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PHOTO ESTEBAN FELIX / AP
Au Chili, la campagne pour le référendum du 4 septembre sur la nouvelle Constitution, bat son plein. 15 millions de Chiliens seront appelés aux urnes pour un vote obligatoire. Et selon des derniers sondages, le « non » à la nouvelle Constitution pourrait l’emporter. C’est d’ailleurs cette option que la coalition de droite a choisie. Tout comme un ex-président de centre-gauche qui a annoncé qu’il votera « contre ».
RÉFÉRENDUM SUR LA NOUVELLE CONSTITUTION 4S 2022« J'APPROUVE » |
Dans le centre de la capitale, une soixantaine de personnes se sont réunies et agitent des drapeaux chiliens. Une grande banderole a été déployée sur laquelle il est écrit : « Rechazo Popular » (rejet populaire, en français).
« Ce mouvement est pour le Chili, pour la patrie avant tout », lance un des participants au mégaphone. Un rassemblement d’extrême droite auquel Jessica a participé. Elle votera « contre » la nouvelle Constitution, car elle veut conserver celle actuellement en vigueur écrite sous la dictature du général Augusto Pinochet en 1980.
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« Ce n’est plus la Constitution des généraux, car beaucoup de réformes y ont été apportées et la signature de Pinochet n’est plus sur le document. Cette Constitution nous a fait grandir économiquement et c’est le général qui nous a sorti de la "merde" dans laquelle nous avait mis le président Allende. »
Jessica pense que si la nouvelle Constitution est approuvée, ce sera la porte ouverte au régime communiste : « Le communisme, c'est un cancer. Je ne veux pas que mon pays devienne comme le Venezuela ou Cuba. Je veux être libre dans mon pays!».
Des peurs face à certains concepts de la nouvelle Constitution
À côté d’elle, Pamela fait danser son drapeau chilien dans les airs. Elle aussi rejettera la nouvelle Constitution pour plusieurs raisons, mais il y a un article en particulier qui a retenu son attention. « L’éducation sexuelle intégrale, c'est un endoctrinement des jeunes enfants et ça porte atteinte à leur sexualité. Un enfant de 5 ans n’a pas besoin d’entendre parler de sexualité. Il doit vivre sa vie normalement et librement comme n’importe quel autre enfant. »
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Mais la nouvelle Constitution ne détermine pas d’âge précis en ce qui concerne l’éducation sexuelle intégrale. Elle garantit simplement ce droit à toutes les personnes. Beaucoup de fausses informations comme celle-ci circulent à propos du nouveau texte comme par exemple la notion d’état « plurinational ».
Dans sa chanson, le rappeur Fos One, rejette la « plurinationalité » qui reconnaît les peuples indigènes et leur garantit des droits, mais le chanteur ne le voit pas de cette façon. « Il y aura des règles différentes entre les peuples indigènes et les autres Chiliens, pense le rappeur. Même si le pays n’est pas divisé territorialement, il y aura quand même des divisions, car les peuples indigènes auront leur propre système de justice. »
Ces dernières semaines, plusieurs ténors de partis de centre-gauche et centre-droit ont annoncé qu’ils voteront « contre » la nouvelle Constitution. Jaime Arancibia est professeur de droit à l’université conservatrice de Los Andes : « Je pense qu’il a une validité démocratique et populaire, mais il ne remplit pas l’autre condition, selon moi très importante pour une constitution, qui est la légitimité technique du texte. L’Assemblée constituante et son côté révolutionnaire, refondateur et assez populiste, je dirais aussi, n’a pas beaucoup prêté attention à l’opinion des experts. »
Vers un nouveau processus ?
Jaime reconnaît l’importance des droits sociaux inscrits dans la nouvelle Constitution : le logement, la santé ou encore l’éducation, mais il craint que le nouveau texte ne puisse pas garantir leur financement. « Tous ces droits ne vont pas pouvoir se concrétiser car, selon moi, le système politique qui a été défini n’est pas bon et le nouveau texte ne permettra pas une croissance économique suffisante. »
Si la nouvelle Constitution est rejetée, plus de deux Chiliens sur trois seraient favorables à un nouveau processus constitutionnel pour écrire un autre texte. Le président Gabriel Boric a lui-même envisagé cette option, soulignant que le pays s’était largement prononcé en faveur d’une nouvelle Constitution il y a deux ans, enterrant ainsi le texte actuel écrit sous la dictature.
CHILI
GABRIEL BORIC