Dans les nombreux lapsus qui émaillent la carrière de George Bush, il y en a un qui prend aujourd’hui une résonance toute particulière. Lors d’une conférence de presse à Washington, en octobre 2001, le président américain avait déclaré : “Et il n’y a pas de doute dans mon esprit, pas le moindre doute que nous allons échouer. L’échec ne fait pas partie de notre vocabulaire. Notre grande nation va guider le monde et nous réussirons.” De fait, lorsque les Etats-Unis échouent dans leurs entreprises, du moins dans les plus importantes, ils affirment qu’ils réussissent et continuent de guider le monde. Jusqu’où peuvent-ils maintenir ensemble ces affirmations, c’est là au fond la question posée par le rapport Baker-Hamilton. Cette commission bipartite veut en effet changer de rhétorique – on ne parle plus de “victoire” – sans modifier les termes les plus importants de l’équation irakienne. Le déni de la réalité, constant depuis trois ans à la Maison-Blanche, a vécu. C’est en ce sens que nous assistons à la fin d’un film, de ce qui était un conte de fées imaginé par les proches du président.
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Une autre population a souffert en son temps, non pas d’une intervention militaire, mais d’un coup d’État largement soutenu, voire fomenté par les États-Unis, c’est évidemment la population chilienne. Aujourd’hui disparaît le dictateur, mais pas la polémique qui l’entoure. Comme le Chili est sorti de son règne déplorable en assez bon état économique, il se trouvera toujours – là-bas ou du côté des conservateurs anglo-saxons – des gens pour défendre tout ou partie du personnage. Sans vouloir le comparer à Bush, Pinochet aussi était capable de lapsus et de saillies (on en rappelle quelques-unes p. 17). Par exemple celle-ci, datée de 1974 : “Si on analyse le coup d’État militaire de 1973, on y voit l’œuvre de la main de Dieu.”
Philippe Thureau-Dangin