21 octobre, 2021

CAMPAGNE ÉLECTORALE AU CHILI DANS UN CONTEXTE POLITIQUE CHARGÉ

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Les scrutins législatif et présidentiel qui auront lieu dans un mois au Chili seront les premiers depuis le mouvement de contestation d'octobre 2019 contre les inégalités et auront lieu dans un contexte particulier : une Assemblée constituante est en train de rédiger une nouvelle Constitution, pour remplacer celle héritée de la dictature du général Pinochet. Le président sortant, lui, ne peut pas se présenter à nouveau, et il est sous le coup d'une procédure de destitution après le scandale des « Pandora Papers ».

par Justine Fontaine

Ce lundi 18 octobre, à Santiago des dizaines de milliers de personnes ont commémoré le deuxième anniversaire du mouvement social d'octobre 2019. Andrea Briceño, la quarantaine, est venue avec toute sa famille protester contre les inégalités profondes qui persistent dans le pays. Elle reprend des slogans contre le président actuel, le milliardaire de droite Sebastián Piñera, mis en examen pour corruption après avoir été cité dans le scandale des Pandora Papers : « Un voleur et un assassin ne peut pas rester au pouvoir. Il est comme Pinochet, c'est un assassin ». Car sous son gouvernement, explique-t-elle, le mouvement social a été durement réprimé. Aujourd'hui, elle n'est convaincue par aucun des candidats à l'élection présidentielle.

L'ancien leader étudiant Gabriel Boric, favori du scrutin

Evelyn, une autre manifestante, votera, elle, pour Gabriel Boric, un ancien leader étudiant de gauche. Car ce jeune député est le plus favorable aux mouvements sociaux et au travail de l'Assemblée constituante, dit-elle : « Je pense que parmi les candidats il est celui qui a le plus de conscience sociale et répond le mieux à ces dynamiques ». 

Plus au centre, une sénatrice démocrate-chrétienne, Yasna Provoste, espère bénéficier des difficultés d'un troisième candidat, Sebastián Sichel, soutenu lui par la coalition de droite au pouvoir. Antoine Maillet est chercheur en sciences politiques. Il enseigne à l'université du Chili : « Sebastián Sichel, le candidat de l'actuel président Sebastián Piñera, même s'il essaie de ne pas se montrer trop proche de lui, car il a une popularité très basse encore plus basse avec les Pandora Papers qui l'ont directement mentionné, a une campagne en chute libre actuellement ».

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José Kast, ultra-nationaliste et défenseur de la dictature Pinochet

Celui qui semble profiter le plus de cette situation est le candidat d'extrême droite José Kast, qui participait à une conférence ce mardi dans la très conservatrice université des Andes, où il a été reçu chaleureusement. « Il est très populaire [dans cette université] », et la majorité des étudiants sur le campus vont voter pour lui, explique Isabela Sepulveda, 21 ans.

Ancien sénateur, José Kast avait fait 8% à la présidentielle de 2017. Et pendant sa campagne, il avait déclaré « Si Pinochet était encore vie, il voterait pour moi ». Une phrase qui ne dérange pas Juan Andrés Rosales, rencontré sur le campus. Il soutient aussi l'idée du candidat de creuser une tranchée à la frontière nord du Chili pour empêcher l'arrivée de migrants latino-américains : « Je trouve que ce serait une bonne chose, car le Chili est en train de se remplir de beaucoup de gens qui viennent d'autres pays et qui nous prennent notre travail. Donc cette proposition est importante pour le Chili. »

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José Kast joue aussi sur la peur concernant les réformes économiques et sociales proposées par la gauche. Voici ce qu'en pense Juan Andrés : « Gabriel Boric veut qu'on ressemble au Vénézuéla, c'est ce que laisse penser sa campagne ».

Pour le chercheur Antoine Maillet, deux principaux défis attendent le ou la future présidente : l'immense défiance des Chiliens envers la classe politique. Et puis la transition annoncée vers une nouvelle Constitution. Un président de droite ou d'extrême droite pourrait mettre des bâtons dans les roues de l'Assemblée constituante. Un ou une présidente de gauche au contraire tenterait probablement de favoriser l'adoption de la nouvelle Constitution, qui s'annonce plus proche d'un modèle social-démocrate.

Le second tour de l'élection présidentielle est prévu le 19 décembre. L'Assemblée constituante, majoritairement de gauche, a encore près de huit mois pour rédiger une nouvelle Constitution, qui sera ensuite soumise à référendum.

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