23 décembre, 2022

LA LIGNE / LE SUPPOSÉ ET LE RÉEL EN POLITIQUE

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INSPIRÉ PAR OSVALDO CAVANDOLI

(En particulier, en ce qui concerne les conséquences de "l'accord infâme") / Chaque conjoncture politique présente, à l'honnête citoyen qui veut comprendre le phénomène, au moins deux univers d'information:

 par Alvaro Alarcón 

ÁLVARO ALARCÓN

D'une part, les perceptions subjectives, dites aussi « idéologiques », que l'observateur accommode à ses valeurs, à ses schémas de pensée déjà construits, à ses désirs profonds, à ses utopies personnelles, souvent collectivement partagées.

D'autre part, l'observateur est nécessairement confronté à l'univers de la Réalité de la situation, qui est considéré comme objectif, mais qui présente souvent d'énormes difficultés à se dégager de la perception subjective de chacun de nous.

Le Réel est ce sur quoi nous tombons fréquemment et avec lequel nous nous heurtons, bien que certains s'efforcent de diminuer certains aspects de son existence.

Ce Réel est dur, inattendu, il nous frustre, il a des limites imprévisibles, déroutantes.

Tout projet ou stratégie avance, se matérialise, atteint de nouvelles étapes, mais à condition d'atteindre une maîtrise suffisante de la Réalité.

La connaissance, l'expérience, la compétence, la ruse, l'intelligence sont des outils qui nous permettent de décrypter la réalité.

Si nous échouons dans cet objectif d'interprétation de la Réalité, cela signifie que nos outils sont inadéquats. Un exemple d'échec, c'est quand on s'attendait à ce que le dynamisme populaire rafle les suffrages en approuvant la nouvelle Constitution et qu'au contraire, on ait fait face à un rejet dudit projet, à une immense majorité de 62% des votants.

C'était la preuve du caractère réfractaire du Réel, qu'il résiste, qu'il ne correspond pas à l'idée que nous nous sommes construits, là où nos ressources manquent.

Un premier effet compréhensible de cette déception est de ne pas accepter cette énorme distance entre les désirs et la réalité cruelle, entre les désirs émotionnels et ce mur infranchissable qu'est le réel. Ce qui peut signifier s'en prendre à tous les responsables présumés de cette frustration, sans plus de réflexion et d'analyse.

Dans la recherche de solutions, les conséquences sont également variées, certaines sont paradoxales et sans conséquences majeures, d'autres ont des effets plus graves, notamment éviter toute responsabilité personnelle et essayer de changer l'exécrable Réalité, par exemple, en abandonnant l'action politique. Il y a d'autres conséquences plus extrêmes, comme la dénonciation et la proscription des présumés coupables, même dans les « rangs amis ».

Un autre résultat, non moins sévère, est l'effet même de l'impact de la croyance, de la prévision, de l'émotionnel sur l'inattendu Réalité. Le contexte de l'idéologique, de l'utopique et du prescrit, tente d'être intimement lié au Réel et en est la condition rationnelle d'existence. Ces univers du subjectif et du réel demandent à être théoriquement proches, c'est la circonstance qui permettra des résultats souhaitables, à travers la gestion efficace de la réalité.

Quand cette proximité entre le prévu et le réel ne se manifeste pas et échoue, il y a curieusement une tendance à nier le Réel, à ne pas le considérer, à essayer de conserver des croyances inefficaces par amour-propre, même au risque conscient d'une acte d'inertie. C'est-à-dire que la réflexion dominante est formulée comme suit : « Je me trompe, mais fièrement, je coule avec le navire ». Ou cela équivaudrait à affirmer que la réalité est inflexible et résistante, mais à cause de mes valeurs et "avec fierté" je ne m'engage pas, en espérant que la situation changera d'elle-même.

Nous avons toujours prôné la science, les lois scientifiques, c'est-à-dire la capacité de déduire le cours probable de la réalité. Il semble que l'utilisation indiscriminée de ces énoncés ait affaibli et surtout simplifié leur pertinence. On a oublié les probabilités, les contextes précis et singuliers, le manque ou la véracité des informations précédentes, l'imprévisibilité, les contingences, les éventualités, les méthodologies, les marges d'erreur, le hasard, etc., etc.

