[ Cliquez sur l'image pour l'agrandir ]
PHOTO JAVIER TORRES |
Une statue est devenue le symbole des divisions politiques qui traversent la société, celle du général Manuel Baquedano. Ce chef militaire s'est illustré au XIXème siècle lors de la conquête du nord du pays, mais aussi de la répression des indigènes mapuche dans le sud.
« SI SEULEMENT NOS YEUX AVAIENT ÉTÉ AINSI PROTÉGÉS » DESSIN NATI.PAJARITO |
La statue du général Manuel Baquedano, en plein centre de la capitale chilienne, a été vandalisée à de nombreuses reprises depuis le début du grand mouvement contre les inégalités sociales, fin 2019. La semaine dernière, elle a fini par être retirée de l'espace public par les autorités. En plein couvre-feu et au son des trompettes jouées par une rangée de militaires en uniforme, le monument peint en noir a été soulevé par une grue et envoyé dans un convoi spécial pour être bientôt restauré.
Le général et son cheval en ont vu de toutes les couleurs depuis un an et demi. Ils se trouvaient en plein milieu de la place où se réunissent le plus souvent les manifestants à Santiago. Ils étaient jusqu'à 1,5 million autour de cette statue au plus fort du mouvement social contre les inégalités, et pour demander une nouvelle Constitution.
- Ñ - ÉLECTIONS AU CHILI, PUBLICITÉ ÉLECTORALE
« N'AYEZ PAS PEUR » |
La statue a été peinte entièrement en rouge pour symboliser la répression des manifestants par les forces de l'ordre. À chaque manifestation, elle est couverte de graffitis politiques et contre le gouvernement de droite au pouvoir. Certains ont même tenté de la faire tomber et d'y mettre le feu. En réaction, les autorités ont fait repeindre mille et une fois le général et son cheval, et le monument est surveillé jour et nuit par plusieurs patrouilles de police.
Nouvelle Constitution, nouveau Chili
Certains se réjouissent du retrait de la statue, d'autres y voient une grave défaite symbolique. La droite au pouvoir et les conservateurs considèrent qu'il s'agit de la preuve que la police n'a pas su maintenir l'ordre public et protéger la statue, qu'ils voient comme un symbole national important. Avant qu'elle soit déplacée, des militaires nostalgiques de la dictature de Pinochet se sont même réunis devant la statue pour rendre hommage au général Baquedano. Un peu plus tôt, le ministre de la Défense y avait déposé une gerbe de fleurs.
Mais pour les partisans du mouvement social, ce général est un symbole des violences contre les peuples indigènes. Depuis plusieurs mois, ils veulent réfléchir ensemble à ce qui pourrait remplacer cette statue, au milieu de cette place qu'ils ont rebaptisée « Place de la Dignité ». Ces manifestants veulent un symbole qui représente le Chili d'aujourd'hui, car cette année, le pays va commencer à rédiger une nouvelle Constitution.
Dans la droite ligne du mouvement social, un référendum a été organisé en octobre dernier. Près de 80 % des électeurs ont voté pour rédiger une nouvelle Constitution afin de remplacer le texte actuel, hérité de la dictature du général Augusto Pinochet. L'élection de l'Assemblée constituante est prévue les 10 et 11 avril.
Pour certains, le socle vide de la statue au milieu de cette place est devenu un symbole du processus constituant qui commence, et qui va définir les contours de la société dans laquelle les Chiliens souhaitent vivre. Le pays pourrait passer du modèle économique néolibéral imposé sous la dictature à un modèle toujours capitaliste, mais plus proche de la social-démocratie.
[ Cliquez sur l'image pour l'agrandir ]
PHOTO AGENCIA UNO |