En Amérique du Sud, le chemin vers la réparation des crimes commis par les dictatures apparaît long et tortueux. Les défenseurs des droits humains doivent composer avec les nombreux obstacles semés par les despotes avant leur départ ou introduits dans le système judiciaire par les régimes démocratiques, sous la pression des militaires. Sans compter que l’ampleur des crimes ne facilite pas la tâche.
Assassinats, torture, enlèvements, disparitions, vols de bébés, la liste des exactions commises au nom du rétablissement de l’ordre s’allonge, à l’instar des procédures judiciaires entreprises contre les tortionnaires. Au chapitre de la lutte contre l’impunité, le Chili, l’Argentine et l’Uruguay forment chacun un exemple distinct. Ils figurent parmi les premiers États à entreprendre des mesures punitives contre ceux qui ont assujetti l’Amérique du Sud par la force des armes et de la terreur.
Le Chili fait le deuil de ses espoirs
Au grand désarroi de ceux qui auraient voulu voir Augusto Pinochet finir ses jours en prison, le vieux caudillo s’est faufilé comme une vipère, échappant à l’étau judiciaire qui se refermait sur lui. Un double pied de nez au destin, puisqu’il a passé l’arme à gauche le 10 décembre, journée international des droits humains.
Le décès d’Augusto Pinochet constitue un revers pour tous ceux qui luttent contre l’impunité des anciens tortionnaires sud-américains. Avec les années, l’ex-dictateur Pinochet était devenu la figure emblématique des dictatures qui ont ensanglanté l’Amérique du Sud, en particulier durant les années 70. En mourant tranquillement dans son lit, Augusto Pinochet n’a pas seulement échappé à la Justice. Il a privé les défenseurs des droits humains d’une victoire dont ils auraient bien eu besoin, à l’heure où tout le continent tente d’assumer son douloureux passé.
Seize ans après la fin de la dictature, entre les gémissements de ceux qui pleuraient la mort de Pinochet devant l’hôpital militaire et les démonstrations de joie partout dans les rues de Santiago, c’est un souvenir douloureux qui refaisait surface. « Les gens se remémoraient, en l’espace de quelques heures, la souffrance, l’humiliation, la douleur, les pertes d’amis, le coup dur qui avait été donné au mouvement populaire, la dispersion, l’exil », affirme Isabel Orellan, réfugiée politique aujourd’hui professeure à l’UQAM.
Un rapport officiel chiffre à 3197 le nombre de morts ou disparus sous la main de fer de Pinochet. Plus de 28 000 autres auraient subi la torture.
Depuis quelques années, même si les preuves s’accumulaient contre lui, Augusto Pinochet n’a jamais plié l’échine. Déjà, pendant la dictature, il avait fait voter une loi amnistiant les délits commis au plus fort de la répression, entre 1973 et 1978. Il avait ensuite consolidé son héritage en modifiant la Constitution, en 1980. Même s’il dut quitter le pouvoir en 1988, il resta à la tête de l’armée de terre et s’autoproclama sénateur à vie par la suite, s’arrogeant du même coup l’immunité parlementaire.
La détention d’Augusto Pinochet à Londres, en 1998, a donné un premier coup de pouce à ceux qui réclamaient sa mise en accusation. « L’arrestation a tout changé parce qu’à partir de ce moment, Pinochet a perdu de facto son poste de sénateur, affirme le professeur au département d’histoire de l’UQAM, José del Pozo. Petit à petit, on a commencé à miner sa carapace et, parallèlement, beaucoup d’autres causes ont commencé à avancer. » Il parviendra toutefois, prétextant sa santé défaillante, à se soustraire à la justice.
Avec le temps, l’image du grand-père bonasse que s’était forgée l’ex-dictateur a été minée par les accusations de meurtres, torture et corruption. « Une autre chose qui a été très importante fut la découverte de ses comptes de banque à l’extérieur du pays, souligne José del Pozo. Avant, on pouvait dire qu’il avait été un dictateur, mais qu’il avait été honnête. Avec ce nouvel élément, l’honnêteté disparaissait. (...) Dernièrement, des juges ne tenaient plus compte de sa prétendue [incapacité mentale]. D’ici un an il aurait peut-être été condamné. »
Bien que la présidente chilienne Michelle Bachelet ait signifié son intention de révoquer l’amnistie des tortionnaires, à ce jour, seulement vingt militaires et civils ont été écroués pour violations de droits humains commises sous la dictature chilienne.
