encore mollusques et crustacés: l'équipe de recherche est tombée sur un monde aussi mystérieux que fascinant, comme s'en réjouit au micro du 19h30 Erin Easton, professeure associée à l'Université de Texas Rio Grande Valley.

"Nous avons pu observer plus de 150 espèces qui n'avaient pas été signalées dans la région et nous pensons que cent d'entre elles, voire plus, sont de nouvelles espèces pour la science. Nous avons vu notamment une forêt de coraux bambous qui avaient probablement des milliers d'années. Nous avons également observé de nombreuses autres espèces de coraux dont l'âge est sûrement aussi de l'ordre de plusieurs milliers d'années", détaille-t-elle.

L'équipe a exploré les monts sous-marins le long des dorsales de Nazca et de Salas y Gómez, tant à l'intérieur qu'à l'extérieur de la juridiction chilienne, afin de collecter des données susceptibles d'étayer la désignation d'une aire marine protégée internationale de haute mer.

LA DORSALE SALAS Y GÓMEZ, UNE CHAÎNE DE
MONTAGNES SOUS-MARINES DE 2900 KM DE LONG.
[SCHMIDT OCEAN INSTITUTE - CC BY-NC-SA]
La dorsale Salas y Gómez est une chaîne de montagnes sous-marines de 2900 kilomètres de long comprenant plus de deux cents monts sous-marins qui s'étendent du large du Chili jusqu'à Rapa Nui, également connue sous le nom d'île de Pâques. La majeure partie de la dorsale se trouve en dehors de la juridiction nationale. Les scientifiques ont également exploré deux des zones marines protégées du Chili, les parcs marins Juan Fernandez et Nazca-Desventuradas.

À suivi un travail de longue haleine avec, notamment, le prélèvement de dizaines d'échantillons. Ces derniers commencent tout juste à être analysés pour identifier les nouvelles espèces découvertes.

Seule certitude pour l'instant, leur habitat est aujourd’hui vulnérable, la faute notamment au chalutage ou encore à l'exploitation minière en haute mer (lire encadré).

Actuellement, seuls 5% des profondeurs océaniques ont été explorées.

Julien von Roten/fgn/sjaq



26 février, 2024

LULA ET GAZA : GÉNOCIDE, LE MOT POUR LE DIRE

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 LULA, AU PALAIS PLANALTO DE BRASILIA, LE 27 SEPTEMBRE 2023.
PHOTO EVARISTO SA / AFP
Lula et Gaza : génocide, le mot pour le dire
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S’il a versé dans l’outrance en suggérant que Netanyahou agissait avec les Palestinien·nes comme Hitler avec le peuple juif, le président brésilien a surtout libéré la parole sur la nature du massacre de la population civile dans la bande de Gaza.

par Patrick Piro 

Peut-on balancer à la figure des Israélien·nes que leur armée est en train de faire, dans la bande de Gaza, ce que Hitler a fait avec les juives et les juifs pendant la Seconde guerre mondiale ? Le président brésilien a osé la comparaison, le 18 février, à la tribune du 37ᵉ sommet des pays de l’Union africaine, à Addis-Abeba (Éthiopie). Tempête à Tel Aviv, Lula agoni d’invectives et déclaré persona non grata en Israël, convocation d’ambassadeurs, et le ton qui monte de chaque côté.

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DESSIN SERGIO LANGER

Tempête médiatique au Brésil également. La droite et l’extrême droite tombent à bras raccourci sur Lula, dont le discours est qualifié de « crétin » par un des fils Bolsonaro. Le président est sommé de-ci, de-là de présenter des excuses. À gauche, on se livre à des exégèses équilibristes : Lula n’aurait pas formellement comparé Netanyahou à Hitler, mais il se référait à la pratique de « déshumanisation » des nazis sur leurs victimes, alors que le peuple palestinien subit un carnage hors du commun.

► À penser en dessin : FENÊTRE SUR COUR

Il surnage le sentiment que Lula a exprimé tout haut ce que beaucoup de dirigeant·es pensent tout bas. 

Sur les 30 000 morts décomptés dans la bande de Gaza depuis la guerre déclenchée par Israël en riposte au massacre commis par les terroristes du Hamas, le 7 octobre dernier, quelque 60 % sont des personnes civiles, et 18 % des enfants. Des ratios qui dépassent de loin ce qu’on l’on relève en général dans les conflits des dernières décennies. Certes, sur la gauche du président brésilien, réputé pour sa spontanéité, certains proches ont désavoué sa « maladresse ». Et certes, il aurait pu convoquer bien d’autres exemples historiques pour exprimer le fond de sa pensée : il n’empêche, c’est bel et bien un génocide qui est en cours à Gaza.

[ - Ñ - Cliquez sur la flèche pour visionner la vidéo ]

Et finalement, plutôt que d’avoir atteint à ses dépens le « point Godwin » (1), il surnage le sentiment que Lula a exprimé tout haut ce que beaucoup de dirigeant·es pensent tout bas. En s’affranchissant de l’interdit absolu — accuser Israël de commettre à son tour un Holocauste —, il a libéré la parole. Là où un Macron, dans un premier temps zélé soutien de Tel Aviv, a récemment qualifié « d’intolérable » le massacre des Gazaoui·es, Gustavo Petro et Luis Arce, respectivement présidents bolivien et colombien, ont été plus loin, validant le recours au terme « génocide » du président brésilien, en toute solidarité avec lui.

Hasard de calendrier, il se trouvait que le secrétaire d’État étasunien Anthony Blinken avait prévu une visite au Brésil, jeudi 22 février, la première depuis qu’il a pris ses fonctions il y a trois ans. La droite brésilienne se délectait déjà d’une remontée de bretelles de la part du grand voisin. Elle a été déçue. Si Blinken a exprimé son « désaccord » concernant les propos de Lula, il n’en n’a pas fait un plat, plutôt enclin à saluer une « très très bonne réunion » avec un partenaire « très important ». Alors, peut-on attribuer à la sortie éléphantesque de Lula l’inflexion récente de la position de Joe Biden dans la crise à Gaza ? C’est probablement abusif, mais ça fait système.

Si les États-Unis ont brandi pour la troisième fois leur veto, au Conseil de sécurité de l’ONU, à une nouvelle résolution appelant à un cessez-le-feu dans le territoire palestinien martyrisé, Washington a cru nécessaire d’assortir son blocage d’un contre-texte proposant l’arrêt des combats en échange de la libération de tous les otages. Biden se trouve aujourd’hui dans une situation de plus en plus inconfortable, coincé entre le dogme étasunien historique de la fidélité sans faille à Israël, et l’agitation de son aile gauche politique, qui ne supporte plus d’être associée, à ses dépens, au martyr de la population palestinienne.

(1) Procédé consistant à disqualifier les arguments d’un contradicteur en les référant à Hitler, au nazisme ou à la Shoah.

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DELIGHT LAB / ATELIER D'ART :
LUMIÈRE, SON ET ESPACE
À SANTIAGO DU CHILI



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POLÉMIQUE. CHILI : L’ENLÈVEMENT D’UN OPPOSANT VÉNÉZUÉLIEN A-T-IL ÉTÉ ORDONNÉ PAR CARACAS ?

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L’AVIS DE RECHERCHE DE L’OPPOSANT VÉNÉZUÉLIEN RONALD OJEDA
 DIFFUSÉ PAR LA POLICE JUDICIAIRE CHILIENNE LE 22 FÉVRIER 2024.
L’AVIS DE RECHERCHE DE L’OPPOSANT VÉNÉZUÉLIEN RONALD OJEDA
 DIFFUSÉ PAR LA POLICE JUDICIAIRE CHILIENNE LE 22 FÉVRIER 2024.
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Polémique. Chili : l’enlèvement d’un opposant vénézuélien a-t-il été ordonné par Caracas ? / C’est une affaire d’État : un ancien militaire vénézuélien, recherché par le régime de Nicolás Maduro et réfugié au Chili, a été enlevé à Santiago le mercredi 21 février. Parmi les hypothèses, le gouvernement envisage une opération des services secrets de Caracas. En tout cas, “il ne fera pas profil bas”, commente la presse chilienne.

