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EDUARDO BOLSONARO, DÉPUTÉ DE SAO PAULO ET FILS DE L’ANCIEN PRÉSIDENT DU BRÉSIL JAIR BOLSONARO, LORS D’UNE CONFÉRENCE DE PRESSE, DEVANT LE CAPITOLE À WASHINGTON, LE 12 MARS 2024. PHOTO MANDEL NGAN |
INTERNATIONAL / BRÉSIL / Le fils de Jair Bolsonaro se protège de la justice brésilienne en s’installant aux États-Unis / Député de Sao Paulo, Eduardo Bolsonaro était vu comme un successeur sérieux de son père, condamné en 2023 à huit années d’inéligibilité pour ses attaques contre le système démocratique et interdit de se présenter au scrutin présidentiel de 2026.
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Le Monde
Par Bruno Meyerfeld (Sao Paulo, correspondant)
Publié aujourd’hui à 15h00, modifié à 15h19
Temps de Lecture 2 min.
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« courage, fuyons » : c’est peu ou prou le message envoyé mardi 18 mars par Eduardo Bolsonaro. Âgé de 40 ans, le fils de l’ancien président d’extrême droite du Brésil, Jair Bolsonaro (2019-2023), candidat très sérieux à la succession de son père, a annoncé à la surprise générale, dans une vidéo postée en ligne, « prendre congé » de son mandat de député fédéral pour s’installer aux États-Unis, où il réside depuis déjà plusieurs semaines et où il compte demander « l’asile », comme il l’a déclaré à Folha de Sao Paulo, mercredi 19 mars.
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Eduardo Bolsonaro a justifié sa décision par les actions entreprises par Alexandre de Moraes, juge au Tribunal suprême fédéral (TSF), chargé des principales enquêtes contre l’extrême droite brésilienne, et qu’il accuse de vouloir l’emprisonner. « Je ne me soumettrai pas au régime d’exception ni à ses sales ruses ! », a lancé l’élu d’extrême droite, qualifiant le magistrat de « psychopathe » et la police fédérale de « Gestapo ».
Nostalgique de la dictature, misogyne assumé, complotiste, fort en gueule et amateur d’armes à feu, Eduardo est, de tous les fils de Jair Bolsonaro, celui qui lui ressemble le plus. Surnommé « Numéro 3 » (car il est le troisième de la fratrie), le député de Sao Paulo était vu comme un successeur plus que sérieux de son paternel, condamné en 2023 à huit années d’inéligibilité pour ses attaques contre le système démocratique brésilien et interdit de se présenter au scrutin présidentiel de 2026.
Proche du président argentin, Javier Milei, et du salvadorien Nayib Bukele, mais aussi des partis d’extrême droite espagnole Vox et portugais Chega, Eduardo Bolsonaro occupe une place centrale dans les relations de l’extrême droite brésilienne avec Donald Trump. Celui que Jair Bolsonaro avait envisagé de nommer comme ambassadeur du Brésil en 2019 (sous prétexte qu’il savait « frire des burgers ») a noué des liens personnels avec l’entourage du président américain, dont Ivanka, sa fille, et Steve Bannon, l’ancien conseiller spécial de Donald Trump. « Je pense qu’un jour, dans un avenir proche, [Eduardo] sera le président du Brésil », est allé jusqu’à prédire le président américain le 19 janvier, à Washington, la veille de sa prise de fonctions.
Un simple « congé »
Le départ de ce poids lourd de l’extrême droite a logiquement réjoui la gauche. « C’est une victoire très importante », a réagi Lindbergh Farias, chef du Parti des travailleurs (PT, gauche) à la Chambre des députés, qualifiant de « fuite » le départ inattendu d’Eduardo Bolsonaro. M. Farias est le coauteur d’une requête en justice, déposée début mars, visant à confisquer le passeport de l’élu d’extrême droite, accusé de violer la souveraineté brésilienne en mobilisant des membres de l’administration américaine contre le Tribunal suprême fédéral. « C’est un individu qui essaie constamment d’intriguer entre le gouvernement américain et le gouvernement brésilien », a-t-il affirmé au quotidien brésilien O Globo.
Aux États-Unis, « Numéro 3 » entend faire jouer ses relations au sommet afin d’obtenir un statut de réfugié politique. Mais il ne compte pas rester muet et a annoncé son intention de « travailler plus que jamais » afin de porter la parole bolsonariste à Washington et obtenir des « justes punitions » contre Alexandre de Moraes et la police fédérale. Evoquant un simple « congé », il n’a d’ailleurs pas annoncé s’il renonçait totalement à son mandat de député, qu’il ne perdra effectivement qu’après cent vingt jours d’absence.
Eduardo Bolsonaro compte également défendre la cause de son père à la Maison Blanche. Soupçonné d’avoir participé à la préparation d’un coup d’Etat fin 2022 contre le président élu Lula, Jair Bolsonaro est désormais menacé d’un procès et d’une lourde peine de prison. « Mon père peut être injustement emprisonné et je n’aurai peut-être jamais la chance de le revoir en personne. Je n’ai aucun doute sur le fait que le plan de nos ennemis est de l’incarcérer pour l’assassiner en prison », a-t-il avancé mardi. Le TSF doit se réunir le 25 mars afin de décider si Jair Bolsonaro pourrait officiellement être mis en accusation. Pour l’ancien président, aucune chance de partir à l’étranger : son passeport a été confisqué en janvier.
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