Le monde réel se manifeste lorsque les méthodes échouent, ce qui nous est arrivé d'innombrables fois. Quand les outils ne fonctionnent pas, c'est parce qu'on a atteint une limite, qu'il va falloir bien analyser pour continuer à avancer.

Le Réel est ce sur quoi la technique échoue ; le Réel est inséparablement lié à l'échec. Et plus encore, le Réel résiste à la description et à la définition. C'est pourquoi la définition de toute combinaison politique stratégique, de tout objectif tactique, comporte ce probable manque d'éléments qui pourraient nous faire échouer.

La complexité du contexte politique au Chili rendra difficile pour le Parti de trouver la stratégie générale et correcte qui correspondrait massivement à tout le flux de séquences politiques qui seront présentées. Cela est devenu clair à partir du moment de la perte du rapport de forces à partir de septembre et particulièrement avec la circonstance de la signature du « tristement célèbre accord ».

Au lieu de cette stratégie générale et étendue, il devrait plutôt y avoir différents MODES qui conviendraient à chaque objectif qui apparaîtra, même si lesdits modes sont transitoires et uniquement en correspondance avec chaque problème spécifique. Par conséquent, il sera nécessaire de développer des solutions spécifiques pour chaque demande spécifique.

Pour les problèmes insolubles, les solutions ne seront donc pas adaptées au problème lui-même, mais aux objectifs ultérieurs qui seront posés. Le Socialisme ne se joue pas forcément à chaque instant et dans chaque problème quotidien qui demande des résultats.

La solution particulière, dont les causes objectives s'imposent avec l'accord constitutionnel, ne peut être interprétée d'une autre manière. Beaucoup ont des doutes quant à quelle stratégie générale correspond et comment les valeurs qu'elle remet en cause sont sauvegardées. Comme indiqué dans le paragraphe précédent, la solution apparaît déficiente par rapport au problème lui-même, mais elle est cohérente avec les objectifs qu'elle se fixe, qui est d'ouvrir la possibilité de proposer une nouvelle Constitution.

Une autre solution était inconcevable, sauf à vouloir devenir un parti inerte et à caractère testimoniale, c'est-à-dire un « parti gelé », éloigné du combat populaire. Cela se produit avec la majorité des mouvements d'ultra-gauche qui s'activent 2 ou 3 mois en période électorale et ensuite disparaissent.

La tâche qui s'impose est de revenir à la charge, de transformer la Réalité qui nous a résisté, de renforcer les outils qui n'ont pas fonctionné. Certains de ces outils sont possibles à renforcer à court et moyen terme, d'autres plus complexes à activer, comme contrecarrer le pouvoir des médias de droite.

Comment arriver à influencer une nouvelle étape de changement constitutionnel ? Sachant que l'oligarchie s'est assurée de bonnes possibilités telles que la restriction des régions électorales favorables à la gauche, freins et filtres probables à travers des experts et diverses limites constitutionnelles, etc. Dans les futures discussions législatives, il faudra veiller à une meilleure répartition des voix par région, pour l'élection des conseillers constitutionnels, en raison de la répartition inégale du système d'élection sénatoriale qui est appliqué.

L'autre tâche essentielle est notre arrivée à cet électorat réticent, qui a modifié le cadre de la confrontation avec la droite. On affirme qu'il s'agit d'un secteur majoritairement populaire, antagoniste aux partis politiques dans lesquels il inclut les communistes, anti-institutionnel, rancunier envers une société qui s'estime indifférente à ses difficultés d'existence, mais qui pourrait modifier ses perceptions s'il y avait un travail précis et habile d’information et d’organisation envers eux.

Nous sommes confrontés à une campagne d'anticommunisme, qui exprime la panique grandissante de l'extrême droite de voir nos cadres politiques assumer des responsabilités publiques. Ce fait ne doit pas être négligé, ce qui implique en même temps un besoin de précision dans nos analyses politiques. Il est essentiel de procéder à des examens sereins et stricts des événements et des décisions politiques, d'accroître la cohésion du Parti et d'éviter l'influence "showbiz" des médias d'information prédominants, qui attribuent tout aux plaintes individuelles de telle ou telle personnalité.

 
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FRESQUE MURALE JOSÉ CLEMENTE OROZCO

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