Courrier international

Le président chilien Gabriel Boric a suspendu ses vacances d’été austral, jeudi 22 février, pour une réunion au plus haut niveau avec certains de ces principaux ministres. La raison ? L’enlèvement, la veille, en pleine nuit, à Santiago, d’un ex-militaire vénézuélien opposant déclaré au régime de Nicolás Maduro. Un enlèvement qui est devenu une affaire d’État au Chili.

► À penser en dessin : FENÊTRE SUR COUR

C’est une affaire très grave, a indiqué la ministre porte-parole du gouvernement, Camila Vallejo, reprise par le quotidien La Tercera. Notre ambassadeur [à Caracas] a commencé les démarches pour rencontrer le vice-ministre des Affaires étrangères vénézuélien, et nous avons des contacts à tous les niveaux” avec le Venezuela.

SUR L'IMAGE, RONALD OJEDA.

Enlèvement / Un officier déserteur de l’armée vénézuélienne qui était venu vivre à Santiago a disparu il y a cinq jours. Il a été kidnappé par de faux policiers de la PDI (la police judiciaire).

par Pierre Cappanera

PIERRE CAPPANERA
PHOTO FACEBOOK

Aussitôt la droite et sa presse lance une campagne contre le Vénézuéla qui serait à l’origine de cet enlèvement. Le but de cette campagne est que les relations entre le Chili et le Vénézuéla se dégradent. 

Pourtant beaucoup d’autres hypothèses existent. Les mafias du Vénézuéla (mais aussi de Colombie et d’Equateur) se sont fortement implantées au Chili lorsque Piñera a ouvert en 2019 les frontières à tous les Vénézuéliens sous prétexte de lutte contre la dictature de Maduro.

Quand on connait les liens traditionnels entre une partie de l’armée de ces pays avec les narcotraficants, les groupes para-militaires, les mafias de toute sorte, quand on sait l’ampleur de la corruption qui traverse ces armées, alors, oui, on peut imaginer bien d’autres hypothèses que celle de l’implication des services secrets vénézuéliens.

Pour la ministre de l’intérieur du Chili comme pour la PDI, aucune hypothèse n’est privilégiée à ce stade.


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25 février, 2024

CPAC : LE PRÉSIDENT ARGENTIN JAVIER MILEI RENCONTRE DONALD TRUMP

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DONALD TRUMP (À GAUCHE) ET JAVIER MILAI (À DROITE)  SE
SONT RENCONTRÉS DANS LES COULISSES DE LA CONFÉRENCE
 D'ACTION POLITIQUE DES CONSERVATEURS © HANDOUT /
BUREAU DE PRESSE DE LA PRÉSIDENCE ARGENTINE/AFP
INTERNATIONAL / CPAC : le président argentin Javier Milei rencontre Donald Trump / Javier Milei, président de l’Argentine depuis décembre, a rencontré Donald Trump, son homologue des États-Unis, pour la première fois. Lors du CPAC, un comité organisé par les conservateurs américains, les deux hommes ont échangé leur admiration respective. 

Clément Marna

LE PRÉSIDENT ARGENTIN JAVIER MILEI 
LORS DE LA CPAC 2024, LE SAMEDI
24 FÉVRIER 2024.
PHOTO JOSE LUIS MAGANA

Tout frais vainqueur de la primaire républicaine en Caroline du Sud, Donald Trump s’est rendu à Washington samedi 24 février pour prononcer un discours devant la Conservative Political Action Conference (CPAC), une réunion politique organisée par les conservateurs américains. Il a pu rencontrer Javier Milei, le président argentin, qui s’est dit « si heureux » de rencontrer son homologue américain devant les journalistes présents sur place.

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« Make Argentina great again ! »

Alors que Donald Trump s’est présenté comme un « fier dissident politique », il a surtout vu Javier Milei le couvrir de compliments durant cet événement. « Il a réussi beaucoup de choses, c'est un grand homme », a fièrement clamé celui qui a été élu président de l’Argentine en décembre dernier. Durant sa campagne électorale, il avançait « dans un alignement naturel » avec Donald Trump et Jair Bolsonaro, ancien président brésilien, connu, comme les deux autres pour sa politique conservatrice et ses prises de position tranchées.

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Donald Trump a lancé « Make Argentina great again ! » Javier Milei a alors répondu avec son fameux slogan de campagne : « Viva la libertad, carajo ! » (« Vive la liberté, bordel ! »). « Nous ne céderons pas tant que nous n'aurons pas rendu à l'Argentine sa grandeur », avait déjà annoncé le président argentin durant son discours. Au cours de celui-ci, il a également appelé à faire barrage au socialisme et à se battre pour la liberté, tout en qualifiant la notion de justice sociale d'« aberration ».

Malgré son attachement à Donald Trump, Javier Milei aurait davantage besoin de l’aide de Joe Biden, actuel président des États-Unis, d’après le Financial Times. Principale actionnaire du FMI, la Maison-Blanche pourrait inciter le fonds monétaire à prêter davantage d’argent à l’Argentine, en proie à de fortes tensions sociales et qui s'est vu octroyer un programme de facilité financière de 44 milliards de dollars par le FMI.

21 février, 2024

MANOUCHIAN ET SES CAMARADES : QUI SONT LES 23 MARTYRS DE L’AFFICHE ROUGE?

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DES MEMBRES DE LA LÉGION ÉTRANGÈRE FRANÇAISE SE TIENNENT
À CÔTÉ DES CERCUEILS DÉPOSÉS DEVANT LE PANTHÉON LORS DE LA
 CÉRÉMONIE D'INTRONISATION AU MAUSOLÉE DE MISSAK MANOUCHIAN
ET DE SON ÉPOUSE MELINEE, À PARIS, LE 21 FÉVRIER 2024.
PHOTO LUDOVIC MARIN / AFP
Manouchian et ses camarades : qui sont les 23 martyrs de l’Affiche rouge ? / Avec l’entrée de Missak Manouchian au Panthéon ce 21 février, c’est toute la résistance étrangère qui est célébrée. Dans son groupe, ils étaient 23 : juifs, Espagnol, Hongrois, Polonais, Italiens, Roumaine, Arméniens, communistes. Ils ont défié l’occupant allemand. Ils furent traqués sans relâche par les brigades spéciales de la police française jusqu’à leur arrestation, avant d’être exécutés le 21 février 1944 au Mont-Valérien. De jeunes doctorants et historiens ont pris la plume pour retracer la vie de ces 23 martyrs.
DANS LE GROUPE MANOUCHIAN, ILS SONT 23. ICI, A ÉTÉ AJOUTÉ
 JOSEPH EPSTEIN, LE COLONEL GILLES, CHEF DES FTP D’ILE-DE-FRANCE,
ARRÊTÉ  AVEC MISSAK MANOUCHIAN, LE 16 NOVEMBRE 1943.
 ©AFP PHOTO / CLEMENS RUTHER / SERGE KLARSFELD

[ Pour écouter cliquez-ici ! ]

    « STROPHES POUR SE SOUVENIR », POÈME DE LOUIS ARAGON, 
CE POÈME EST CHANTÉ PAR LÉO FERRÉ SOUS 

LE TITRE «L'AFFICHE ROUGE». 

 La rédaction

37min

#Manouchian dans Le Canard enchainé
Dessin Pancho

Aragon les a mis en vers, Léo Ferré les a chantés. Ils n’avaient « réclamé ni la gloire ni les larmes ». Les 23 membres du groupe Manouchian, cette « armée du crime » comme l’avait baptisé l’occupant nazi, venaient des quatre coins de l’Europe. Espagne, Hongrie, Pologne, Roumanie, Arménie. Pour la plupart, ils avaient déjà connu le combat : en Espagne pour défendre la république contre Franco. Pour d’autres, c’était contre le fascisme italien.

