05 décembre, 2006

état stationnaire

Augusto Pinochet, dont les ennuis de santé l'ont aidé à échapper jusqu'ici à un procès pour violation des droits de l'homme, était lundi dans un état stationnaire à l'hôpital après un infarctus dans la nuit de samedi à dimanche, ses médecins estimant que ses jours étaient toujours en danger.
L'ancien dictateur nonagénaire est conscient et peut parler avec ses proches. "Il n'y a pas de complications, il reste stable et dans un état grave", a expliqué le docteur Juan Ignacio Vergara, porte-parole de l'équipe médicale lors du dernier bulletin de santé. "Nous ne pourrons pas dire qu'il n'est plus dans un état critique avant que 24 à 48 heures depuis son admission se soient écoulées. Les jours du général sont toujours en danger."

Si la situation reste identique, Pinochet devra rester hospitalisé au minimum encore une semaine. Mais on n'exclut pas le risque de complications, d'une nouvelle crise cardiaque ou d'une nouvelle infection, a ajouté le Dr Vergara.


Les médecins excluent désormais de pratiquer un pontage, l'angioplastie effectuée dimanche pour débloquer l'artère coronaire ayant été "couronnée de succès" et les choses étant "sous contrôle". Les médecins ont également pu évacuer le liquide qui s'était accumulé dans les poumons de leur patient.

Inculpé il y a une semaine pour deux meurtres d'opposants commis par la "Caravane de la mort", Pinochet était assigné à résidence chez lui dans la banlieue de Santiago lorsqu'il a eu sa crise cardiaque. Mais lundi, la Cour d'appel de Santiago a prononcé sa libération moyennant une caution d'un million de pesos (1.890 dollars, 1.430 euros).

Le 25 novembre, à l'occasion de son 91e anniversaire, Pinochet avait pour la première fois reconnu explicitement sa responsabilité politique pour les actes de son gouvernement pendant les années de la dictature (1973-90), qui mena des milliers d'assassinats politiques, pratiqua la torture généralisée, les détentions illégales et disparitions.

"Aujourd'hui, approchant la fin de mes jours, je veux dire que je n'ai de rancune contre quiconque, que j'aime ma patrie par-dessus tout et que j'assume la responsabilité politique pour tout ce qui a été fait, qui n'avait d'autre but que de promouvoir la grandeur du Chili et d'éviter sa désintégration", déclarait-il dans un communiqué lu par sa femme.

Suite à l'ouverture d'un enquête sur ses comptes aux Etats-Unis en 2004, Pinochet a été inculpé pour évasion fiscale, ce qui a choqué même ses partisans les plus fervents. La semaine dernière, il a été inculpé pour violation des droits de l'homme pour l'assassinat de deux gardes du corps de Salvador Allende, le président qu'il renversa en 1973. C'était la cinquième action de ce type contre Pinochet, qui est également inculpé dans une autre affaire de violation des droits de l'Homme.
Depuis son arrestation à Londres en 1998, la santé défaillante d'Augusto Pinochet lui a permis d'échapper à la justice à plusieurs reprises, deux procès ayant été abandonnés pour cette raison et ses détracteurs affirmant qu'il exagère systématiquement ces ennuis de santé.

L'ex-général a un pacemaker et souffre de diabète, d'arthrose et de démence sénile suite à plusieurs attaques.

"Il est hospitalisé chaque fois qu'il risque une inculpation. C'est pourquoi nous avons des doutes cette fois-ci encore", a déclaré sur les ondes de Radio Bio Bio l'avocat des droits de l'Homme Hiram Villagra.

Mais Pinochet continue d'avoir de nombreux fidèles, qui estiment qu'il a sauvé le pays du communisme. Une dizaine d'entre eux a d'ailleurs passé la nuit en vigile devant l'hôpital, en prière pour certains, rejoints par de nombreux autres dans la journée. "Il est comme un père pour moi, nous lui devons tant", soupirait Julieta Aguilar, serrant contre elle un petit buste en bronze de Pinochet.