Bonjour, je veux faire un peu de tourisme ici au Chili.Je n'ai pas besoin de visa, car je suis péruvien.Désole mais vous êtes arrêté. Comme dit-vous? Je pas comprendre, je me sent Japonais.
Le séjour d’Alberto Fujimori au Chili depuis cinq cent trente jours s’apparente davantage à une villégiature qu’à un exil forcé. L’ancien président est en réalité parfaitement libre de ses allées et venues. Alors que le processus d’extradition s’accélère, on craint qu’il ne cherche à se réfugier à l’ambassade du Japon.
L’équipe chargée de le surveiller a d’ailleurs récemment été renforcée. Omar Chehade, chef de l’unité d’extradition du ministère de la Justice, a même déclaré que “la prochaine prison de Fujimori risquait d’être l’ambassade du Japon au Chili”. Il a aussi révélé qu’une équipe des services secrets chiliens ne “le lâchait pas d’une semelle”. Mais ce qui inquiète vraiment Santiago et Lima, c’est que Fujimori jouit encore d’un certain pouvoir au Pérou. Avec une assise politique forte de 15 parlementaires (dont sa fille Keiko Sofía) et un soutien solide dans les régions rurales qui ont obtenu l’eau et l’électricité sous son mandat, l’ancien président, s’il rentre dans son pays, pourrait mettre fin à la lune de miel entre l’APRA d’Alan García et le Sí Cumple, parti fujimoriste. Ces deux mouvements, opposés idéologiquement, ont fait alliance contre l’Unión por el Perú d’Ollanta Humala. Voilà pourquoi, au ministère des Affaires étrangères chilien, personne n’ignore que la meilleure solution pour le gouvernement péruvien serait le départ de Fujimori pour le Japon. “L’APRA a examiné plusieurs solutions pour qu’il n’arrive jamais à Lima – convaincre la justice ou encore lui donner cinq minutes d’avance [le temps qu’il faut pour aller de son domicile à l’ambassade du Japon]”, révèle une source proche des Affaires étrangères. Selon José Rodríguez Elizondo, un ancien diplomate qui a vécu plusieurs années au Pérou, “la détention de Fujimori au Chili est comme une grenade dégoupillée dont tout le monde s’écarte. L’ancien président jouit encore d’un certain soutien politique. A l’instar de Pinochet, sa condamnation ne fait pas l’unanimité au Pérou.” Alberto Fujimori est accusé du massacre de civils à l’université de La Cantuta [un professeur et neuf étudiants tués par les services secrets en 1992] et dans le quartier de Barrios Altos [15 personnes assassinées par un commando policier en 1991]. Felipe Saleh, Luis Narváez et Andrés López La Nación