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Quand ils tombent le 21 février 1944 au Mont-Valérien, ils sont très jeunes. Thomas Elek, Georges Cloarec, Rino Della Negra, Maurice Fingercweig, Léon Goldberg, Robert Witchitz et Roger Rouxel ont à peine 20 ans. Célestino Alfonso, Jonas Geduldig, Spartaco Fontanot, eux, ont moins de 30 ans. 10 d’entre eux apparaissent sur « l’Affiche rouge » placardée par l’occupant dans tout Paris. De jeunes doctorants et historiens retracent la vie de ces 23 martyrs.

► À penser en dessin : FENÊTRE SUR COUR

Celestino Alfonso : le brigadiste espagnol tombe à 27 ans

CELESTINO ALFONSO : LE BRIGADISTE
 ESPAGNOL TOMBE À 27 ANS

Celestino Alfonso s’était engagé dans les Brigades internationales en 1936. Il intègre le groupe Manouchian en juillet 1943.

Par Léo Rosell, historien 

Celestino Alfonso est né le 1er mai 1916 à Ituero de Azaba en Espagne. En 1927, sa famille immigre en France et s’installe à Ivry-sur-Seine, près de Paris. En 1934, il adhère aux JC et devient responsable du groupe d’Ivry. Il travaille comme menuisier et manœuvre, puis il s’engage en 1936 dans les Brigades internationales, dont il devient capitaine en 1938 après une blessure.

Contraint à l’exil, comme près de 500 000 autres républicains espagnols, il est interné au camp d’Argelès, dans les Pyrénées-Orientales. Il en sort le 7 décembre 1939 en intégrant une compagnie de travailleurs étrangers. En juin 1940, il revient à Paris, où il est arrêté le 17 janvier 1941.

Libéré, en février il part travailler en Allemagne jusqu’au 18 juin 1941. Il milite dans le même temps à la section espagnole du Parti communiste clandestin. Après plusieurs mois passés à Orléans pour échapper aux arrestations, il entre en contact en juillet 1943 avec Missak Manouchian.

Sous le pseudonyme de « Pierrot », il intègre une équipe spéciale constituée de Léo Kneler et de Marcel Rajman. Désigné comme tireur d’élite, il prend part à plusieurs opérations, dont l’assassinat de Julius Ritter, officier SS supervisant le STO (Service du travail obligatoire) en France, le 28 septembre.

Alfonso est arrêté le 17 novembre entre son domicile du 16, rue de Tolbiac, où il loge avec sa compagne et son fils, et le domicile de ses parents à Ivry-sur-Seine. Il est fusillé le 21 février 1944 au Mont-Valérien, à l’âge de 27 ans. On le retrouve sur la célèbre Affiche rouge, avec la mention : « Alfonso, Espagnol rouge, 7 attentats ». Après la Libération, sa dépouille est transférée dans le carré des fusillés, au nouveau cimetière communal d’Ivry. Le 14 mai 1945, il est déclaré « Mort pour la France », tandis que, depuis le 27 juillet suivant, une rue d’Ivry porte son nom.

L’engagement de Manouchian dans la Résistance et son martyr, symbolisé par l’Affiche Rouge, rappelle le rôle majeur qu’ont joué les immigrés dans l’histoire de France. Avec la participation d’écrivains, d’auteurs, d’historiens, d’universitaires et de journalistes, l’Humanité publie un hors-série exceptionnel : en 100 pages richement illustrées, vous y retrouverez le parcours et la trace de cet ouvrier et poète arménien, militant communiste et membre des FTP-MOI, fusillé par les nazis avec 22 de ses camarades, au Mont-Valérien, le 21 février 1944.


Olga Bancic : la seule femme du groupe, guillotinée quelques jours avant ses 32 ans

SEULE FEMME DU GROUPE MANOUCHIAN, OLGA BANCIC NE SERA
PAS FUSILLÉE AVEC SES CAMARADES, MAIS TRANSFÉRÉE
EN ALLEMAGNE ET GUILLOTINÉE, LE 10 MAI 1944.

Née en 1912 à Kichinev, en Roumanie, dans une famille juive, Olga Bancic part, à 16 ans, pour Bucarest et adhère aux Jeunesses communistes. Arrêtée lors d’une manifestation, elle passe deux années en prison et, à sa sortie, entre en clandestinité.

Par Éloïse Dreure, historienne

Elle part pour la France en 1938 et, dès les débuts de l’Occupation, s’engage au sein de l’organisation clandestine Main-d’œuvre immigrée (MOI), des étrangers communistes, puis, dans sa branche de lutte armée, les FTP-MOI. Sous le matricule 10011 et le pseudonyme « Pierrette », elle a pour fonction d’assembler les bombes et les explosifs, d’assurer le dépôt, mais surtout le transport des armes et munitions. Une chambre louée, dès 1943, au 6e étage du 3, rue Andrieu (8ème arrondissement), sous le nom de Mme Martin, lui sert de lieu de stockage.

Le 16 novembre 1943, lors d’un rendez-vous avec Marcel Rajman, elle est arrêtée rue du Docteur-Paul-Brousse par six inspecteurs de la BS2. Interrogée dans les locaux des brigades spéciales, elle est battue à coups de nerf de bœuf et incarcérée le 27 novembre à la prison de Fresnes, avec 23 autres membres des FTP-MOI.

Seule femme parmi les 24 accusés, elle est aussi la seule à ne pas être fusillée au fort du Mont-Valérien le 21 février 1944.

Seule femme parmi les 24 accusés qui comparaissent le 18 février 1944 devant le tribunal du Gross Paris, elle est aussi la seule à ne pas être fusillée au fort du Mont-Valérien le 21 février 1944. L’occupant a, en effet, pour règle de ne pas exécuter de femmes en France.

Le 23 mars 1944, la chambre de la rue Andrieux est perquisitionnée, les policiers y trouvent des armes de poing et des engins explosifs et identifient Mme Martin comme étant Olga Bancic. Transférée en Allemagne, elle est guillotinée, dans la cour de la prison de Stuttgart, le 10 mai 1944, jour de son 32e anniversaire.

Sa dernière lettre, datée du 9 mai 1944, jetée par une fenêtre lors de son transfert à Stuttgart, est pour sa fille, âgée de 5 ans et prénommée Dolorès, en hommage à Dolorès Ibarruri, la Passionaria. Elle est reconnue « Morte pour la France » le 14 décembre 2011.


Joseph Boczor : le « chef dérailleur » de l’Affiche rouge

JOSEPH BOCZOR, REJOINT LUI AUSSI LES BRIGADES INTERNATIONALES
EN ESPAGNE EN 1936, IL DEVIENT LE CHEF DU 4ème DÉTACHEMENT
DES FTP-MOI DE LA RÉGION PARISIENNE.

Joseph Boczor, rejoint lui aussi les Brigades internationales en Espagne en 1936, il devient le chef du 4ème détachement des FTP-MOI de la région parisienne.

 par Dimitri Manessis, historien

Boczor. Ou Boczov ? On bute sur l’orthographe. Francisc (ou Ferenz) Wolf ne livre pas facilement son identité. On écorche son nom, qui est en fait un pseudonyme. On doute sur son prénom. On lui confère la nationalité hongroise, et le voilà responsable, dans un camp français, après une défaite espagnole, d’un groupe roumain. Cet étudiant en Tchécoslovaquie devient guérillero en France. On pense être pris de vertiges. C’est que le parcours s’inscrit dans les bouleversements de son siècle.

Né en Transylvanie dans une famille juive en 1905, Francisc Wolf rejoint les Jeunesses communistes au lycée. Étudiant à Prague, il rejoint les Brigades internationales en Espagne. Interné par la France de Daladier dans le camp d’Argelès (Pyrénées-Orientales) puis de Gurs (Pyrénées-Atlantiques) en 1939, il s’évade deux ans plus tard du train qui le déporte en Allemagne et rejoint l’Organisation spéciale de la MOI. Il prend alors le nom de Joseph Boczor (changé en Boczov par erreur de transcription), clin d’œil à un camarade de lycée.

