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Explication Au Chili, trois mois après le référendum rejetant massivement le projet d’une nouvelle Constitution à tendance progressiste, les partis politiques sont parvenus à se mettre d’accord sur un processus constitutionnel, lundi 12 décembre.
Pourquoi une nouvelle Constitution ?
Lors d’une mobilisation historique en octobre 2019, le peuple chilien a manifesté sa volonté d’en finir avec la Constitution héritée de la dictature d’Augusto Pinochet (1973-1990), considérée comme un frein majeur à de profondes réformes sociales. Douze mois plus tard, il se prononçait massivement en faveur d’une nouvelle Constitution.
Une Assemblée constituante de 154 membres, élus en mai 2021, avait travaillé à la rédaction d’un projet de Constitution. Mais, lors d’un référendum le 4 septembre dernier, le fruit d’une année de travail avait été rejeté par 62 % des Chiliens.
Le projet, jugé trop ambitieux, semblait bousculer la société chilienne. Repoussé par la coalition de droite Chile Vamos lors d’une campagne houleuse et marquée par la désinformation, le texte entendait garantir aux citoyens une série de droits à l’éducation, à la santé publique, à une retraite ainsi qu’à un logement décent. Il introduisait aussi l’accès à l’avortement, ou encore la reconnaissance de nouveaux droits aux peuples autochtones.
Que s’est-il passé depuis le référendum de rejet du 4 septembre ?
Le président Gabriel Boric, élu en mars dernier, s’est engagé à avancer sur un projet constitutionnel, demandant aux différentes forces politiques de s’accorder sur les contours d’un nouveau processus. Cette fois-ci, à la différence du précédent projet parti de zéro, les parlementaires de droite et de gauche sont parvenus lundi 12 décembre à s’entendre sur une série de douze « bases constitutionnelles » qui servent de socle au futur texte.
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Parmi ces fondamentaux, le Chili est reconnu comme « une République démocratique dont la souveraineté réside dans le peuple ». Si la notion de plurinationalité, contestée par une partie du peuple chilien dans la précédente version, a disparu, les peuples indigènes sont « reconnus comme partie intégrante de la nation chilienne ». Enfin, les parlementaires ont voulu poser des limites, comme le fait de ne pas toucher au « droit à la vie ».
Comment va fonctionner le nouveau processus constitutionnel ?
L’Assemblée constituante est remplacée par trois entités complémentaires. Dès janvier prochain, un comité d’experts de 24 personnes désignées par le Parlement (12 par l’Assemblée, 12 par le Sénat) aura la responsabilité de rédiger un avant-projet de Constitution.
Ces experts rejoindront, en avril 2023, un Conseil constitutionnel de 50 représentants élus par le peuple chilien, lors d’un scrutin avec vote obligatoire. Ce Conseil, qui devra valider le projet abouti de Constitution, sera paritaire hommes-femmes, et les peuples autochtones n’auront plus de quota de sièges garanti comme c’était le cas lors de la précédente tentative de réforme.
Enfin, un comité d’admissibilité technique, constitué de 14 spécialistes – des juristes et des universitaires sélectionnés par le Parlement –, sera chargé de garantir la faisabilité juridique du projet, qui sera ensuite remis au gouvernement en octobre.
Le projet de nouvelle Constitution du Chili sera soumis à nouveau à un référendum le 26 novembre 2023, alors qu’auront eu lieu les commémorations, cinquante ans après, du coup d’État militaire. Une façon de tourner définitivement la page de la dictature ?
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