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Rio, Pékin... Dominique Strauss-Kahn a parcouru des milliers de kilomètres pour convaincre qu'un socialiste proposé par Sarkozy et les pays du Nord serait un patron du FMI soucieux des intérêts du Sud. Récit
Quand il est rentré à son hôtel, l'autre jour à Washington, il s'est fait applaudir par des touristes français en goguette. Dominique Strauss-Kahn a souri et un peu plus que ça. Il sortait du Fonds monétaire international, venait de boucler son grand oral, dans cette maison qui sera la sienne, désormais, sauf tremblement de terre... Et la France se rappelait à lui, comme si ? Comme si rien. Pour l'instant, rideau ! Et sans regret. Depuis des années, DSK se languissait dans la suave médiocrité du Parti socialiste. Finies les petites blagues de Hollande, plus jamais les évangiles de Ségolène... Terminées les sections, à lui le monde ! Il y a quelques semaines, quand les socialistes ratiocinaient à La Rochelle, DSK mettait cap au Sud pour convaincre les latinos qu'il serait le plus juste des patrons du Fonds monétaire international. La Paz, dans la Bolivie de l'altermondialiste Morales. Une idée du Brésilien Lula, cette visite dans les Andes, où une bouteille à oxygène l'attendait dans sa chambre d'hôtel. Et Kirchner, l'homme du miracle argentin, et Michelle Bachelet, la socialiste chilienne...
Son univers désormais. Les gens responsables, qui portent sur leurs épaules le destin des peuples, et cet autre monde qui attend ce candidat soutenu par l'Europe et les Etats-Unis.
Cette semaine, Strauss-Kahn retourne en Amérique latine, Bachelet le lui a demandé. Quand les 24 administrateurs du FMI se réuniront vendredi 28 septembre pour élire le nouveau directeur général, lui sera au Chili, en train de présider un colloque sur la relance de l'Amérique du Sud. Le voyage est bien long, il a déjà beaucoup donné, mais quel symbole ! Un socialiste au Fonds monétaire international, ça n'existe pas, disaient les puristes et son copain Emmanuelli ? Mais qu'ils entendent la voix du monde ! «Heureusement que le patron du Fonds va être un progressiste», a dit Lula à DSK quand celui-ci est venu le voir en juillet. Le ministre des Finances brésilien grommelait que rien n'était joué, que le soutien brésilien n'était pas acquis au candidat de la riche Europe ? Lula, devant son ministre, adoubait le camarade Dominique, avec pour mission de rendre le Fonds à la planète. Quelques jours plus tôt, en Afrique du Sud, c'est Thabo Mbeki qui avait donné l'accolade à Strauss, désamorçant une possible candidature deTrevor Manuel, son ministre des Finances, que les Anglais, perfides, auraient bien activée...
Voilà donc un destin : au coeur de la planète, devenir le mécano de la prospérité. Le bientôt ex-député de Sarcelles est devenu l'homme-monde. Il a bouclé une tournée de 100 000 kilomètres pour se vendre et ausculter la planète. Il compte les chantiers. Les déficits américains. L'imperium chinois. Les fonds souverains des pays émergents, qui peu vent demain razzier léconomie du vieux monde avec leurs réserves. L'Afrique et sa tristesse. L'Asie, cet eldorado faussement discret. L'Europe, assiégée et de bonne volonté... Il faut apaiser la planète, remettre de l'ordre juste, comme disait qui, déjà ? Strauss-Kahn, lui, peut le faire, murmurent les grands de ce monde...
Quelle belle histoire : une double résilient pour deux grands corps malades. DSK: homme politique français en panne d'existence, socialiste dont les socialistes n'ont pas voulu, beau ministre des Finances, mais dont la carrière, avortée en 1 999, n'a jamais pu reprendre. Et le FMI : belle institution en crise existentielle, ayant désappris les leçons de Keynes, son inventeur, ne sachant plus construire la croissance, devenue repaire de clones néolibéraux. El diablo pour les Argentins, menacée de dissidence par le nouveau riche Chavez, dédaignée par les Chinois au yuan sous-évalué, ignorée des Américains, méprisée des marchés...