Ses connaissances techniques, acquises aussi bien lors de sa formation d’ingénieur chimiste que lors des combats espagnols, font de lui le chef (matricule 10003) du 4e détachement des FTP-MOI de la région parisienne. Il se spécialise dans les déraillements des trains transportant les troupes du Reich. Le 17 novembre 1943, Boczor est arrêté par la police française comme 67 de ses camarades. À 38 ans, le « chef dérailleur » de l’Affiche rouge est un des plus vieux parmi ses compagnons à être fusillé le 21 février 1944.

La postérité retient plusieurs années le « groupe Manouchian-Boczor ». Puis ce dernier disparaît de l’intitulé. On pense à l’ingénieur du film le Terroriste de Gianfranco De Bosio, qui, comme de nombreux partisans chantés par la Complainte du partisan, « rentre dans l’ombre ». Pour mieux en ressortir ? Il est reconnu « Mort pour la France » le 17 avril 1972.


Georges Cloarec : à 19 ans, le Français rejoint les FT

 GEORGES CLOAREC N’A PAS RÉUSSI À REJOINDRE LA FRANCE
LIBRE À LONDRES, IL ENTRA DANS LES FTP À 19 ANS.

Né le 22 décembre 1923 à Saint-Lubin-des-Joncherets dans l’Eure-et-Loir, Georges Cloarec est le fils de Léon, ouvrier d’usine, et de Valentine, née Daniou, tisserande.

par David Noël, historien

Ouvrier agricole à Droisy-par-Nonancourt (Eure), il gagne la zone sud dès l’occupation allemande pour s’engager dans les forces de la France libre à Londres, mais n’y parvient pas.

En septembre 1943, il quitte son département natal, où il était revenu, pour se rendre à Alfortville, dans le Val-de-Marne, chez son oncle Louis Cloarec, afin d’échapper au STO. Il y rencontre Luigi Marconi, qu’il avait connu à Nonancourt, à la sortie des Tréfileries d’Ivry où il travaillait.

Marconi le met en contact avec Eugène Martinelli, qui lui propose d’entrer dans les FTP. Georges Cloarec est affecté au 3e détachement italien des FTP-MOI. Il loge à Vitry-sur-Seine sous la fausse identité de « Philippe Laurent ».

Le 20 octobre 1943, il lance une grenade contre la vitrine d’un restaurant occupé par les Allemands ; quelques jours plus tard, aux côtés de Cesare Luccarini et Robert Witchitz, il prend part à un attentat contre un membre du PPF (Parti populaire français). Le 4 novembre, il participe à une opération de récupération de bicyclettes dans un garage à Vincennes.

Arrêté le 13 novembre par les inspecteurs de la BS2, il comparaît le 18 février 1944 devant le tribunal du Gross Paris, qui le condamne à mort. Georges Cloarec est fusillé le 21 février 1944 à 15 h 29 au Mont-Valérien avec les 22 autres condamnés du groupe Manouchian. Il est reconnu « Mort pour la France ».


Rino Della Negra : le footballeur italien choisit les armes

LE FOOTBALLEUR DU RED STAR AVAIT 19 ANS
QUAND IL EST ASSASSINÉ PAR L’OCCUPANT.

Rino Della Negra naît le 18 août 1923 à Vimy. C’est en banlieue parisienne, à Argenteuil, qu’il grandit, se forme et se forge à partir de 1926. Il y côtoie des Italiens comme lui, faisant vivre une petite Italie antifasciste, dans le quartier Mazagran. Ses copines et ses copains sont des « rouges », côtoyant les cercles du PCI en exil et s’engageant dans les Brigades internationales. Tous et toutes participent à l’atmosphère très politique dans laquelle baigne le jeune Rino.

Par Dimitri Manessis, historien

C’est le football qui a la préférence du jeune ajusteur, qu’il pratique assidûment dans les clubs locaux, les uns liés au sport « corpo », celui de l’usine, les autres à la FSGT (Fédération sportive et gymnique du travail), la grande organisation du sport « travailliste ».

Brillant sur les terrains, il est recruté pour la saison 1943-1944 au sein du prestigieux Red Star. L’histoire pourrait continuer ainsi, si ce n’est la convocation au STO, le refus de Rino, son passage en clandestinité et sa volonté de mener, à son tour, la lutte antifasciste les armes à la main. Dès le début de l’année 1943, alors que la carrière du footballeur amateur ne cesse de gagner en importance, Della Negra fait le choix des armes.

Au sein des FTP d’Argenteuil, puis dans le 3ème détachement des FTP-MOI de la région parisienne, il multiplie les actions contre l’occupant et ses collaborateurs. Attaquant un transport de fonds allemand aux côtés de Robert Witchitz le 12 novembre 1943, il est blessé, arrêté. Fusillé le 21 février 1944, il demandait à ses parents de « faire comme [s’il était] au front », et à son frère et ses amis de « prendre une cuite » pour lui. Il est reconnu « Mort pour la France » le 24 novembre 1950.


Thomas Elek : l’élève du lycée Louis-le-Grand devient dérailleur de trains

THOMAS ELEK S’ENGAGE EN
AOÛT 1942 DANS LES FTP-MOI.

Thomas Elek, souvent appelé Tommy, est né le 7 décembre 1924 à Budapest (Hongrie) dans une famille juive athée et communiste. La famille quitte la Hongrie pour Paris en avril 1930 en raison de l’engagement politique du père. En France, les époux sont membres du Parti communiste hongrois clandestin et du Secours rouge international. Ils militent en faveur de l’aide à l’Espagne républicaine.

Par Zoé Grumberg, historienne

En 1940, la famille se fait recenser comme juive auprès des services de la préfecture de police de Paris. Elle refuse pourtant de porter l’étoile jaune et les enfants fréquentent clandestinement des lieux interdits aux juifs.

En 1941, Thomas quitte le lycée Louis-le-Grand après une altercation avec un camarade antisémite. Dans le restaurant tenu par sa mère dans le 5e arrondissement, il rencontre des étudiants membres du réseau de résistance du Musée de l’homme. Il cache derrière la cuisine du restaurant du matériel pour confectionner et coller des tracts et papillons avec ces étudiants. Il est par ailleurs adhérent des Jeunesses communistes.

En août 1942, Thomas s’engage dans les FTP-MOI. Il est à l’origine de plusieurs actions au sein du 1er détachement, notamment l’attentat perpétré à la librairie franco-allemande Rive gauche boulevard Saint-Michel le 9 novembre 1942. En juillet 1943, il rejoint le 4e détachement, dit des dérailleurs, chargé de faire dérailler des convois ferroviaires allemands. L’équipe tombe à la fin du mois de novembre 1943.

Thomas est arrêté dans sa planque du 14e arrondissement par les brigades spéciales. Il est livré aux Allemands, emprisonné à Fresnes pendant trois mois et torturé. Il apparaît sur l’Affiche rouge. Condamné à mort, il est fusillé au Mont-Valérien le 21 février 1944. Il est reconnu « Mort pour la France » le 13 avril 1947.


Maurice Fingercweig : le Polonais qui opère sur la ligne Paris-Troyes

MAURICE FINGERCWEIG EST TUÉ À 19 ANS. IL FAIT
PARTIE DES MOI REPRÉSENTÉ SUR L’AFFICHE ROUGE.

Né dans une famille juive polonaise de Varsovie le 25 décembre 1922, Moska (Maurice) Fingercweig arrive en France en 1926. Il est orphelin de sa mère à 11 ans, son père est ouvrier tailleur, et c’est son frère aîné qui s’occupe de lui et l’initie à la vie politique, lui-même étant engagé aux Jeunesses communistes.

Par Jean Vigreux, historien

Maurice Fingercweig entre aux JC en 1940. Son frère et son père sont arrêtés lors des rafles de 1942 et déportés à Auschwitz.

