07 avril, 2024

LES DIPLOMATES MEXICAINS S’APPRÊTENT À QUITTER L’ÉQUATEUR APRÈS LE RAID POLICIER CONTRE LEUR AMBASSADE À QUITO

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L'ANCIEN VICE-PRÉSIDENT ÉQUATORIEN JORGE GLAS ARRIVE À LA PRISON
 DE HAUTE SÉCURITÉ DE LA ROCA À GUAYAQUIL, LE 6 AVRIL 2024 
PHOTO AFP.COM / HANDOUT
INTERNATIONAL / ÉQUATEUR / Les diplomates mexicains s’apprêtent à quitter l’Équateur après le raid policier contre leur ambassade à Quito / L’Équateur est depuis vendredi la cible d’une pluie de critiques après l’irruption de policiers dans l’ambassade mexicaine à Quito pour arrêter l’ancien vice-président équatorien Jorge Glas.

Le Monde avec l'AFP

Temps de Lecture 3 min.

 L’ANCIEN  VICE-PRÉSIDENT ÉQUATORIEN
JORGE GLAS (AU CENTRE) MAINTENU PAR 
DES POLICIERS AVANT SON TRANSFERT
  À LA PRISON LE 6 AVRIL. 2024.
 POLICE D’ÉQUATEUR / AFP

Le personnel diplomatique mexicain basé à Quito va quitter l’Équateur dimanche 7 avril, deux jours après le raid policier contre l’ambassade du Mexique qui a déclenché la réprobation internationale et la rupture des relations diplomatiques entre les deux pays.

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«Je n'ai rien à cacher»
PHOTO HERVÉ
LEWANDOWSKI

L’Équateur est depuis vendredi la cible d’une pluie de critiques en Amérique latine, à laquelle s’est jointe l’ONU, après l’irruption de policiers dans l’ambassade mexicaine à Quito pour arrêter l’ancien vice-président équatorien Jorge Glas accusé de corruption, qui s’y était réfugié.

Dix-huit personnes, diplomates et membres de leur famille, vont partir dimanche vers Mexico à bord d’un vol commercial, a annoncé samedi le ministère des affaires étrangères mexicain dans un communiqué.

Parmi elles figurent l’ambassadrice Raquel Serur – qui avait été déclarée persona non grata par l’Équateur – et le chef de la mission diplomatique, Roberto Canseco. Tous seront accompagnés à l’aéroport par des personnels de « pays amis et alliés » qui ont proposé de « veiller » à leur « intégrité », détaille le ministère.

L’intrusion vendredi dans l’ambassade, sans précédent récent dans le monde, a été condamnée par les gouvernements de gauche d’Amérique latine, du Brésil au Venezuela, en passant par le Chili, et même par l’Argentine du président ultralibéral Javier Milei. La plupart d’entre eux ont cité la convention de Vienne, qui garantit l’inviolabilité des ambassades.

Le secrétaire général de l’ONU, Antonio Guterres, s’est dit samedi « alarmé » par le raid, estimant que toute violation des enceintes diplomatiques « compromet la poursuite de relations internationales normales », selon son porte-parole.

La présidente du Honduras, Xiomara Castro, qui assure la présidence temporaire de la Communauté des États d’Amérique latine et des Caraïbes (Celac), a appelé à une réunion d’urgence lundi.

L’Organisation des États américains (OEA) a exprimé son rejet de « toute action qui viole ou compromet l’inviolabilité des locaux des représentations diplomatiques ».

Rupture des relations diplomatiques entre les deux pays

Le président mexicain Andres Manuel Lopez Obrador a dénoncé une « violation flagrante du droit international et de la souveraineté du Mexique », et dit son intention de porter l’affaire devant la Cour internationale de justice.

Dans la foulée, Mexico a annoncé vendredi la rupture immédiate des relations diplomatiques avec l’Équateur, suivi samedi par le Nicaragua.

Les États-Unis – qui condamnent « toute violation de la Convention de Vienne » – ont encouragé le Mexique et l’Equateur « à résoudre leurs différends dans le respect des normes internationales », selon un porte-parole du département d’État.

UNE CINQUANTAINE DE PERSONNES ONT MANIFESTÉ SAMEDI 6 AVRIL
DEVANT L'AMBASSADE D'ÉQUATEUR À MEXICO, AUX CRIS DE « FASCISTE ».
PHOTO LUIS CORTES

Une cinquantaine de personnes ont manifesté samedi soir devant l’ambassade d’Équateur à Mexico, aux cris de « fasciste ».

L’ambassade mexicaine à Quito était encerclée samedi par la police, et le drapeau national a été retiré de son mât dans la cour du bâtiment.

M. Glas, 54 ans, a été transféré samedi dans une prison de haute sécurité à Guayaquil, dans le sud-ouest de l’Equateur, selon des sources gouvernementales.

Des images publiées dans les médias locaux montrent le chef de la mission diplomatique mexicaine, Roberto Canseco, crier « c’est un scandale ! » en courant derrière des véhicules quittant son ambassade. S’ensuit une bousculade, au cours de laquelle M. Canseco tombe à terre. « C’est totalement hors norme, je suis très inquiet qu’ils puissent tuer Jorge Glas », a dit M. Canseco à une télévision locale, encore tremblant.

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Jorge Glas condamné pour détournement de fonds publics

Le Mexique avait accordé vendredi l’asile à Jorge Glas, réfugié depuis le 17 décembre dans son ambassade à Quito et visé par un mandat d’arrêt pour corruption présumée. [voir : LAWFARE : LE CAS DANIEL JADUE]

Quito avait qualifié cette décision d’« illégale », dénoncé un « abus des immunités et privilèges » accordés à l’ambassade et une ingérence dans ses affaires intérieures. « Jorge Glas a fait l’objet d’une condamnation exécutoire et d’un mandat d’arrêt émis par les autorités compétentes », a commenté le ministère équatorien de la communication.

L’octroi de l’asile à M. Glas était intervenu au lendemain de la décision de l’Equateur d’expulser l’ambassadrice mexicaine à Quito, à la suite de critiques émises par le président mexicain sur la conduite de la présidentielle équatorienne de 2023.

Mercredi, M. Lopez Obrador avait accusé les autorités équatoriennes d’avoir exploité l’assassinat du candidat d’opposition Fernando Villavicencio, le 9 août 2023, pour favoriser l’élection du libéral Daniel Noboa à la présidence de l’Equateur, au détriment de la candidate de gauche Luisa Gonzalez. Fernando Villavicencio a été abattu après un meeting de campagne dans le nord de Quito à quelques jours de l’élection du 20 août.

Le gouvernement de l’Équateur, qui lutte contre les bandes criminelles se disputant les routes du trafic de drogue, avait jugé ces propos offensants.

Jorge Glas, vice-président entre 2013 et 2017 sous l’ancien président socialiste Rafael Correa (2007-2017), est accusé d’avoir détourné des fonds publics destinés à la reconstruction de villes côtières après un séisme en 2016.

Dans une autre affaire, il avait été condamné en 2017 à six ans de prison pour corruption dans un vaste scandale impliquant le géant de la construction brésilien Odebrecht. Il avait été libéré en novembre dernier.

Le Monde avec l'AFP

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