Métaux rares : au Chili, le géant Codelco s’allie avec SQM pour doubler l'extraction de lithium dans le désert d'Atacama / Les deux entreprises, l'une publique et l'autre privée, vont créer une société conjointe afin de doubler l'extraction de lithium dans le désert d'Atacama qui dispose des réserves parmi les plus importantes du monde. Une décision déjà évoquée en avril par le président chilien et qui n'avait pas manqué de susciter des inquiétudes au sein du monde minier.
Le désert d'Atacama dispose des réserves de lithium parmi les plus importantes du monde. Et c'est bien cette plaine brune et rocheuse, située dans le nord du pays, que Coldelco et SQM (Sociedad Quimica y Minera de Chile) entendent exploiter bien davantage de ce métal blanc. En effet, la compagnie minière publique chilienne, également plus importante productrice de cuivre au monde, a annoncé, ce mercredi, s'allier avec le groupe privé afin de doubler l'extraction de lithium dans ce désert.
En 2022, SQM l'un des premiers producteurs mondiaux et dont l'actionnaire de référence est le groupe chinois Tianqi Lithium Corp, y avait extrait 168.000 tonnes de ce métal surnommé le « pétrole du 21e siècle » tant qu'il est essentiel pour la fabrication des batteries des voitures électriques, mais aussi des téléphones portables et autres appareils électroniques. Son prix s'est envolé ces dernières années, passant de 5.700 dollars la tonne en novembre 2020 à 60.500 en septembre 2023, selon l'agence Benchmark Mineral Intelligence. L'alliance prévoit d'extraire 300.000 tonnes par an.
« Une entreprise minière leader »
Concrètement, les deux entreprises vont créer en 2025 une société conjointe dans laquelle Codelco possèdera 50% des actions plus une. SQM, de son côté, détiendra la majorité des droits de vote au directoire et décidera de la marche de la société jusqu'en 2031, année à partir de laquelle Codelco deviendra à son tour majoritaire au sein du directoire, a expliqué l'entreprise d'Etat dans un communiqué.
« À partir de maintenant nous serons une entreprise minière leader en cuivre et en lithium au niveau mondial », s'est félicité dans ce communiqué le président du directoire de Codelco, Maximo Pacheco.
« Il s'agit d'un événement sans précédent dans l'industrie minière chilienne, et d'une avancée concrète pour atteindre un développement juste et soutenable », a également réagi à la télévision nationale le président de gauche Gabriel Boric au sujet de cette alliance qui court jusqu'en 2060.
Cette annonce s'inscrit, en effet, dans la « stratégie nationale du lithium » annoncée fin avril par le gouvernement et qui prévoit le contrôle par l'Etat de tout le cycle de production de ce métal, qui a représenté 8,2% du total des exportations chiliennes en 2022, principalement à destination de la Chine, de la Corée du Sud et du Japon.
Et pour cause, le pays en était le deuxième producteur mondial (39.000 tonnes), en 2022, derrière l'Australie (61.000 tonnes), mais largement devant la Chine (19.000 tonnes). Surtout, il possède les premières réserves mondiales, qui peuvent être exploitées dans les conditions économiques et techniques actuelles, soit 6,7 millions de tonnes.
Inquiétudes du monde minier
C'est d'ailleurs le jeune président de 35 ans qui avait annoncé neuf fois plus tôt ce projet d'alliance entre l'entreprise publique et celle privée. Ce qui n'avait pas manqué d'inquiéter le monde minier. En effet, à l'époque, l'annonce du chef de l'Etat, même si elle n'impliquait pas une nationalisation du secteur, avait fait craindre le retour d'une forme de « nationalisme des ressources », notamment en matière de restrictions des exportations des pays producteurs.
Avec l'exemple du Mexique qui a nationalisé ses réserves de lithium alors que l'Indonésie a renforcé le contrôle de son industrie du nickel. En Mongolie, la compagnie minière Rio Tinto a dû renégocier les termes financiers pour exploiter la mine de cuivre Oyu Tolgoi en Mongolie.
Sans compter que malgré la richesse de son sous-sol, le Chili a du mal à développer de nouvelles mines en raison d'un contrôle réglementaire strict sur le minerai qui limite l'investissement des entreprises étrangères dans l'industrie minière. De quoi faire que le pays ne parvienne pas à profiter de la multiplication par 40 de la demande de ce métal sur la période 2020-2040, selon les projections de l'Agence internationale de l'énergie (AIE).
(Avec AFP)