Il s’engage au sein de la MOI et devient FTP-MOI, sous le matricule 10152. Il participe alors à de nombreuses actions des FTP-MOI, puis rejoint l’équipe des dérailleurs. Dans ce cadre, il opère souvent sur la ligne de Paris-Troyes.

Lors de l’une de ces actions, il est repéré avec ses camarades et suivi par les BS2 jusqu’à la préfecture de l’Aube, mais ils arrivent à semer les policiers et réussissent leur opération de sabotage à Chaumont en Haute-Marne.

Toutefois, Maurice Fingercweig est arrêté le 17 novembre 1943 par les BS2 lors de la troisième filature, avec des faux papiers au nom de « Jean Bourdier ». Il est jugé avec ses camarades le 18 février 1944 et fusillé le 21 février 1944. Il fait partie des MOI représentés en médaillon sur l’Affiche rouge avec cette mention : « Fingerweig, juif polonais, 3 attentats, 5 déraillements ». Il est reconnu « Mort pour la France » le 10 juin 1971.

Spartaco Fontanot : l’antifasciste italien intègre l’équipe spéciale chargée des exécutions de hauts gradés

SPARTACO FONTANOT AGISSAIT SOUS LE PSEUDONYME DE « PAUL »,
 IL FIGURE LUI AUSSI SUR L’AFFICHE ROUGE, IL AVAIT 21 ANS.

Spartaco Fontanot, né en Italie le 17 janvier 1922, est arrivé en France à l’âge de 2 ans. Avec ses parents, réfugiés antifascistes italiens, il s’installe dans le Nord puis déménage à Nanterre. Après avoir obtenu un CAP, Spartaco Fontanot travaille comme tourneur sur métaux à Courbevoie et milite à la CGT.

Par Corentin Lahu, historien

Après l’arrestation de son père et de sa sœur, il entre en clandestinité le 1er avril 1943, craignant d’être requis pour aller travailler en Italie. Il rejoint la Résistance communiste et intègre le 3e détachement des FTP-MOI de la région parisienne, composé d’Italiens. Agissant sous le pseudonyme « Paul », il est ensuite affecté à l’équipe spéciale chargée des exécutions de hauts gradés.

Son nom figure sur l’Affiche rouge avec l’inscription : «Fontanot, communiste italien, 12 attentats »

Le 10 juin 1943, il participe au commando qui attaque à la grenade le siège du parti fasciste italien à Paris. Dans les mois suivants, il mène d’autres actions armées avec les FTP-MOI : attaque de la Feldkommandantur à Choisy-le-Roi le 10 juillet, attentat manqué le 28 juillet contre le général von Schaumburg (commandant du Grand Paris), exécution d’un capitaine allemand au Kremlin-Bicêtre le 20 août, jet de grenade contre un restaurant parisien occupé par les Allemands le 20 octobre…

Arrêté le 13 novembre 1943 par les brigades spéciales, il est torturé puis livré aux Allemands. Emprisonné à Fresnes, il est condamné à mort et fusillé le 21 février 1944 au Mont-Valérien. Son nom figure sur l’Affiche rouge avec l’inscription : « Fontanot, communiste italien, 12 attentats ». Il est reconnu « Mort pour la France » le 29 août 1946.

Jonas Geduldig : le juif polonais se réfugie en Palestine avant d’intégrer la FTP-MOI

JONAS GEDULDIG A ÉTÉ RECONNU
« MORT POUR LA FRANCE » EN 1972. 
PHOTO MUSÉE DE LA RÉSISTANCE NATIONALE,
CHAMPIGNY-SUR-MARNE

Né le 22 janvier 1918 en Pologne dans une famille juive, il entre très jeune au sein des rangs communistes. Face aux répressions, il quitte son pays pour la Palestine, où il rejoint son frère aîné. Prenant conscience du danger fasciste, il s’engage dans les Brigades internationales et est blessé au front.

Par Jean Vigreux, historien

En France, il est interné dans les camps de Gurs et Argelès, d’où il s’échappe et rejoint Paris. Là, il reprend son militantisme sous l’identité de « Michel Martiniuk » et rejoint la MOI. Il s’emploie à saboter les machines des ateliers de confection ou de fourrures qui doivent travailler pour l’occupant.

Dès novembre 1941, il fait partie des organisations du PCF, qui, entre autres, assurent la protection dans les manifestations, comme celle de la solidarité le 11 novembre 1941. Dès avril 1942, il rejoint les FTP-MOI et fait partie du 2e détachement, constitué de juifs. Là, il participe à la lutte armée, puis est affecté en 1943 au groupe des dérailleurs (matricule 10602).

Avec ses camarades, il participe à de nombreuses actions sur la ligne Paris-Troyes. Repéré dès octobre 1943 par les BS2, qui le nomment « Pailleron », il est arrêté à son domicile lors de la troisième filature le 17 novembre 1943 et jugé avec ses camarades. Fusillé le 21 février 1944 au Mont-Valérien, il est reconnu « Mort pour la France » le 17 avril 1972.

Emeric Glasz : pour le Hongrois de 41 ans, la « vie ne vaut rien sans liberté »

EMERIC GLASZ ÉTAIT AFFECTÉ AU
DÉTACHEMENT DES DÉRAILLEURS.

Emeric Glasz, né à Budapest le 14 juillet 1902, doit fuir la Hongrie de l’amiral Horthy, qui réprime brutalement les militants communistes. Arrivé en France en 1937, il travaille comme ouvrier mécanicien. Lorsque la guerre éclate, il s’engage dans l’armée française, au sein du 23e régiment de marche des volontaires étrangers. Après sa démobilisation en 1940, il revient à Paris.

Par Corentin Lahu, historien

Dès 1941, il intègre l’Organisation spéciale (OS), mise en place par le PCF pour protéger ses militants et entreprendre les premières actions de résistance armée. L’année suivante, il rejoint – sous le pseudonyme « Robert » – le premier détachement des FTP-MOI de la région parisienne, avant d’être affecté au 4e détachement, dit des dérailleurs, spécialisé dans les déraillements.

Le 11 septembre 1943, il participe à une tentative de déraillement près de Châlons-sur-Marne. Trois jours plus tard, il fait dérailler un train allemand vers Gretz, sur la ligne Paris-Troyes.

Le 23 septembre, il sabote une voie ferrée à Coubert (Seine-et-Marne), puis participe au déraillement le 26 octobre d’un train à Grandpuits.

Emeric Glasz est arrêté le 17 novembre 1943, lors du vaste coup de filet opéré par les brigades spéciales contre les FTP-MOI. Lors du procès du groupe Manouchian, il aurait déclaré aux juges : « J’ai vécu pendant sept mois dans l’illégalité. C’est à ce prix seulement que je pouvais garder ma liberté. Car la vie ne vaut rien sans liberté. » Emeric Glasz est fusillé le 21 février 1944. Il est reconnu « Mort pour la France » le 3 août 1971.


Lajb (Léon) Goldberg : après avoir échappé à la rafle du Vel’d’Hiv, le Polonais rejoint les FTP-MOI

LE LENDEMAIN DU 20E ANNIVERSAIRE DE LÉON GOLDBERG
S’OUVRE LE PROCÈS DES FTP-MOI DE LA RÉGION PARISIENNE.
PHOTO MUSÉE DE LA RÉSISTANCE NATIONALE, CHAMPIGNY-SUR-MARNE

Lajb (Léon) Goldberg naît à Lodz, en Pologne, le 14 février 1924. Avec sa mère, il émigre à Paris en 1929, rejoignant son père parti un an plus tôt. Après avoir fréquenté l’école primaire de Belleville, Léon décroche brillamment une bourse et obtient son brevet élémentaire.

Par Corentin Lahu, historien

Il étudie durant deux ans au centre professionnel de l’école Turgot, jusqu’en mai 1942, avant d’accomplir un stage à l’usine métallurgique Rateau à la Courneuve.