Comment sauver deux malades ? En les mariant, pardi ! Déjà Strauss est sauvé. Si son bonheur est contagieux, le Fonds ne va pas tarder à resplendir. Il veut le ressourcer, l'irriguer de nouveaux talents. Recruter dans le tiers-monde, sortir de la monoculture, diversifier un personnel monocolore. En finir avec cet enfermement culturel - «ces gens qui ne découvrent l'existence d'un pays que quand celui-ci tombe malade», a-t-il dit en Corée. Et puis faire venir des anciens du privé, débaucher pour le service public mondial des spécialistes des marchés financiers - puisque c'est de là, de cet univers opaque des hedge funds, que viennent désormais les tsunamis ! Et enfin, surtout, reparler haut : se faire entendre dans le brouhaha planétaire, pour tenir le discours de la raison. Savoir admonester les riches et les puissants, ne plus être seulement le gendarme des pauvres.
Strauss-Kahn pense une idée à la minute. Depuis qu'il est parti en campagne, il est redevenu le DSK d'il y a dix ans. Le Strauss de ses années Bercy, l'inventeur de l'optimisme français, quand il construisait le Meccano industriel d'EADS, apprenait l'art de la politique industrielle à Jospin, et construisait les cnemins de l'euro. Ce ministre que les grands sentimentaux du Trésor et de l'Inspection n'ont jamais oublié. Ils se sont remis à son service, dans sa conquête du FMI, comme une armée triste retrouve le général de sa gloire. Strauss a bluffé Ambroise Fayolle, nouveau représentant français au FMI, qui l'a accompagné dans sa tournée latino-américaine. Il a retrouvé Pierre Duquesne, ancien conseiller économique de Jospin à Matignon, prédécesseur de Fayolle à Washington, qui lui a déminé le terrain... «Il y a une fenêtre de tir pour relancer le multilatéralisme», dit-il. Le multilatéralisme, c'est lui. Le FMI peut devenir la maison de la régulation, et son directeur général l'hôte accueillant et inventif des maîtres du monde. Le secrétaire au Trésor américain Henry Paulson ne veut plus gérer seul l'hyperpuissance chinoise. Il l'a dit à Strauss-Kahn. Le bilatéral a vécu. Les Chinois, comme empêtrés de leur force, réalisent que la force de la jeunesse ne peut pas tout. «Eux aussi doivent rétablir leur rapport au monde, dit Strauss. Nous avons besoin de la croissance chinoise, mais la Chine a besoin d'une économie mondiale équilibrée.» Il sait que les Chinois appréhendent les déséquilibres de leur croissance, les inégalités montantes. «Pour l'instant, ils ne sont pas dans la même urgence que les Occidentaux. Ils pensent sur cinquante, sur cent ans. Mais c'est aujourd'hui qu'on délocalise dans le Limousin ou le Nebraska ! Il faut amener tout le monde sur le même calendrier.» Pousser la Chine au développement de son marché intérieur, détourner sa puissance des seules économies de l'Ouest, et la sortir de son rôle d'empire prédateur qui accapare les matières premières des pays pauvres, en échange de son aide financière. Et donc l'introduire dans le jeu. La respecter dans les instances du FMI. Elle, et l'Inde, et le Brésil, les nouveaux géants, et la Russie, dont la frustration nourrit l'agressivité, et qui a suscité une candidature anti-DSK, vouée à l'échec, pour tester son pouvoir de nuisance... Le collectif est son affaire. Mettre les gens autour d'une table et inventer du vivre-ensemble. «C'est la théorie des jeux, dit-il. A un moment, chaque joueur doit avoir intérêt à ce que la partie avance. Le jeu devient coopératif. Mais il faut un arbitre reconnu par tous, un meneur de jeu créatif et persuasif.» A Bercy, il avait pensé, un moment, transformer la «chaise» française - cette représentation dans la démocratie censitaire du FMI, où chaque pays compte au prorata de ses parts - en une chaise européenne. Il est social-démocrate et régulateur. Il entend les pays émergents. Il siège au conseil international de la Banque chinoise de Développement, possède la confiance de ChenYuan, patron de la banque et mogol des finances chinoises. Quand il est venu à Pékin, Strauss a dîné chez Shen ...