Assassinats, torture, enlèvements, disparitions, vols de bébés, la liste des exactions commises au nom du rétablissement de l’ordre s’allonge, à l’instar des procédures judiciaires entreprises contre les tortionnaires. Au chapitre de la lutte contre l’impunité, le Chili, l’Argentine et l’Uruguay forment chacun un exemple distinct. Ils figurent parmi les premiers États à entreprendre des mesures punitives contre ceux qui ont assujetti l’Amérique du Sud par la force des armes et de la terreur.
Le Chili fait le deuil de ses espoirs
Au grand désarroi de ceux qui auraient voulu voir Augusto Pinochet finir ses jours en prison, le vieux caudillo s’est faufilé comme une vipère, échappant à l’étau judiciaire qui se refermait sur lui. Un double pied de nez au destin, puisqu’il a passé l’arme à gauche le 10 décembre, journée international des droits humains.
Le décès d’Augusto Pinochet constitue un revers pour tous ceux qui luttent contre l’impunité des anciens tortionnaires sud-américains. Avec les années, l’ex-dictateur Pinochet était devenu la figure emblématique des dictatures qui ont ensanglanté l’Amérique du Sud, en particulier durant les années 70. En mourant tranquillement dans son lit, Augusto Pinochet n’a pas seulement échappé à la Justice. Il a privé les défenseurs des droits humains d’une victoire dont ils auraient bien eu besoin, à l’heure où tout le continent tente d’assumer son douloureux passé.
Seize ans après la fin de la dictature, entre les gémissements de ceux qui pleuraient la mort de Pinochet devant l’hôpital militaire et les démonstrations de joie partout dans les rues de Santiago, c’est un souvenir douloureux qui refaisait surface. « Les gens se remémoraient, en l’espace de quelques heures, la souffrance, l’humiliation, la douleur, les pertes d’amis, le coup dur qui avait été donné au mouvement populaire, la dispersion, l’exil », affirme Isabel Orellan, réfugiée politique aujourd’hui professeure à l’UQAM.
Un rapport officiel chiffre à 3197 le nombre de morts ou disparus sous la main de fer de Pinochet. Plus de 28 000 autres auraient subi la torture.
Depuis quelques années, même si les preuves s’accumulaient contre lui, Augusto Pinochet n’a jamais plié l’échine. Déjà, pendant la dictature, il avait fait voter une loi amnistiant les délits commis au plus fort de la répression, entre 1973 et 1978. Il avait ensuite consolidé son héritage en modifiant la Constitution, en 1980. Même s’il dut quitter le pouvoir en 1988, il resta à la tête de l’armée de terre et s’autoproclama sénateur à vie par la suite, s’arrogeant du même coup l’immunité parlementaire.
La détention d’Augusto Pinochet à Londres, en 1998, a donné un premier coup de pouce à ceux qui réclamaient sa mise en accusation. « L’arrestation a tout changé parce qu’à partir de ce moment, Pinochet a perdu de facto son poste de sénateur, affirme le professeur au département d’histoire de l’UQAM, José del Pozo. Petit à petit, on a commencé à miner sa carapace et, parallèlement, beaucoup d’autres causes ont commencé à avancer. » Il parviendra toutefois, prétextant sa santé défaillante, à se soustraire à la justice.
Avec le temps, l’image du grand-père bonasse que s’était forgée l’ex-dictateur a été minée par les accusations de meurtres, torture et corruption. « Une autre chose qui a été très importante fut la découverte de ses comptes de banque à l’extérieur du pays, souligne José del Pozo. Avant, on pouvait dire qu’il avait été un dictateur, mais qu’il avait été honnête. Avec ce nouvel élément, l’honnêteté disparaissait. (...) Dernièrement, des juges ne tenaient plus compte de sa prétendue [incapacité mentale]. D’ici un an il aurait peut-être été condamné. »
Bien que la présidente chilienne Michelle Bachelet ait signifié son intention de révoquer l’amnistie des tortionnaires, à ce jour, seulement vingt militaires et civils ont été écroués pour violations de droits humains commises sous la dictature chilienne.