Le 16 juillet 1942, ses parents et ses deux frères sont arrêtés lors de la rafle du Vel’d’Hiv‘, puis déportés à Auschwitz, d’où ils ne reviendront pas.

Léon Goldberg, qui échappe à l’arrestation, se réfugie chez les parents de sa fiancée et décide de rejoindre les FTP-MOI. D’abord affecté au 2e détachement, essentiellement composé de Juifs polonais, il rejoint en juillet 1943 le détachement des dérailleurs sous le pseudonyme de « Julien ».

Selon les rapports des brigades spéciales, chargées de la traque des résistants, Léon Goldberg participe à 12 déraillements ou tentatives de sabotage de chemins de fer.

Après la destruction d’un train de marchandises allemand sur la ligne Paris-Troyes, à Grandpuits (Seine-et-Marne), il est arrêté le 26 octobre par les brigades spéciales après plusieurs semaines de filature. Il est torturé puis emprisonné à Fresnes, après avoir été livré aux Allemands. C’est au lendemain de son 20e anniversaire que s’ouvre le procès des FTP-MOI de la région parisienne. Condamné à mort, il est fusillé le 21 février 1944. Il est reconnu « Mort pour la France » le 15 février 1949.


Szlama Grzywacz : le juif Polonais n’est reconnu « Mort pour la France » que le 18 février 2023

EN 1940, SZLAMA GRZYWACZ A TROUVÉ REFUGE AU SEIN DE LA FAMILLE
 D’HENRI KRASCUKI, FUTUR SECRÉTAIRE GÉNÉRAL DE LA CGT.
PHOTO MUSÉE DE LA RÉSISTANCE NATIONALE, CHAMPIGNY-SUR-MARNE

Szlama Grzywacz est né à Dobre en Pologne le 8 décembre 1910 dans une famille juive religieuse. Issu d’un milieu modeste, il entre très vite dans la vie active au sein de la cordonnerie familiale. Il est engagé à 15 ans au sein des Jeunesses communistes, et sa famille lui permet d’accueillir des réunions clandestines dans leur foyer. Toutefois, surveillé par la police du régime autoritaire de Pilsudski, il est arrêté en 1931.

Par Jean Vigreux, historien

Après quelques années de prison, il ressort plus combatif que jamais, mais doit quitter la Pologne en 1937 et arrive en France en mai comme clandestin.

Arrêté en juin, il doit être expulsé, mais trouve refuge au sein de la famille d’Henri Krasucki. Le jeune militant communiste polonais, marqué par l’antifascisme, s’engage au sein des Brigades internationales et combat en Espagne jusqu’à la fin de la guerre civile.

Interné dans les camps de Gurs et d’Argelès, il s’évade et rejoint Paris, où il milite clandestinement au sein des syndicats de la fourrure où se concentrent de nombreux travailleurs juifs. Puis il rejoint en 1942 les FTP-MOI (matricule 10157) et participe à de nombreuses opérations armées.

Il est arrêté fin novembre 1943 et jugé en février 1944 avant d’être fusillé le 21. Apparaissant comme premier médaillon en photographie sur l’Affiche rouge, « Grzywacz, juif polonais, 2 attentats », n’est reconnu « Mort pour la France » que le 18 février 2023.


Stanislas Kubacki : le militant communiste polonais échappe deux fois à l’arrestation

EN 1942, INTERPELLÉ UNE PREMIÈRE FOIS,
STANISLAS KUBACKI RÉUSSIT À S’ÉCHAPPER.

Né en Pologne le 2 mai 1908, Stanislas Kubacki quitte son pays pour la France en 1925. Il habite dans le Pas-de-Calais et se marie à 22 ans, avec Geneviève Klébek, et a un fils. La famille quitte la région et s’installe en banlieue parisienne, à Livry-Gargan. Il milite au PCF. Condamné à trois reprises en 1936 pour « vol, coups et blessures, port d’arme, défaut de carnet, rébellion », il doit être expulsé.

Par Jean Vigreux, historien

Militant convaincu, il s’engage dans les Brigades internationales, puis est interné au camp du Vernet, en Ariège, et à Gurs. Ensuite, il est déporté, mais arrive à s’évader et rejoint les FTP-MOI. Interpellé le 12 mai 1942 par la police, qui saisit des tracts et documents du PCF clandestin, il arrive encore une fois à s’échapper.

Au cours de l’année, il participe à de nombreuses actions, comme l’attaque d’une ferme à Arnouville-lès-Gonesse avec Gustave Migatulski.

Toutefois, il est arrêté à nouveau en décembre 1942 par la BS et transféré rue des Saussaies au Sipo-SD (Sicherheitspolizei und Sicherheitsdienst, police de la sûreté et service de sécurité), communément appelé Gestapo. Il est ensuite conduit à la prison de Fresnes. Jugé et condamné à mort, il est fusillé le 21 février 1944.

En sa mémoire, un bataillon polonais combattant lors de la Libération de Paris porte le nom de Stanislas Kubacki. Il est reconnu « Mort pour la France » le 28 novembre 1945.


Cesare Luccarini : l’antifasciste italien adhère aux Jeunesses communistes en 1940

CESARE LUCCARINI A PARTICIPÉ À DE NOMBREUSES
 OPÉRATIONS ENTRE SEPTEMBRE ET NOVEMBRE 1943.

Né le 24 février 1922 à Castiglione dei Pepoli, en Italie, dans une famille antifasciste, Cesare Luccarini rejoignit son père à Pont-à-Vendin, dans le Pas-de-Calais, en 1930 avec sa mère et ses sœurs. Après l’obtention de son certificat d’études, il est embauché comme ouvrier cimentier dans le génie civil à Lille.

Par David Noël, historien

Il adhère aux Jeunesses communistes en août 1940 dans la clandestinité. Arrêté en février 1942, il est condamné à deux ans de prison par la cour spéciale de Douai pour distribution de tracts. Incarcéré dix-huit mois à la prison de Cuincy puis au camp de travail de Watten-Éperlecques dans le Pas-de-Calais, il s’en évade en août 1943 à la suite d’un bombardement de la Royal Air Force.

Emmené à Paris par Eugène Martinelli, il intègre le 3e détachement italien des FTP-MOI sous la fausse identité de « Marcel Châtelain » et participe à de nombreuses opérations entre septembre et novembre 1943, comme l’assassinat le 17 septembre de l’horloger Tagliaferi, qui avait dénoncé plusieurs antifascistes italiens, ou l’attaque à la grenade au Café de l’autobus contre des soldats allemands le 25.

Le 12 novembre, il participe en protection à l’attaque d’un transporteur de fonds allemand rue Lafayette lors de laquelle Robert Witchitz et Rino Della Negra sont arrêtés.

Arrêté le 13 novembre par les inspecteurs de la BS2, il comparaît le 18 février 1944 devant le tribunal du Gross Paris, qui le condamne à mort. Cesare Luccarini est fusillé le 21 février 1944 à 15 h 29 au Mont-Valérien. Il est reconnu « Mort pour la France » le 18 avril 1946.


Armenak Arpen Manoukian : de retour du STO, il intègre le groupe Manouchian

ARPEN ABRAMOVITCH TAVITIAN S’EXILE EN FRANCE EN 1937

Arpen Tavitian est vraisemblablement né le 5 novembre 1895 à Alégouchen, aujourd’hui Azadachen, alors dans l’Empire russe, désormais en Arménie. Il travaille dès l’âge de 14 ans comme mécanicien puis comme typographe. Il rejoint le Parti bolchevique de Géorgie en 1917, puis l’Armée rouge en 1918, au sein de laquelle il participe à la bataille de Bakou.

Par Léo Rosell, historien

D’abord simple soldat, il devient officier et commissaire politique en 1920. Cette ascension l’incite à participer plus activement au PCUS (Parti communiste de l’Union soviétique) , en particulier auprès du comité central d’Arménie, de Géorgie et d’Azerbaïdjan. Il en est toutefois exclu à la fin de l’année 1927 pour être une figure de l’opposition de gauche au stalinisme.