Dans cette histoire, il y a comme une morale. D'un hasard, Strauss a fait un destin. Un coup de téléphone passé à son vieil ami Jean- Claude Juncker, Premier ministre luxembourgeois, qui relevait d'une opération en juin, a fait basculer la donne. Juncker, navré de l'élimination de Strauss de la vie publique, lui a parlé du FMI, que l'Espagnol Rato, tra vaillé par un retour en politique, abandonnait. Ensuite, tout est allé si vite. Juncker a convaincu l'Europe. Sarkozy s'est rallié à cette candidature qu'il n'avait pas inventée, feignant de l'organiser en maître communicant, jouant le jeu pourtant... DSK, pas dupe, amusé de la convergence d'intérêts, a apprécié. A peine embarrassé quand Sarkozy, «vendant» sa candidature à des Européens déjà convaincus, leur glissait au passage que la France ne tiendrait pas ses engagements de réduction de sa dette. En novembre, les experts du FMI produiront une analyse sur la France, dont chacun sait qu'elle sera critique. Le managing director Strauss-Kahn ne s'en mêlera pas. aux administrateurs du Fonds, échaudé par l'expérience Rato, il a promis d'être un patron à plein temps. Lui ira au Venezuela, ramènera Chavez à la maison. Son futur même dépend de son succès au Fonds. Strauss-Kahn ou la séduction, l'art de s'installer en demandeur, quand il aurait pu jouer les gros bras. En réalité, l'élection était jouée dès le début. Le partage du monde de l'après-guerre, toujours en vigueur, est incontournable. La Banque mondiale aux Américains, le FMI aux Européens. Mais Strauss a compris que cette garantie 1 enchaînerait au monde des riches. Sa campagne mondiale était une nécessité, la condition même de sa crédibilité. Il fallait qu'il ne soit pas le candidat des riches Blancs. Ces jours-ci, Dominique Strauss-Kahn parle beaucoup de Keynes, l'inventeur des institutions financières internationales. Il peut créer, peut-être avec son copain social- démocrate Pascal Lamy, président de l'OMC, cette gouvernance mondiale tant attendue. Il veut pacser à nouveau son FMI et la Banque mondiale, dont les sièges se font face sur la 19e Rue. «Je traverse la 19e Rue, puis je traverse l'Equateur, puis je traverse le Pacifique.» La Banque mondiale, les pays du Sud et les dragons d'Asie. Il a déjà proposé à Robert Zoellick, son patron, de faire un tandem. Ces deux-là ne pèchent pas par modestie... «Zoellick pense toujours qu'il est la plus intelligente des personnes présentes dans une pièce, dit une connaissance des deux hommes. Strauss-Kahn sait que ce n'est pas vrai.» Attention le monde, M. Strauss arrive à Washington. Claude Askolovitch Le Nouvel Observateur
Son univers désormais. Les gens responsables, qui portent sur leurs épaules le destin des peuples, et cet autre monde qui attend ce candidat soutenu par l'Europe et les Etats-Unis.
Cette semaine, Strauss-Kahn retourne en Amérique latine, Bachelet le lui a demandé. Quand les 24 administrateurs du FMI se réuniront vendredi 28 septembre pour élire le nouveau directeur général, lui sera au Chili, en train de présider un colloque sur la relance de l'Amérique du Sud. Le voyage est bien long, il a déjà beaucoup donné, mais quel symbole ! Un socialiste au Fonds monétaire international, ça n'existe pas, disaient les puristes et son copain Emmanuelli ? Mais qu'ils entendent la voix du monde ! «Heureusement que le patron du Fonds va être un progressiste», a dit Lula à DSK quand celui-ci est venu le voir en juillet. Le ministre des Finances brésilien grommelait que rien n'était joué, que le soutien brésilien n'était pas acquis au candidat de la riche Europe ? Lula, devant son ministre, adoubait le camarade Dominique, avec pour mission de rendre le Fonds à la planète. Quelques jours plus tôt, en Afrique du Sud, c'est Thabo Mbeki qui avait donné l'accolade à Strauss, désamorçant une possible candidature deTrevor Manuel, son ministre des Finances, que les Anglais, perfides, auraient bien activée...
