26 septembre, 2007

PÉROU: ARRIVÉE À LIMA DE L'EX-PRÉSIDENT FUJIMORI EXTRADÉ DU CHILI


 FUJIMORI EXTRADÉ
L'ex-président péruvien Alberto Fujimori, extradé du Chili, est arrivé samedi au Pérou où il est passible de 30 ans de prison pour atteintes aux droits de l'Homme pendant la lutte contre la guérilla maoïste du Sentier lumineux.
Après sept ans d'absence et une longue bataille juridique perdue au Chili où il avait été arrêté en novembre 2005, l'ancien homme fort du Pérou a été rattrapé par son passé avec la décision vendredi de la Cour suprême du Chili de l'extrader vers le Pérou, la justice de son pays l'accusant de corruption et de violation des droits de l'Homme.

M. Fujimori est arrivé samedi après-midi à 21H40 GMT à bord d'un Antonov sur la base aérienne militaire de Las Palmas au sud de Lima. Il a été rapidement transféré par hélicoptère dans une caserne de la police où il doit séjourner quelques temps. Un vaste dispositif policier a empêché les journalistes d'approcher de l'avion ou de l'hélicoptère.

L'ancien chef d'Etat avait quitté la capitale chilienne samedi matin à bord d'un avion de la police péruvienne. Le vieil Antonov a fait des escales techniques avant d'arriver à Lima. Selon la télévision, M. Fujimori aurait été victime d'une légère baisse de tension lors d'une escale technique.

A l'aéroport civil Jorge Chavez de Lima, des affrontements ont opposé samedi quelque centaines de partisans de M. Fujimori aux forces de sécurité déployées sur place. Les manifestants, qui croyaient que l'ex-président allaient arriver sur cet aéroport, ne cachaient pas leur déception. Sa fille, la députée Keiko Fujimori, avait pourtant les sympathisants à manifester pour lui souhaiter la bienvenue.

Les quelques centaines de sympathisants avaient bien préparé une fête avec des mariachis, les chanteurs mexicains, et des danses mais ils furent déçus lorsqu'on annonça l'atterrissage de l'avion sur une base militaire éloignée. "On ne va pas y toucher", s'exclama Juana Macedo, une vendeuse ambulante qui, en pensant au sort de M. Fujimori, retenait à peine ses larmes. "On nous a roulés, c'est la faute d'Alan Garcia (le président péruvien) marmonnait Jessica Alarcon en pleurant, en écoutant les mariachis entonner le célèbre "Volver, Volver" (revenir...), une chanson de circonstances.

L'ancien homme fort du Pérou va séjourner quelque temps dans une caserne de la direction des opérations spéciales de la police (Diroes) à Vitarte, à l'est de Lima. Une grande chambre aux vitres blindées et sans télévision et un petit bureau y ont été aménagés pour lui. Le retour d'Alberto Fujimori représente un cadeau empoisonné pour l'actuel président Alan Garcia. N'ayant pas de majorité au parlement, le parti gouvernemental APRA a dû s'allier avec les 13 députés de l'Alliance pour l'avenir, la formation politique de M. Fujimori.

Après 22 mois passés au Chili, pour la plupart du temps placé en résidence surveillée, l'ancien président (1990-2000) doit faire face au Pérou à un procès où il risque dix ans de prison pour des cas de corruption et trente ans pour des violations des droits de l'Homme.

Il est accusé d'avoir ordonné la formation d'escadrons de la mort, composés de militaires, et d'avoir couvert leurs activités. Ces escadrons ont participé à deux tueries dont le bilan s'élève à quinze morts en 1991 et 1992. Parmi les victimes figuraient des femmes, des étudiants, un professeur et un enfant. Ayant dirigé le pays d'une main de fer, M. Fujimori a envoyé dans les années 1990 l'armée combattre la guérilla maoïste, une guerre qui a fait, selon les organisations des droits de l'Homme, 70.000 morts et disparus.

Dans tous ces dossiers, l'accusation devra prouver que l'ancien président a eu un lien avec les escadrons de la mort.

La justice péruvienne veut mener rondement le procès, en bouclant l'affaire en quelques mois, tandis que les avocats de M. Fujimori vont essayer de jouer la montre afin de retarder le verdict aussi longtemps que possible.

Agé de 69 ans, M. Fujimori pourrait échapper à la prison au moment où il atteindra 70 ans. La législation péruvienne accorde des remises de peine à cet âge et autorise les condamnés à purger leur peine à leur domicile.a