Après de nombreux passages en prison, et sous la surveillance du Guépéou (police politique), il parvient grâce à une souscription à s’exiler en France en 1937, où il trouve refuge dans les milieux trotskistes.

À Paris, il se rapproche toutefois rapidement des communistes arméniens. Il part travailler en Allemagne du 14 janvier 1941 au 26 mars 1942. À son retour, il tisse des liens avec Missak Manouchian, qui l’intègre aux FTP-MOI. Il commence alors son action résistante, participant à des déraillements ou à des attaques à la grenade. Au cours d’une opération ratée visant Gaston Bruneton, directeur de la main-d’œuvre française en Allemagne, le 5 octobre 1943, il est blessé et soigné pendant plusieurs semaines par Mélinée Manouchian.

Le 19 novembre 1943, il est arrêté par les brigades spéciales à son domicile, 200, rue de Belleville, à Paris, puis fusillé le 21 février 1944 au Mont-Valérien à 44 ans. Sur sa tombe, dans le carré réservé aux membres du groupe Manouchian au cimetière parisien d’Ivry, une plaque de la République socialiste d’Arménie lui rend hommage. Il est reconnu « Mort pour la France » le 18 septembre 1972.


Marcel Rajman : le juif polonais de 20 ans abat le général SS Julius Ritter

MARCEL RAJMAN, ARRIVÉ À L’ÂGE DE 8 ANS EN FRANCE, INTÈGRE LE
 2ème DÉTACHEMENT JUIF FTP-MOI SOUS LE PSEUDONYME DE « MICHEL ».

Né en 1923 à Varsovie, Marcel Rajman arrive en France avec ses parents à l’âge de 8 ans. À 10 ans, il entre au Yiddisher Arbeiter Sport Club (Yask), affilié à la Fédération sportive et gymnique du travail (FSGT). Après avoir obtenu son certificat d’études, il commence à travailler avec ses parents comme ouvrier tricoteur.

Par David Noël, historien

Son père, Moszek, militant communiste, est raflé en décembre 1941 et déporté le 22 juin 1942 vers Drancy, puis Auschwitz où il est gazé.

Membre de l’Union de la jeunesse Juive, animée par Henri Krasucki, Marcel Rajman appartenait au 2ème détachement juif FTP-MOI sous le pseudonyme de « Michel ». Il participe à plusieurs attentats contre les Allemands, notamment celui du 27 février 1943 contre l’hôtel Saint-Honoré, celui du 3 juin 1943 rue Mirabeau contre un autocar transportant des marins allemands ou celui du 28 juillet contre l’automobile du lieutenant-colonel Ratibor.

Le 28 septembre 1943, c’est Marcel Rajman qui parvient à abattre Julius Ritter, le général SS responsable de l’envoi des jeunes Français pour le STO en Allemagne. Marcel Rajman participe encore le 22 octobre avec Celestino Alfonso au grenadage du café la Terrasse, où l’armée allemande avait ses habitudes.

Arrêté le 16 novembre par les inspecteurs de la BS2, il comparaît le 18 février 1944 devant le tribunal du Gross Paris, qui le condamne à mort. Sa mère, Chana, arrêtée elle aussi, est déportée et assassinée à Auschwitz. Marcel Rajman est fusillé le 21 février 1944 à 15 h 40 au Mont-Valérien. Il est reconnu « Mort pour la France » le 17 avril 1972.


Roger Rouxel : « Léon » rejoint les FTP-MOI à l’âge de 16 ans

À L’ÂGE DE 16 ANS, ROGER ROUXEL
MÈNE SES PREMIÈRES OPÉRATIONS.

Né à Paris le 3 novembre 1925, Roger Rouxel grandit à Vitry-sur-Seine. Après avoir obtenu son certificat d’études primaires, il travaille comme tourneur sur métaux à l’usine de construction mécanique Texier-Dufor, à Ivry-sur-Seine.

Par Corentin Lahu, historien

Sur proposition de Robert Witchitz, un ancien camarade d’école, Roger Rouxel rejoint les FTP-MOI en mars 1943, à l’âge de 16 ans. Sous le pseudonyme de « Léon », il est affecté au 3e détachement, composé majoritairement d’Italiens.

Le 13 mars 1943, il mène sa première action en assurant la protection de ses camarades lors de l’attaque d’un garage allemand à Paris. Dans les mois suivants, il participe à d’autres attentats à la grenade ciblant les forces d’occupation : le 15 juin contre un débit de boissons parisien fréquenté par des militaires italiens, le 9 juillet dans un hôtel réquisitionné à Noisy-le-Sec, le lendemain contre la Feldkommandantur à Choisy-le-Roi ou encore le 25 septembre dans un café parisien accueillant des soldats allemands.

Le 11 août, il accompagne Robert Witchitz porte de Saint-Ouen pour exécuter un membre du parti franciste qui avait fait emprisonner des communistes. Les deux anciens camarades de classe réitèrent l’opération le 4 septembre en tuant un soldat allemand près de a porte d’Ivry.

Roger Rouxel est arrêté le 14 novembre, deux jours après l’attaque d’un convoyeur de fonds allemand qui tourne mal. Torturé par les brigades spéciales puis livré aux Allemands, il est condamné à mort et fusillé le 21 février 1944. Il est reconnu « Mort pour la France » le 14 décembre 1945.

Antoine Salvadori : l’Italien attaque une maison de tolérance fréquentée par les Allemands

ANTONIO SALVADORI PARTICIPE EN SEPTEMBRE 1943
À L’ATTENTAT À LA GRENADE D’UNE MAISON DE
TOLÉRANCE FRÉQUENTÉE PAR DES ALLEMANDS.

Né le 13 juin 1920 à San Gregorio Parmense en Italie, Antoine Salvadori travaille comme cimentier, avant de devenir mineur à Lens. Pour éviter d’être mobilisé en Italie, il quitte la région pour Paris avec l’aide d’Eugène Martinelli, secrétaire régional de l’Union populaire italienne (UPI) avant guerre.

Par Léo Rosell, historien

Il travaille à partir du 1er septembre 1943 comme plongeur à l’organisation Todt, groupe de génie civil et militaire allemand. Il loge alors dans un hôtel au 30, avenue de Choisy, dans le 13e arrondissement de Paris.

Son engagement dans la Résistance s’intensifie, sous le pseudonyme de « Tony ». Il se rapproche alors de Paliero Martinelli, dit « Arthur », le fils d’Eugène Martinelli. Avec Cesare Luccarini, proche lui aussi d’Eugène Martinelli, il participe en septembre 1943 à l’attentat à la grenade d’une maison de tolérance fréquentée par des Allemands.

Le 12 novembre, il fait partie, avec entre autres Rino Della Negra et Robert Witchitz, de l’équipe qui attaque un convoyeur de fonds allemand, rue Lafayette, et qui entraîne la mort d’un Allemand. Peu de temps après, il est interpellé à son domicile par les brigades spéciales.

Torturé lors des interrogatoires, il est fusillé au Mont-Valérien le 21 février 1944 à seulement 23 ans, et inhumé dans le carré des fusillés du cimetière parisien d’Ivry-sur-Seine. Il fait par ailleurs partie des 11 membres du groupe Manouchian à recevoir la médaille de la Résistance à titre posthume, par un décret du 31 mars 1947. Il est reconnu « Mort pour la France » le 18 décembre 1945.

Willy Schapiro : de Pologne en Palestine, en passant par l’Autriche

SALOMON SCHAPIRO SABOTE LA VOIE FERRÉE
PARIS-TROYES DANS LA NUIT
DU 25 AU 26 OCTOBRE 1943.

Salomon Schapiro, dit Willy Schapiro, est né le 25 mai 1910 à Skala (Pologne) dans une famille juive de petits commerçants. D’abord séduit par le sionisme, il part en Palestine au début des années 1930. Sur place, il adhère toutefois au Parti communiste. Après une arrestation en 1931 et deux ans de prison, il part pour Vienne en 1933, où il milite au PC. Après l’Anschluss, en 1938, il quitte Vienne pour Paris, où il milite dans la MOI.