Voilà donc un destin : au coeur de la planète, devenir le mécano de la prospérité. Le bientôt ex-député de Sarcelles est devenu l'homme-monde. Il a bouclé une tournée de 100 000 kilomètres pour se vendre et ausculter la planète. Il compte les chantiers. Les déficits américains. L'imperium chinois. Les fonds souverains des pays émergents, qui peu vent demain razzier léconomie du vieux monde avec leurs réserves. L'Afrique et sa tristesse. L'Asie, cet eldorado faussement discret. L'Europe, assiégée et de bonne volonté... Il faut apaiser la planète, remettre de l'ordre juste, comme disait qui, déjà ? Strauss-Kahn, lui, peut le faire, murmurent les grands de ce monde...
Quelle belle histoire : une double résilient pour deux grands corps malades. DSK: homme politique français en panne d'existence, socialiste dont les socialistes n'ont pas voulu, beau ministre des Finances, mais dont la carrière, avortée en 1 999, n'a jamais pu reprendre. Et le FMI : belle institution en crise existentielle, ayant désappris les leçons de Keynes, son inventeur, ne sachant plus construire la croissance, devenue repaire de clones néolibéraux. El diablo pour les Argentins, menacée de dissidence par le nouveau riche Chavez, dédaignée par les Chinois au yuan sous-évalué, ignorée des Américains, méprisée des marchés...
Comment sauver deux malades ? En les mariant, pardi ! Déjà Strauss est sauvé. Si son bonheur est contagieux, le Fonds ne va pas tarder à resplendir. Il veut le ressourcer, l'irriguer de nouveaux talents. Recruter dans le tiers-monde, sortir de la monoculture, diversifier un personnel monocolore. En finir avec cet enfermement culturel - «ces gens qui ne découvrent l'existence d'un pays que quand celui-ci tombe malade», a-t-il dit en Corée. Et puis faire venir des anciens du privé, débaucher pour le service public mondial des spécialistes des marchés financiers - puisque c'est de là, de cet univers opaque des hedge funds, que viennent désormais les tsunamis ! Et enfin, surtout, reparler haut : se faire entendre dans le brouhaha planétaire, pour tenir le discours de la raison. Savoir admonester les riches et les puissants, ne plus être seulement le gendarme des pauvres.
Strauss-Kahn pense une idée à la minute. Depuis qu'il est parti en campagne, il est redevenu le DSK d'il y a dix ans. Le Strauss de ses années Bercy, l'inventeur de l'optimisme français, quand il construisait le Meccano industriel d'EADS, apprenait l'art de la politique industrielle à Jospin, et construisait les cnemins de l'euro. Ce ministre que les grands sentimentaux du Trésor et de l'Inspection n'ont jamais oublié. Ils se sont remis à son service, dans sa conquête du FMI, comme une armée triste retrouve le général de sa gloire. Strauss a bluffé Ambroise Fayolle, nouveau représentant français au FMI, qui l'a accompagné dans sa tournée latino-américaine. Il a retrouvé Pierre Duquesne, ancien conseiller économique de Jospin à Matignon, prédécesseur de Fayolle à Washington, qui lui a déminé le terrain... «Il y a une fenêtre de tir pour relancer le multilatéralisme», dit-il. Le multilatéralisme, c'est lui. Le FMI peut devenir la maison de la régulation, et son directeur général l'hôte accueillant et inventif des maîtres du monde. Le secrétaire au Trésor américain Henry Paulson ne veut plus gérer seul l'hyperpuissance chinoise. Il l'a dit à Strauss-Kahn. Le bilatéral a vécu. Les Chinois, comme empêtrés de leur force, réalisent que la force de la jeunesse ne peut pas tout. «Eux aussi doivent rétablir leur rapport au monde, dit Strauss. Nous avons besoin de la croissance chinoise, mais la Chine a besoin d'une économie mondiale équilibrée.» Il sait que les Chinois appréhendent les déséquilibres de leur croissance, les inégalités montantes. «Pour l'instant, ils ne sont pas dans la même urgence que les Occidentaux. Ils pensent sur cinquante, sur cent ans. Mais c'est aujourd'hui qu'on délocalise dans le Limousin ou le Nebraska ! Il faut amener tout le monde sur