28 octobre, 2019

CHILI. LES GESTICULATIONS DE SEBASTIAN PIÑERA


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DESSIN ENEKO LAS HERAS
Le président annonce un remaniement de son exécutif, afin d’endiguer la colère populaire, après la manifestation monstre de vendredi.
Renvoyé dans les cordes, ­Sebastian Piñera tente une esquive. Au lendemain de la manifestation historique qui a réuni 1,2 million de Chiliens, vendredi, dans les rues de Santiago, le ­président a annoncé un vaste remaniement de son gouvernement, le troisième depuis sa nomination en mars 2018, en demandant à ses ministres de remettre leur fonction. « Nous sommes dans une nouvelle réalité. Le Chili est différent de celui que nous avions il y a une semaine », a-t-il assuré. Auparavant, l’armée avait déclaré qu’elle levait le couvre-feu instauré une semaine plus tôt. L’état d’urgence pourrait également être suspendu si « les circonstances le permettent » afin de « contribuer à cette normalisation que tant de Chiliens désirent et méritent », a précisé Sebastian Piñera.

L’ONU enquête sur les violences et les exactions


Le changement d’attitude du chef de l’État – qui avait osé déclarer aux premières heures de la révolte que le Chili était en « guerre contre un ennemi puissant » – ne devrait pas faire le compte. Contraint de demander pardon à ses concitoyens, le locataire du palais de la Moneda a voulu faire amende honorable en débloquant, mardi, une enveloppe de 1,1 milliard d’euros, censée, à ses yeux, apaiser la crise sociale avec la revalorisation du salaire minimum, l’augmentation des minima vieillesse, la hausse des impôts des plus riches, ainsi que le gel des prix de l’électricité. La participation record à la marche de vendredi est en ce sens un cinglant désaveu pour le président multimilliardaire. Les acteurs du mouvement réclament un changement de matrice du modèle économique, après plus de quarante ans d’ultralibéralisme, et une refonte de l’État encore régi par la Constitution édictée sous la dictature du général Augusto Pinochet. Le retrait en bloc de l’actuel exécutif est un écran de fumée, alors que les manifestants réclament la démission de Sebastian Piñera. « Le Chili s’est réveillé et on ne l’endormira pas avec des annonces qui ne changent les choses qu’en apparence, pour que tout reste intact », a critiqué Luis Mesina, le coordinateur de No + AFP, le mouvement contre le système de pensions privées.

Quant à la levée des mesures d’exception, elle vise à donner des gages à l’extérieur. Une mission d’enquête de la commission des droits de l’homme de l’ONU est attendue ce lundi à Santiago afin d’évaluer les nombreuses exactions perpétrées depuis le 17 octobre et qui ont coûté la vie à 18 personnes. De son côté, l’Institut national des droits humains a porté plainte contre des carabineros pour agressions et torture sexuelle.
Cathy Dos Santos

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