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Ainsi donc, Stockholm rejoint Helsinki dans son projet d’intégrer l’Otan ! Si, pour la Finlande, il s’agit d’un changement historique de sa relation avec la Russie, la Suède, elle, rompt avec une composante, longtemps vue comme essentielle, de son identité même, qui lui a valu de n’avoir pas connu de guerre depuis plus de deux cents ans : une neutralité parfois limitée au refus de toute alliance militaire, parfois enrichie d’une diplomatie dynamique, progressiste et pacifiste.
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Nul, parmi les dirigeants du royaume nordique, n’a mieux incarné cette vision active et engagée de la neutralité qu’Olof Palme, l’emblématique chef du gouvernement des années 1970 jusqu’à son assassinat le 28 février 1986. « Non aligné » par excellence sur l’une ou l’autre grande puissance de l’époque, il ne s’est pas privé de condamner avec force la guerre des États-Unis au Vietnam ou l’intervention de l’URSS en Tchécoslovaquie. Pour autant, nulle posture « centriste » chez ce social-démocrate atypique : il s’est systématiquement dressé contre l’antisoviétisme et a refusé toute allégeance à « l’Occident », condamnant l’apartheid, le régime de Pinochet, les pratiques néocolonialistes et apportant son soutien à l’OLP et à son président, Yasser Arafat. Opposé au militarisme, il s’engagea activement pour le désarmement. Les Suédois étaient, dans leur grande majorité, fiers du prestige international dont bénéficiait alors leur pays. Beaucoup d’entre eux voyaient, à cette époque, dans cette neutralité-là, l’ADN inaliénable de la Suède. Malheureusement, si cette aspiration reste forte dans une partie de la population suédoise, il y a belle lurette que la politique du pays a rompu avec l’ère Palme !
Aussi peut-on relativiser l’appréciation du journal « le Monde » (19 mai 2022), pour qui « en l’espace de quelques semaines, la guerre en Ukraine a conduit la Suède à tourner la page de deux cents ans d’histoire ». D’un côté, c’est un fait que l’opinion publique suédoise – encore il y a peu massivement hostile à toute alliance militaire – a récemment, en majorité, basculé en faveur d’une intégration à l’Otan. Mais – à l’exception du Parti de gauche et des Verts – la « classe politique » suédoise, les milieux d’affaires et l’armée s’étaient, quant à eux, rangés depuis fort longtemps – à pas feutrés, car sans le consentement de la société – dans le camp occidental et attendaient avec impatience l’occasion leur permettant de gagner une majorité du peuple à l’idée de sauter le pas : cette occasion maudite, Poutine, hélas, vient de la leur fournir. Mais ils n’ont pas attendu cette guerre pour préparer le terrain.
Rappelons que la Suède rejoignit dès 1994 le « Partenariat pour la paix », une structure d’association « soft » à l’Otan. Son armée participa par la suite aux « opérations » de l’Alliance en Bosnie-Herzégovine, au Kosovo, en Afghanistan, en Irak… Le gouvernement suédois se distingua également en 1999, en justifiant le bombardement, soixante-dix-huit jours durant, de Belgrade et d’autres villes de Serbie. Plus récemment, en 2017, la Suède « neutre » opta pour la « coopération militaire renforcée » au sein de l’UE, tout en achetant au prix fort un système de défense antiaérien aux États-Unis. Désormais, elle veut franchir le Rubicon. C’est la deuxième mort d’Olof Palme.
OLOF PALME GRAFFITI VÄSTERÅS |
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