Par Zoé Grumberg, historienne

Pendant la guerre, il est affecté à la sous-section juive de la MOI. Fourreur, il est actif dans le mouvement syndical. Après l’invasion de l’URSS par les nazis le 22 juin 1941, il organise le sabotage de machines.

En février 1943, il rejoint le secrétariat de la commission intersyndicale juive auprès de la CGT. En avril-mai 1943, lors de l’insurrection du ghetto de Varsovie, il organise des réunions lors desquelles il appelle à intensifier la lutte contre les nazis. En juillet 1943, il est muté au 2e détachement des FTP-MOI puis dans le 4e détachement dit des dérailleurs.

En octobre 1943, il participe à un certain nombre d’actions de sabotage de voies ferrées. Dans la nuit du 25 au 26 octobre, avec six combattants, il sabote la voie ferrée sur la ligne Paris-Troyes, en Seine-et-Marne. Trois combattants sont arrêtés par la police le 27 octobre : Amedeo Usseglio, Léon Goldberg et Willy Schapiro.

Transférés et interrogés dans les locaux des brigades spéciales, ils sont torturés avant d’être livrés aux Allemands et incarcérés à Fresnes. Jugé le 18 février 1944 devant le tribunal du Gross Paris, Willy Schapiro est condamné à mort et fusillé au Mont-Valérien le 21 février 1944. Il est reconnu « Mort pour la France » le 28 juin 1971.


Amedeo Usseglio : le communiste italien est spécialiste des déraillements

AMEDEO USSEGLIO A PARTICIPÉ À L’ATTENTAT À LA GRENADE
 DE LA PERMANENCE DU PARTI POPULAIRE FRANÇAIS.

Né le 4 décembre 1911 à Giaveno, en Italie, Amedeo Usseglio arrive en France en 1930, à l’âge de 19 ans, s’installe dans la commune du Plessis-Robinson (Seine, actuellement Hauts-de-Seine) et commence à travailler comme ouvrier maçon.

Par Léo Rosell, historien 

Adhérent du Parti communiste, il est réfractaire au STO en janvier 1943 et rejoint le 3ème détachement, celui des Italiens, des FTP-MOI de la région parisienne en juillet 1943, sous le pseudonyme de « Robert ».

Devenu permanent, il dispose d’un logement clandestin au 9, rue des Messageries, dans le 10e arrondissement de Paris. Parmi les actions auxquelles il prend part, citons l’attentat à la grenade le 9 septembre 1943 de la permanence du Parti populaire français (PPF) rue Lamarck, à Paris, ou celui du 5 octobre contre un détachement allemand place de l’Odéon.

Par ailleurs, Amedeo Usseglio était spécialisé dans le déraillement de trains. Dans la nuit du 25 au 26 octobre, il participe au déraillement d’un train de marchandises sur la ligne Paris-Troyes à Grandpuits, entraînant la destruction de la locomotive et de 24 wagons. Toutefois, il est arrêté avec Léon Goldberg et Willy Chapiro à proximité des lieux, en possession d’armes, de matériel de sabotage et de faux papiers.

Soumis à la torture de la BS2, il est incarcéré à Fresnes puis livré aux Allemands, qui l’exécutent le 21 février 1944 au Mont-Valérien à 32 ans. Il est inhumé au cimetière communal du Plessis-Robinson, une rue de la ville et le monument aux morts portent également son nom. Il est reconnu « Mort pour la France » le 22 juin 2005.


Wolf Wajsbrot : après la rafle de ses parents, le jeune juif polonais rejoint la MOI

WOLF WAJSBROT A QUITTÉ LA POLOGNE AVEC
SA FAMILLE POUR FUIR L’ANTISÉMITISME.

Wolf Wajsbrot est né le 3 mars 1925 à Krasnik (Pologne) dans une famille juive. Arrivé à Paris avec sa famille dans les années 1930 pour fuir l’antisémitisme et les difficultés économiques en Pologne, il grandit au 153, avenue de Paris à Ivry-sur-Seine. Il apprend le métier de mécanicien et adhère aux Jeunesses communistes.

Par Zoé Grumberg, historienne

En 1942, ses parents sont arrêtés lors de la rafle du Véld’Hiv et déportés à Auschwitz, où ils sont assassinés. Wolf rejoint la MOI à la fin de l’année 1942. En janvier 1943, avec le 2e détachement FTP-MOI, il participe à l’attaque d’un groupe d’Allemands avenue Lowendal à Paris. En juillet 1943, il est muté au 4ème détachement, dit des dérailleurs. En août 1943, il participe à plusieurs actions (déboulonnage de voies ferrées, déraillement de trains).

Le 17 novembre 1943, Wolf fait partie des 67 membres des FTP-MOI et de la MOI interpellés par la brigade spéciale n° 2 (BS2).

Son groupe est filé par les brigades spéciales. Le 18 octobre, les policiers des brigades spéciales identifient Joseph Dawidowicz, le commissaire politique des FTP-MOI de la région parisienne, trésorier et responsable des effectifs. Le 26 octobre, Joseph Dawidowicz est arrêté à la gare de Conflans-Sainte-Honorine.

Les policiers perquisitionnent ses planques et découvrent des listes d’effectifs, des comptes rendus d’activité de la MOI, des ordres du jour des FTP et un état numérique des divers détachements. Le 17 novembre, Wolf fait partie des 67 membres des FTP-MOI et de la MOI interpellés par la brigade spéciale n° 2 (BS2). Interrogé, il reconnaît cinq sabotages de voies ferrées avant d’être livré aux Allemands et emprisonné à Fresnes.

Il est jugé avec 22 autres accusés le 18 février 1944 devant le tribunal du Gross Paris. Condamné à mort, il est fusillé le 21 février au Mont-Valérien. Il est reconnu « Mort pour la France » le 26 février 1956.


Robert Witchitz : Il fuit le STO pour rejoindre les FTP-MOI

ROBERT WITCHITZ EST NÉ À ABSCON, DANS LE NORD.
FILS DE GUSTAVE, COMMERÇANT NÉ EN POLOGNE, ET DE
LOUISE,  NÉE BOURSAULT, ROBERT WITCHITZ EST ÉLEVÉ
PAR  SES GRANDS-PARENTS JUSQU’À L’ÂGE DE 4 ANS,
 AVANT DE PARTIR VIVRE AVEC SES PARENTS À IVRY-SUR-SEINE.

Après son certificat d’études, il devient télégraphiste. Licencié, il travaille dans une distillerie avant de devenir ajusteur à l’usine de construction mécanique Texier-Dufor. Il devient militant dans les Jeunesses communistes à Ivry-sur-Seine.

Par David Noël, historien

Réquisitionné dans le cadre du STO pour aller travailler en Allemagne, il rejoint le 3e détachement, celui des Italiens, des FTP-MOI sous le pseudonyme de « René » en février 1943.

Il participe à une dizaine d’opérations et d’attentats. Le 11 août 1943, c’est Robert Witchitz qui abat de quatre balles José Delaplace, un membre du parti franciste qui avait fait emprisonner des communistes.

Le 4 septembre, Roger Rouxel et Robert Witchitz tuent le soldat allemand Hubert Schonfelder près de la porte d’Ivry. Le 17 septembre Witchitz abat l’horloger Tagliaferi, dénonciateur de plusieurs antifascistes italiens. Le 12 novembre, Robert Witchitz participe aux côtés de Rino Della Negra à une attaque contre un convoyeur de fonds allemand lors de laquelle il est blessé.

Arrêté le 19 novembre par les inspecteurs de la BS2, il comparaît le 18 février 1944 devant le tribunal du Gross Paris, qui le condamne à mort. Robert Witchitz est fusillé le 21 février 1944 à 15 h 22 au Mont-Valérien. Il est reconnu « Mort pour la France » le 22 février 1946.

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Manouchian, le boss au Panthéon


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