le même calendrier.» Pousser la Chine au développement de son marché intérieur, détourner sa puissance des seules économies de l'Ouest, et la sortir de son rôle d'empire prédateur qui accapare les matières premières des pays pauvres, en échange de son aide financière. Et donc l'introduire dans le jeu. La respecter dans les instances du FMI. Elle, et l'Inde, et le Brésil, les nouveaux géants, et la Russie, dont la frustration nourrit l'agressivité, et qui a suscité une candidature anti-DSK, vouée à l'échec, pour tester son pouvoir de nuisance... Le collectif est son affaire. Mettre les gens autour d'une table et inventer du vivre-ensemble. «C'est la théorie des jeux, dit-il. A un moment, chaque joueur doit avoir intérêt à ce que la partie avance. Le jeu devient coopératif. Mais il faut un arbitre reconnu par tous, un meneur de jeu créatif et persuasif.» A Bercy, il avait pensé, un moment, transformer la «chaise» française - cette représentation dans la démocratie censitaire du FMI, où chaque pays compte au prorata de ses parts - en une chaise européenne. Il est social-démocrate et régulateur. Il entend les pays émergents. Il siège au conseil international de la Banque chinoise de Développement, possède la confiance de ChenYuan, patron de la banque et mogol des finances chinoises. Quand il est venu à Pékin, Strauss a dîné chez Shen ...
Dans cette histoire, il y a comme une morale. D'un hasard, Strauss a fait un destin. Un coup de téléphone passé à son vieil ami Jean- Claude Juncker, Premier ministre luxembourgeois, qui relevait d'une opération en juin, a fait basculer la donne. Juncker, navré de l'élimination de Strauss de la vie publique, lui a parlé du FMI, que l'Espagnol Rato, tra vaillé par un retour en politique, abandonnait. Ensuite, tout est allé si vite. Juncker a convaincu l'Europe. Sarkozy s'est rallié à cette candidature qu'il n'avait pas inventée, feignant de l'organiser en maître communicant, jouant le jeu pourtant... DSK, pas dupe, amusé de la convergence d'intérêts, a apprécié. A peine embarrassé quand Sarkozy, «vendant» sa candidature à des Européens déjà convaincus, leur glissait au passage que la France ne tiendrait pas ses engagements de réduction de sa dette. En novembre, les experts du FMI produiront une analyse sur la France, dont chacun sait qu'elle sera critique. Le managing director Strauss-Kahn ne s'en mêlera pas. aux administrateurs du Fonds, échaudé par l'expérience Rato, il a promis d'être un patron à plein temps. Lui ira au Venezuela, ramènera Chavez à la maison. Son futur même dépend de son succès au Fonds. Strauss-Kahn ou la séduction, l'art de s'installer en demandeur, quand il aurait pu jouer les gros bras. En réalité, l'élection était jouée dès le début. Le partage du monde de l'après-guerre, toujours en vigueur, est incontournable. La Banque mondiale aux Américains, le FMI aux Européens. Mais Strauss a compris que cette garantie 1 enchaînerait au monde des riches. Sa campagne mondiale était une nécessité, la condition même de sa crédibilité. Il fallait qu'il ne soit pas le candidat des riches Blancs. Ces jours-ci, Dominique Strauss-Kahn parle beaucoup de Keynes, l'inventeur des institutions financières internationales. Il peut créer, peut-être avec son copain social- démocrate Pascal Lamy, président de l'OMC, cette gouvernance mondiale tant attendue. Il veut pacser à nouveau son FMI et la Banque mondiale, dont les sièges se font face sur la 19e Rue. «Je traverse la 19e Rue, puis je traverse l'Equateur, puis je traverse le Pacifique.» La Banque mondiale, les pays du Sud et les dragons d'Asie. Il a déjà proposé à Robert Zoellick, son patron, de faire un tandem. Ces deux-là ne pèchent pas par modestie... «Zoellick pense toujours qu'il est la plus intelligente des personnes présentes dans une pièce, dit une connaissance des deux hommes. Strauss-Kahn sait que ce n'est pas vrai.» Attention le monde, M. Strauss arrive à Washington. Claude Askolovitch Le Nouvel Observateur